15° dimanche - Temps Ordinaire

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Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.

Annee a 15eme du temps ordinaire mt 13 1 23Année A Dimanche du 15eme du temps ordinaire Mt 13, 1-23 (121.54 Ko)

Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30). 

Et Radio Ecclésia et en Corse.

15ème dimanche du Temps Ordinaire

1er lecture (Is 55, 10-11)

Psaume (Ps 64 (65), 10abcd, 10e-11, 12-13, 14)

2e lecture (Rm 8, 18-23)

Évangile (Mt 13, 1-23)

1er lecture (Is 55, 10-11)

« Ainsi parle le Seigneur : La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, donnant la semence au semeur et le pain à celui qui doit manger ; ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission. » – Parole du Seigneur.

Dans cette lecture, la Parole de Dieu est comparée à la pluie qui descend des cieux. La Parole de Dieu ne se tarit pas dans l’Écriture sainte, car c’est une réalité vivante, opérante et efficace.

Jésus est celui qui est descendu des cieux. « je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé. Or c'est la volonté de celui qui m'a envoyé que je ne perde rien de tout ce qu'il m'a donné, mais que je le ressuscite au dernier jour » (Jean 6, 38-39). En lui s’accomplit cet oracle d’Isaïe, lu dans la veillée pascale, en commençant la lecture au verset 1. « Ah ! vous tous qui avez soif, venez vers l'eau, même si vous n'avez pas d'argent » (Is 55,1) Et continue : « Je conclurai avec vous une alliance éternelle, réalisant les faveurs promises à David » (Is 55). Jésus-Christ est cette Parole définitive et efficace qui est venue du Père et qui est retournée à Lui, en réalisant parfaitement sa volonté dans le monde.

De plus, la Parole de Dieu annoncée en Jésus doit avoir un résultat. Le verset « ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission » s’accomplira selon la prière du Notre Père, enseignée par Jésus. En particulier, « que ton règne vienne, que ta volonté soit faite, sur la terre comme au ciel ».

Le catéchisme de l’Église catholique enseigne : « 2817 Que ton règne vienne (Mt 6, 10). Cette demande, c’est le "Marana Tha", le cri de l’Esprit et de l’Épouse : "Viens, Seigneur Jésus" : Quand bien même cette prière ne nous aurait pas fait un devoir de demander l’avènement de ce Règne, nous aurions de nous-mêmes poussé ce cri, en nous hâtant d’aller étreindre nos espérances. Les âmes des martyrs, sous l’autel, invoquent le Seigneur à grands cris : ‘Jusques à quand, Seigneur, tarderas-tu à demander compte de notre sang aux habitants de la terre ?’ (Ap 6,10). Ils doivent en effet obtenir justice, à la fin des temps. Seigneur, hâte donc la venue de ton règne !" (Tertullien, or. 5). 2818 Dans la prière du Seigneur, il s’agit principalement de la venue finale du Règne de Dieu par le retour du Christ (cf. Tt 2,13)… »

La manifestation glorieuse de Jésus sera le Règne de Dieu et sa Volonté agissant puissamment en nous ; et nous sentirons le désir que la volonté divine se fasse, car c’est notre joie et notre divinisation. La venue glorieuse de Jésus sera la vie trinitaire, dans les cœurs, et entre les hommes.

Dans l’évangile, l’Esprit Saint est représenté par un fleuve d’eaux vives (Jn 7, 38-39). Et nous pouvons aussi comparer à l’Esprit Saint à « la pluie et la neige qui descendent des cieux [qui] n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, donnant la semence au semeur et le pain à celui qui doit manger » (Is 55, 10). La fin de l’Apocalypse nous montre l’accomplissement de la Parole de Dieu sur la terre avec l’image d’une Jérusalem nouvelle, d’un arbre de vie et du fleuve de Vie. « Et il me montra le fleuve d’eaux vives, aussi pur que lumineux, comme la glace ; et il sortait du Trône de Dieu et de l’Agneau » (Ap 22, 1 F. Guigain). L’expression de l’Apocalypse est nettement trinitaire. L’Esprit Saint, le fleuve d’eaux vives, le trône de Dieu le Père, et de l’Agneau, le Fils. L’Esprit Saint est la communication aux hommes de la vie trinitaire, divine. Dieu est le Dieu vivant parce qu’il est trinitaire. L’Esprit Saint est une procession de lumière. L’image de la glace évoque « les eaux du dessus » de la Genèse (Gn 1, 7), imaginées par les anciens comme étant glacées. Cette procession de lumière, un « fleuve d’eaux vives », irrigue la Cité des hommes, préparée à passer dans l’éternité « pour les siècles des siècles » (Ap 22, 5), imitant alors l’Assomption de la Vierge Marie, la première qui reçut l’Esprit Saint et fut prise à l’ombre du Très Haut (Lc 1, 35).

