19e dimanche ordinaire (C)

Logo radio esperance

Podcast sur  : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#

Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30. 

Première lecture (Sg 18, 6-9)

Psaume (Ps 32 (33), 1.12, 18-19,20.22)

Deuxième lecture (He 11, 1-2.8-19)

Évangile (Lc 12, 32-48)

Première lecture (Sg 18, 6-9)

La nuit de la délivrance pascale avait été connue d’avance par nos Pères ; assurés des promesses auxquelles ils avaient cru, ils étaient dans la joie. Et ton peuple accueillit à la fois le salut des justes et la ruine de leurs ennemis. En même temps que tu frappais nos adversaires, tu nous appelais à la gloire.

Dans le secret de leurs maisons, les fidèles descendants des justes offraient un sacrifice, et ils consacrèrent d’un commun accord cette loi divine : que les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire ; et déjà ils entonnaient les chants de louange des Pères. – Parole du Seigneur.

« La nuit de la délivrance pascale avait été connue d’avance par nos Pères  » : Moïse, le jour de sa vocation, avait reçu une promesse du Seigneur : « Va, réunis les anciens d’Israël et dis-leur: le Seigneur, le Dieu de vos pères, m’est apparu -- le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob -- et il m’a dit: Je vous ai visités et j’ai vu ce qu’on vous fait en Égypte, alors j’ai dit: Je vous ferai monter de l’affliction d’Égypte vers la terre des Cananéens… » (Ex 3, 16-18). Ils y ont cru et cette promesse s’est réalisée à travers des événements redoutables communément appelés les plaies d’Égypte et que le Papyrus d’Ipuwer, un scribe égyptien, confirme.

Papyrus 2:5-6 La terre est couverte de plaies. Il y a du sang partout. Papyrus 2:10 La rivière est en sang. Les êtres humains avaient soif d’eau.

Exode 7, 20-21 « les eaux qui sont dans le Fleuve se changèrent en sang. 21 Les poissons du Fleuve crevèrent et le Fleuve s’empuantit; et les Egyptiens ne purent plus boire l’eau du Fleuve; il y eut du sang dans tout le pays d’Egypte. »

La queue d’une comète répand une poussière rouge d’oxyde de fer partout : l’eau devient imbuvable.

Ensuite, deuxième plaie : les grenouilles sortent de l’eau et envahissent le pays. Etc. La septième plaie, dans les langues sémites (hébreu, araméen), pourrait être non pas une simple grêle mais une pluie de pierres provenant de la queue de la comète. Etc.

Telles sont les circonstances de la sortie d’Égypte, avec aussi des marées exceptionnelles dans la mer rouge et ses deux golfes (Exode 14).

« Et ton peuple, nous dit le livre de la Sagesse, accueillit à la fois le salut des justes et la ruine de leurs ennemis. »

L’Ancien Testament décrit une lutte du bien et du mal. « Les livres de l’Ancien Testament décrivent l’histoire du salut et la lente préparation de la venue du Christ au monde. » Et la Vierge Marie « occupe la première place parmi ces humbles et ces pauvres du Seigneur qui espèrent et reçoivent le salut de lui avec confiance. Enfin, avec elle, la fille de Sion par excellence, après la longue attente de la promesse, s’accomplissent les temps et s’instaure l’économie nouvelle, lorsque le Fils de Dieu prit d’elle la nature humaine pour libérer l’homme du péché par les mystères de sa chair. » (Lumen Gentium 55).

Dans l’Évangile, quand le vieillard Syméon reçoit Marie Joseph et l’enfant Jésus, « il les bénit et dit à Marie, sa mère : "Vois! cet enfant doit amener la chute et le relèvement d’un grand nombre en Israël; il doit être un signe en butte à la contradiction » (Lc 2, 34). « Et ton peuple, nous dit le livre de la Sagesse, accueillit à la fois le salut des justes et la ruine de leurs ennemis. »

Le jugement se réalisera de manière ultime lors du retour glorieux du Christ que l’Apocalypse décrit comme un vaste Exode, non plus de l’Égypte en Canaan, mais de Babel la grande, la cité corrompu vers la cité sainte. Il ne nous est pas demandé d’exterminer les hommes, il ne nous est pas demandé de juger le monde, il nous est demandé de prendre position, chacun, pour Dieu et contre Satan.