Pour l’instant, la prière du Notre Père est comme une semence que Jésus a semé sur la terre, et nous entendrons dans l’évangile de ce dimanche cet avertissement de Jésus (Mt 13, 18-23) :

« 18 Vous donc, / écoutez la parabole de la semence.

19 Quiconque entend la parole du Royaume / et ne la comprend pas,
le Mauvais survient / et s’empare de ce qui est semé dans son cœur :

celle-ci, / c’est celle qui a été semée au bord du chemin.

20 Celle qui est semée sur la pierraille, / c’est celui qui entend la Parole et la reçoit sur l’heure avec joie ;
21 cependant il n’a pas de racines en lui, / mais il est l’homme d’un moment :

dès qu’advient la détresse ou la persécution à cause de la Parole, / il trébuche aussitôt.

22 Celle ensuite, qui est semée dans les ronces, / c’est celui qui entend la Parole ;
mais le souci du monde / et la séduction de la richesse

étouffent la Parole, / qui ne donne pas de fruit.

23 Celle qui est semée dans la bonne terre, / c’est celui qui entend la Parole et la comprend :
elle porte du fruit / et produit

soit cent, soit soixante, soit trente. »

Et saint Irénée, évoquant le temps de la Parousie, ne craint pas la surenchère :

« Il viendra des jours où des vignes croîtront, qui auront chacune dix mille ceps, et sur chaque cep dix mille branches, et sur chaque branche dix mille bourgeons, et sur chaque bourgeon dix mille grappes, et sur chaque grappe dix mille grains, et chaque grain pressé donnera vingt-cinq cuves de vin » (AH. V, 33, 3).

Cette surenchère, qui décrit la création visible, concerne aussi la création invisible, celle de la foi, et elle nous invite à regarder les richesses de l’Église, ses dogmes et sa morale, avec appétit et désir : « Et lorsque l’un des saints cueillera une grappe, une autre grappe lui criera : ‘Je suis meilleure, cueille-moi et, par moi, bénis le Seigneur !’ » (V, 33, 3).

Chers auditeurs,

• L’avenir n’est pas à une religion universelle « a-dogmatique », sans dogme, mais à une exploration de la richesse et de la saveur des dogmes, gloire de l’Église.

• L’avenir n’est pas à une religion amorale, sans morale et sans discipline, mais à une exploration de la richesse et de la saveur des vertus, gloire de l’Église.

« La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre... » (Is 55, 10)

 

Psaume (Ps 64 (65), 10abcd, 10e-11, 12-13, 14)

Tu visites la terre et tu l’abreuves, tu la combles de richesses ; les ruisseaux de Dieu regorgent d’eau, tu prépares les moissons. Ainsi, tu prépares la terre, tu arroses les sillons ; tu aplanis le sol, tu le détrempes sous les pluies, tu bénis les semailles. Tu couronnes une année de bienfaits, sur ton passage, ruisselle l’abondance. Au désert, les pâturages ruissellent, les collines débordent d’allégresse. Les herbages se parent de troupeaux et les plaines se couvrent de blé. Tout exulte et chante !

Un psaume a un sens littéral, moral, allégorique et eschatologique.

Un sens littéral. Chacun sait que pour qu’une terre agricole retienne bien l’eau, il faut qu’elle soit riche en matière organique, en humus. Avant l’introduction des engrais chimique, la norme était autour de 8% de matière organique, maintenant, on se contente de 2% et moins encore. Chacun sait aussi que les haies d’un bocage limitent le ruissellement et aident l’eau à s’infiltrer jusqu’à la nappe phréatique. Mais, au-delà des savoir-faire humains, chacun est conscient que la vie vient du Créateur. Jamais l’homme ne saurait créer l’environnement vivant qui nous entourne. Nous ne savons que le préserver, lui donner des conditions favorables, ou pas. Il est donc tout à fait rationnel que le peuple hébreu remercie le Créateur pour la fécondité de la terre et des troupeaux.

Nous pouvons continuer à prier ce psaume dans son sens littéral. Au cours de l’histoire, même très récente, certaines populations chrétiennes éprouvées, ont eu des miracles pour se nourrir, en pleine guerre, en Herzégovine, des maisonnées chrétiennes envahis de réfugiés, ont vu des productions extraordinaires dans des potagers. Autre exemple, celle de la résurrection inespérée, d'une renaissance miraculeuse que plus personne n'attendait, celle de la mer d'Aral. Dans les années 1960, ce lac d'eau salée s'étendait sur plus de 65.000 kilomètres carrés entre le Kazakhstan et l'Ouzbékistan en Asie centrale. Quelques décennies plus tard, il avait perdu 70% de sa surface. La disparition de la mer d'Aral a été reconnue comme l'une des plus grandes catastrophes écologiques du XXe siècle. Une catastrophe fruit de l'activité humaine : c'est à cause du détournement des deux fleuves qui l'alimentaient que la mer s'est peu à peu changée en désert. Et avec elle, ont disparu les ports florissants et les filets remplis de poissons. Mais, Dieu sait pourquoi, "la Petite Aral" a commencé à se remplir à nouveau. Un retour qui a transformé le quotidien des riverains.

Le sens moral consiste à prendre en considération, l’Auteur de la vie et le Créateur de l’univers. Que penser de celui qui passe sa vie sans jamais un regard de reconnaissance ? Alors remercions Dieu pour tout ce que nous avons.

Le psaume a aussi un sens allégorique. On peut comparer celui qui lit la Bible chaque jour, ou le Missel, avec cette terre que Dieu visite : « Tu visites la terre et tu l’abreuves, tu la combles de richesses ; les ruisseaux de Dieu regorgent d’eau, tu prépares les moissons ». Et en effet, celui qui lit la Parole de Dieu souvent prépare une belle moisson, des fruits de charité et de sainteté dans sa vie.

On peut comparer celui qui pleure ses péchés et fait une pénitence à la terre que Dieu prépare à un bel avenir : « Ainsi, tu prépares la terre, tu arroses les sillons ; tu aplanis le sol, tu le détrempes sous les pluies, tu bénis les semailles ».

On peut dire aussi, avec saint Augustin : « creusons d'abord des sillons qui seront ensuite arrosés ; que notre coeur trop dur s'ouvre au soc de la parole de Dieu. ‘Arrosez ses sillons, multipliez ses fruits’. Voilà ce que nous voyons ; les hommes croient, leur foi engendre d'autres croyants, et ces croyants d'autres croyants encore… Ainsi se multiplie la semence ; on jette quelques grains et des moissons surgissent » (Augustin, sur les Psaumes 65)

On peut comparer celui qui vient à l’Eucharistie - Eucharistie signifie action de grâce dedededed – à celui qui dit au Seigneur : « Tu couronnes une année de bienfaits, sur ton passage, ruisselle l’abondance. Au désert, les pâturages ruissellent, les collines débordent d’allégresse. Les herbages se parent de troupeaux et les plaines se couvrent de blé. Tout exulte et chante ! »

Avec saint Augustin : « Il y eut une première moisson, il y en aura une seconde à la fin des temps. La première moisson se composa de Juifs, parce que c'était à eux que les Prophètes étaient envoyés pour prêcher l'avènement du Sauveur. C'est pourquoi le Seigneur disait à ses disciples : ‘Voyez comme les campagnes blanchissent pour la moisson (Jn 4, 35)’ : c'étaient les campagnes de la Judée. ‘D'autres’, leur dit-il encore, ‘ont travaillé, et vous êtes entrés dans leurs travaux (Jn 4, 38)’. Les prophètes ont travaillé pour semer, et vous, c'est avec la faux que vous entrez dans leurs labeurs. La première moisson est donc faite, et c'est de ce premier froment qui fut alors purifié, que l'on a ensemencé toute la terre, pour produire cette autre moisson que l'on doit recueillir à la fin des temps […] De même que dans la première moisson les Prophètes travaillèrent jusqu'à l'arrivée du Sauveur : ainsi, dans cette seconde, ont travaillé les Apôtres, et travaillent tous les prédicateurs de la vérité, jusqu'à la fin des siècles, alors que le Seigneur enverra ses anges pour la récolte. C'était donc tout d'abord le désert, mais les confins du désert se sont engraissés. Voilà que dans les endroits où les Prophètes ne s'étaient pas fait entendre, on a reçu le Seigneur des Prophètes : les confins du désert s'engraisseront, et les collines auront une ceinture de joie ». (Augustin, sur les Psaumes 65).