La génération de l’Exode, nous dit le livre de la Sagesse, avait cru en la promesse. Notre génération doit vivre de la grande promesse du retour du Christ, qui sera à la fois le jugement de l’Antichrist et de ses suppôts (2Th 2, 8), et la vivification des justes (He 9, 28).

« Ils consacrèrent d’un commun accord cette loi divine : que les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire », partager les biens et les dangers…

Partager le meilleur et le pire. Il ne s’agit pas de mimétisme. « La mimesis du désir est à la fois le ressort de ce que l’amitié offre de meilleur et de ce que la haine a de pire » (René Girard). Il ne s’agit pas de mimétisme : il s’agit de sainteté. La sainteté, c’est l’union à la volonté divine, et la volonté divine est l’unité. Plus nous sommes saints, plus nous sommes dans l’unité les uns avec les autres.

Les saints partagent, ce qui implique qu’ils se parlent… Il faut se parler pour aimer ensemble le bien, et haïr ensemble le mal, ce qui est la base de l’amitié des saints. Alors l’amitié grandit en désirant ensemble ce qui est juste et bon, et en fuyant ce qui est injuste et mauvais. Si nous sommes saints ensemble, ensemble aussi nous nous réjouissons de ce qui est beau, nous pleurons, ensemble, de ce qui est laid, nous partageons l’audace pour ce qui est noble, nous avons peur de ce qui est scandaleux, nous avons de l’espoir pour ce qui est positif, et aucun espoir en ce qui n’est que vanité.

« Dans le secret de leurs maisons, les fidèles descendants des justes offraient un sacrifice [le sacrifice de la Pâque], et ils consacrèrent d’un commun accord cette loi divine : que les saints partageraient aussi bien le meilleur que le pire ; et déjà ils entonnaient les chants de louange des Pères. »

C’est l’engagement que l’on prend lors du mariage : « pour le meilleur et pour le pire ». Pour le meilleur. L’émerveillement de l’un émerveille aussi l’autre, l’espérance de l’un est aussi l’espérance de l’autre, l’amitié est un désir commun. Dans le couple, la joie est partagée, et de la sorte, elle est doublée.

Mais c’est vrai aussi pour toute amitié chrétienne. Pour les saints, l’honneur de l’un est le bonheur de l’autre, la réussite de l’un est la couronne de l’autre, ces bonnes choses qui nous arrivent se multiplient en étant partagées.

Et pour le pire… On reste ensemble quand survient la maladie, on la traverse ensemble, on cherche ensemble le remède adapté. On reste ensemble quand un enfant va mal, on cherche ensemble les solutions, les possibilités. On reste ensemble quand survient le licenciement, on se serre la ceinture ensemble, on se soutient mutuellement, on se sourit, on s’encourage. On reste ensemble quand survient le scandale, on en parle, on pleure ensemble.

« Réjouissez-vous avec qui est dans la joie, pleurez avec qui pleure » (Rm 12, 15).

Et que Dieu vous bénisse, par Marie !

Psaume (Ps 32 (33), 1.12, 18-19,20.22)

Criez de joie pour le Seigneur, hommes justes ! Hommes droits, à vous la louange ! Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu, heureuse la nation qu’il s’est choisie pour domaine ! Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour, pour les délivrer de la mort, les garder en vie aux jours de famine. Nous attendons notre vie du Seigneur : il est pour nous un appui, un bouclier. Que ton amour, Seigneur, soit sur nous comme notre espoir est en toi !