Il y a un sens eschatologique.

« Tu prépares les moissons. […] Au désert, les pâturages ruissellent, les collines débordent d’allégresse. Les herbages se parent de troupeaux et les plaines se couvrent de blé. Tout exulte et chante ! »

Ces versets auront un accomplissement lors de la Venue glorieuse du Christ car nous lisons à la fin de l’Apocalypse :

« Puis l'Ange me montra le fleuve de Vie, limpide comme du cristal, qui jaillissait du trône de Dieu et de l'Agneau. Au milieu de la place, de part et d'autre du fleuve, il y a des arbres de Vie qui fructifient douze fois, une fois chaque mois ; et leurs feuilles peuvent guérir les païens. De malédiction, il n'y en aura plus ; le trône de Dieu et de l'Agneau sera dressé dans la ville, et les serviteurs de Dieu l'adoreront ; ils verront sa face, et son nom sera sur leurs fronts » (Ap 22, 1-4 BJ)

Et ceci nous amène à la seconde lecture. « Frères, j’estime qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire qui va être révélée pour nous. »

2e lecture (Rm 8, 18-23)

Frères, j’estime qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire qui va être révélée pour nous. En effet, la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise au pouvoir du néant, non pas de son plein gré, mais à cause de celui qui l’a livrée à ce pouvoir. Pourtant, elle a gardé l’espérance d’être, elle aussi, libérée de l’esclavage de la dégradation, pour connaître la liberté de la gloire donnée aux enfants de Dieu. Nous le savons bien, la création tout entière gémit, elle passe par les douleurs d’un enfantement qui dure encore. Et elle n’est pas seule. Nous aussi, en nous-mêmes, nous gémissons ; nous avons commencé à recevoir l’Esprit Saint, mais nous attendons notre adoption et la rédemption de notre corps. – Parole du Seigneur.

Saint Paul évoque la glorification de toute la création à travers celle des enfants de Dieu ! C’est en regardant le but final, que l’on peut vraiment comprendre pourquoi et en quoi le temps la Venue glorieuse est une nécessaire préparation à l’éternité, dedeed comme l’écrit saint Irénée : « Ainsi donc, certains se laissent induire en erreur par les discours hérétiques, au point de méconnaître les "économies" de Dieu et le mystère de la résurrection des justes Lc 14, 14 et du royaume qui sera le prélude de l’incorruptibilité, royaume par lequel ceux qui en auront été jugés dignes s’accoutumeront peu à peu à saisir Dieu. » (AH, V, 32, 1)

Saint Irénée, qui vit à une époque de persécutions, est très sensible à la justice. Les saints qui ont été comptés pour rien et sont morts dans des conditions infamantes vont être honorés par Dieu qui va leur donner de participer à la gloire de Jésus, c’est-à-dire à son jugement et à son règne. Ils se manifesteront visiblement aux côtés du Christ. Des hommes encore présents sur terre à ce moment, ne resteront que « ceux qui auront été jugés dignes du Royaume » :

« Aussi est-il nécessaire de déclarer à ce sujet que les justes doivent d’abord, dans ce monde rénové, après être ressuscités à la suite de l’apparition du Seigneur, recevoir l’héritage promis par Dieu aux pères et y régner ; ensuite seulement aura lieu le jugement de tous les hommes. Il est juste, en effet, que, dans ce monde même où ils ont peiné et où ils ont été éprouvés de toutes manières par la patience, ils recueillent le fruit de cette patience ; que, dans le monde où ils ont été mis à mort à cause de leur amour pour Dieu, ils retrouvent la vie [ils ne se réincarnent pas, ils apparaissent comme le Christ ressuscité] ; que, dans le monde où ils ont enduré la servitude, ils règnent. Car Dieu est riche en tous biens, et tout lui appartient. Il convient donc que le monde lui-même, restauré en son état premier, soit, sans plus aucun obstacle, au service des justes. C’est ce que l’Apôtre fait connaître dans son épître aux Romains, lorsqu’il dit : "La création attend avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu : car elle a été assujettie à la vanité, non de son gré, mais à cause de celui qui l’y a assujettie, avec l’espérance qu’elle aussi serait un jour libérée de l’esclavage de la corruption pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu (Rm 8,19-21)." » (Saint Irénée, Traité contre les hérésies (AH), V, 32, 1).

Certains commentateurs d’Irénée ont cru qu’il imaginait une surpopulation avec les saints qui reprennent une vie biologique sur la terre. Mais c’est une erreur. Pour régner « dans ce monde même où ils ont peiné », il leur suffit d’apparaître à la manière du Christ ressuscité. Ils ne reviennent pas sur la terre, mais ils se manifestent glorieusement sur la terre. Pensons au Christ ressuscité qui apparaît à Jérusalem (et mange avec ses disciples) : il règne là où il a souffert… Nous n’avons pas besoin d’imaginer que les justes ressuscités reprennent une vie biologique comme nous maintenant.

On reproche aux premiers Pères de l’Église leurs descriptions exubérantes d’une nourriture abondante, il s’agit en réalité de la traduction imagée d’une belle réalité : une fois que les hommes seront libérés des influences mortifères de Satan, les conséquences des péchés contre la nature (pollutions, désertification) pourront être réparées peu à peu (d’où la symbolique des mille ans), par le génie humain éclairé par la grâce, et les anges. Saint Irénée continue : « La bénédiction dont nous venons de parler [Gn 27, 27-29] se rapporte donc sans conteste aux temps du royaume : alors régneront les justes, après être ressuscités d’entre les morts et avoir été, du fait de cette résurrection même, comblés d’honneur par Dieu ; alors aussi la création, libérée et renouvelée, produira en abondance toute espèce de nourriture, grâce à la rosée du ciel et à la graisse de la terre » (AH, V, 33, 3).

Depuis que l’humanité ne veut plus recevoir la volonté divine en tant que vie, le Créateur se trouve dans la situation d’un riche seigneur, qui, après avoir bâti un grand et beau palais, y est reçu à coups de pierres. Si l’univers a été maintenu dans l’existence, c’est sans aucun doute à cause de la promesse qui suit immédiatement la chute : « Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, dit Dieu au serpent, entre ton lignage et le sien ; il [le lignage ou un homme dans celui-ci] t’écrasera la tête et tu l’atteindras au talon » (Gn 3, 15). À l’humanité déchue, Jésus est envoyé comme Sauveur. Mais au moment de la Venue glorieuse de Jésus, la « Parousie », ceux qui se seront fixés dans le refus de la grâce offerte en Jésus n’auront plus le droit de vivre sur la Terre : c’est ce que l’Apocalypse dit en parlant de la Bête et du faux prophète expulsés et jetés dans l’étang de feu (Ap 19, 20). Seuls ceux qui veulent le règne de Dieu pourront vivre sur la Terre, et ils vivront en étant vivifiés par le Seigneur, le but de la création pourra alors s’accomplir. L’Apocalypse s’achève par une prière : « Et l’Esprit et l’épouse disaient : ‘Viens !’ Et que celui qui écoute dise : ‘Viens !’ Et que celui qui a soif vienne et prenne des eaux vives gratuitement ! » (Ap 22, 17). « Car la création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu […] Toute la création jusqu’à ce jour gémit en travail d’enfantement » (Rm 8, 18-19). Et, dit saint Paul quelques versets plus loin : « l’Esprit vient au secours de notre faiblesse ; car nous ne savons que demander pour prier comme il faut ; mais l’Esprit lui-même intercède pour nous en des gémissements ineffables, et Celui qui sonde les cœurs sait quel est le désir de l’Esprit et que son intercession pour les saints correspond aux vues de Dieu » (Rm 8, 26-27).

Évangile (Mt 13, 1-23)

Dans une traduction rythmée, suivant l’araméen, donnée sur mon site foi-vivifiante.fr.

1 En ce jour-là,
Jésus sortit de la maison, / et il était assis au bord de la mer.

2 Auprès de lui se rassemblèrent des foules nombreuses / de sorte qu’il monta s’asseoir dans une barque ;
et toute la foule / se tenait sur la rive de la mer.

3 Il parlait avec eux de beaucoup de choses par analogie / et il dit :

Voici : / le semeur sortit pour semer !

4 Comme il semait,
il arriva qu’ / [une partie] tomba au bord du chemin,

et les oiseaux vinrent / et la mangèrent.

5 Une autre [partie] / tomba sur la pierraille,
où il n’y avait pas / beaucoup de terreau ;

et, sur l’heure, / elle germa,

parce qu’il n’y avait pas / de profondeur de terre.

6 Or, quand le soleil se leva, / elle brûla

et, parce qu’elle n’avait pas de racines, / elle sécha.

7 Une autre [partie] est tombée / dans les ronces ;
et les ronces montèrent / et l’ont étouffée.

8 Une autre [partie] est tombée / dans la bonne terre,
et elle donna des fruits

soit cent, / soit soixante, / soit trente.

Celui qui a des oreilles pour entendre, / qu’il entende !

10 Ses disciples s’approchèrent / et lui disaient :
Pourquoi est-ce par analogie / que tu parles avec eux ?

11 Or, lui, il répondit / et leur dit :
À vous il est donné de connaître le mystère du royaume des Cieux, / mais ce n’est pas donné à ceux-là.

12 À celui qui a,

il lui sera donné / et il sera dans l’abondance ;

mais à celui qui n’a pas,

même ce qu’il a / cela lui sera enlevé.

13 Voilà pourquoi c’est par analogies / que je parle avec eux :
afin qu’ils voient, / et ne voient pas,

qu’ils entendent, / et n’entendent pas ni ne comprennent.

14 Est accomplie en eux la prophétie d’Isaïe / qui a dit :

Vous aurez beau écouter, / vous ne comprendrez pas.

Vous aurez beau regarder, / vous ne saurez pas.

15 Il s’est endurci, en effet, / le cœur de ce peuple

et ils sont devenus / durs d’oreille,

ils ont fermés les yeux, / de peur qu’ils ne voient,

ni n’entendent par leurs oreilles / ni ne comprennent dans leur cœur,

ni ne se convertissent, / et que je les guérisse.

16 Mais vous, / heureux vos yeux parce qu’ils voient,
et vos oreilles / parce qu’elles entendent !

Amen en effet, / je vous le dis :

beaucoup de prophètes et de justes ont désiré vivement voir ce que vous voyez, / et ne l’ont pas vu,

entendre ce que vous entendez, / et ne l’ont pas entendu.

18 Vous donc, / écoutez la parabole de la semence.

19 Quiconque entend la parole du Royaume / et ne la comprend pas,
le Mauvais survient / et s’empare de ce qui est semé dans son cœur :

celle-ci, / c’est celle qui a été semée au bord du chemin.

20 Celle qui est semée sur la pierraille, / c’est celui qui entend la Parole et la reçoit sur l’heure avec joie ;
21 cependant il n’a pas de racines en lui, / mais il est l’homme d’un moment :

dès qu’advient la détresse ou la persécution à cause de la Parole, / il trébuche aussitôt.

22 Celle ensuite, qui est semée dans les ronces, / c’est celui qui entend la Parole ;
mais le souci du monde / et la séduction de la richesse

étouffent la Parole, / qui ne donne pas de fruit.

23 Celle qui est semée dans la bonne terre, / c’est celui qui entend la Parole et la comprend :
elle porte du fruit / et produit

soit cent, soit soixante, soit trente.
»

Chers auditeurs, c’est d’abord une parabole de la Parole. Jésus veut former des missionnaires qui ne découragent pas.

Les versets 13-14 sont durs. Il ne s’agit pas d’une prédestination à l’incrédulité, mais d’une préscience de Dieu. Comme jadis Dieu dit à Moïse du sein du buisson : « Je sais bien que le roi d'Égypte ne vous laissera aller que s'il y est contraint par une main forte » (Exode 3, 19).

Nous suivons saint Irénée,Contre les Hérésies Liv.4 ch.29.

« Ceux qui ne croient pas sont comme ceux qui, à cause de quelque maladie de leurs yeux, ne peuvent regarder la lumière du soleil, tandis qu'à ceux qui croient en lui et le suivent il donne une plus pleine et plus grande illumination de l'intelligence. De la même manière, l'Apôtre dit, dans l'épître aux Romains: ‘Et comme ils ne se sont pas souciés de connaître Dieu, Dieu les a livrés à leur intelligence pervertie pour faire ce qui ne convient pas Rm 1,28.’ Et dans la deuxième épître aux Thessaloniciens il dit ouvertement, parlant de l'Antéchrist : ‘C'est pourquoi Dieu leur enverra une Puissance d'égarement, pour qu'ils croient au mensonge, afin que soient condamnés tous ceux qui n'auront pas cru à la vérité, mais se seront complu dans l'iniquité 2Th 2,11-12’. » (Saint Irénée, AH IV, 29).

Cette perle de l’évangile de Matthieu fait suite au jugement des villes incrédules (Mt 11, 20-24) et au jugement de cette génération (Mt 12, 38-42). On entend résonner aussi les plaintes du Seigneur dans le livre du Deutéronome : « ils se sont corrompus, eux qu’il avait engendrés sans tare, génération fourbe et tortueuse » (Dt 32, 5 cf. v. 20).

Ce qui s’oppose au projet du semeur, ce sont à la fois des mauvaises dispositions et des événements.

Dans le premier groupe, l’image du bord du chemin évoque l’importance accordée aux choses extérieures (par exemple le qu’en dira-t-on), à l’opposé de l’intériorité dans la bonne terre. Cette situation expose à un évènement délétère : l’action démoniaque qui vole la semence. Il ne reste plus rien. Il n’y a pas de foi, pas d’œuvres de la foi, « le Mauvais survient et s’empare de ce qui est semé dans son cœur ».

Dans le second groupe, les mauvaises dispositions sont celles de celui qui «​​​​​​​ n’a pas de racines en lui, mais il est l’homme d’un moment ». Il est question du manque de racines, ce qui évoque un rapport au temps qui n’est pas équilibré, par exemple un activisme (la peur de la page d’agenda vide) qui fait que l’on ne s’enracine pas : « dès qu’advient la détresse ou la persécution à cause de la Parole, il trébuche aussitôt ».

Dans le troisième groupe, les mauvaises dispositions sont celles de celui qui est séduit par « la richesse » : « le souci du monde et la séduction de la richesse étouffent la Parole ».

Dans le quatrième groupe, dans une terre bonne, la semence donne du fruit.

Saint Augustin : « Pourquoi vous avilir à vos propres yeux, quand le Créateur de tout l'univers et le vôtre vous estime à un si haut prix, que, pour vous, il fait couler chaque jour le sang adorable de son Fils unique ? Or, vous ne vous avilirez point, […] si en recueillant la semence de la divine parole que maintenant même répand dans vos coeurs le laboureur céleste, vous ne la laissez point fouler aux pieds par les indignes qui passent dans le chemin, ni dessécher follement quand elle germe déjà, comme si elle n'avait trouvé que des pierres dans votre conscience endurcie, ni étouffer enfin au milieu des épines et du mouvement funeste de vos passions. En évitant avec horreur d'être stériles comme cette terre ingrate et vouée à la malédiction, vous rencontrerez un terrain riche et fertile où avec une joie immense vous représenterez au divin Semeur, qui vous aura en même temps arrosés, sa semence multipliée au centuple, ou bien, si vous ne pouvez aller jusque là, vous lui rendrez soixante pour un ; il se contentera même de trente, si vous ne pouvez atteindre à soixante ; puisque tous seront reçus dans les greniers célestes, admis à l'éternel repos.

Ce pain céleste du bonheur sera formé du travail de tous les élus ; et chacun des ouvriers qui travaillent loyalement à la vigne du Seigneur en recevra largement et s'en rassasiera avec joie. N'est-il pas vrai que Celui qui sème, qui fait pleuvoir, qui arrose et qui, tout à la fois, donne encore l'accroissement, fait briller partout sa gloire à l'aide de la prédication évangélique ? » (Saint Augustin, Sermon 216)

Date de dernière mise à jour : 06/07/2023