Ce psaume fait mémoire de la grande épopée de l’Exode. Un peuple est choisi, mais dans la Bible cette élection n’est pas exclusive. Déjà au moment de la sortie d’Égypte, il est dit que de nombreux égyptiens partirent avec eux. « Les Israélites partirent de Ramsès en direction de Sukkot au nombre de près de 600.000 hommes de pied -- rien que les hommes, sans compter leur famille. Une foule mêlée monta avec eux, ainsi que du petit et du gros bétail, formant d’immenses troupeaux. » (Ex 12, 37-38). Et si les archéologues n’ont pas trouvé de traces d’une telle foule, c’est peut-être qu’il faudrait, contrairement aux habitudes, placer le passage de la mer rouge au sud du golfe d’Araba.

Faisons maintenant une lecture chrétienne de ce psaume.

Saint Pierre écrit aux premiers chrétiens : « Vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, pour proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, vous qui jadis n’étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le Peuple de Dieu, qui n’obteniez pas miséricorde et qui maintenant avez obtenu miséricorde. » (1P 2, 9-10)

Mais, dites-moi, comment crier de joie dans un monde de famine et de mort, ou quand nous sommes aux prises avec l’injustice et le scandale, quand nous sommes dans une situation angoissante qui dure des semaines, des mois et des années ? On crierait plutôt de douleur. Et pourtant, ces douleurs sont limitées, elles sont la conséquence du péché et ont une cause humaine, et tout cela, devant l’éternité divine, c’est comme un grain de sable dans l’océan. Le psalmiste a raison de dire à l’impératif : « Criez de joie pour le Seigneur, hommes justes ». En effet, les hommes justes participent de la justice divine, et donc de la vie divine, qui est éternelle, incommensurable, immense, inébranlable, inaltérable ; la joie des hommes justes appartient à la sphère divine. Mais alors deux sentiments peuvent cohabiter : la joie peut cohabiter, sans se mélanger, avec les peines de ce monde où règnent la mort et la famine. Il ne s’agit pas de s’extraire de ce monde, mais il s’agit de vivre en hommes justes dont le regard perce les cieux et dont la vie respire en Dieu. Il ne s’agit pas d’ignorer les peines de ce monde, il s’agit de vivre de la joie divine, car Dieu est le Dieu de la joie. Comme un souffle bienfaisant, il peut balayer les nuages de notre existence.

Le psaume : « Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour ». Saint Augustin : « Si tu cherches le salut, Dieu incline son amour sur ceux qui le craignent. ‘Et qui espèrent en sa miséricorde’. Qui espèrent, non dans leur propre vertu, mais dans la divine miséricorde ».

Le psaume : « pour les délivrer de la mort, les garder en vie aux jours de famine ». Saint Augustin : « Afin de les nourrir de son Verbe et de l’éternelle vérité, qu’ils avaient perdue en présumant de leurs forces, et ils ont faim de la justice ».

Le psaume : « Nous attendons notre vie du Seigneur : il est pour nous un appui, un bouclier ». Saint Augustin : « Pendant qu’elle est en cette vie, notre âme attendra patiemment le Seigneur. Car il est notre secours et notre protecteur. Il nous aide quand nous nous dirigeons vers lui ; il nous protège quand nous résistons à l’ennemi. Il nous protège quand nous résistons à l’ennemi ! »

Le psaume : « Que ton amour, Seigneur, soit sur nous comme notre espoir est en toi ! » Saint Augustin utilise la traduction : « C’est en lui que s’épanouira notre coeur ». Saint Augustin : « Ce n’est pas en nous, puisque nous n’y trouvons que misère quand Dieu n’y est point, mais en Dieu que notre coeur s’épanouira. Nous avons mis notre espoir dans ‘la sainteté de son nom’. Et si nous espérons arriver un jour à Dieu, c’est qu’il nous a fait connaître son nom par la foi, quand nous étions éloignés de lui ».

Le psaume : « Que votre miséricorde, ô Dieu, descende sur nous, selon que nous avons espéré en vous ». Saint Augustin : « Oui, Seigneur, que votre miséricorde s’épanche sur nous, car nous avons mis notre espérance en vous, et cette espérance est infaillible ».

Ce psaume attend encore un accomplissement futur.

« Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu, heureuse la nation qu’il s’est choisie pour domaine ! » (Ps 32 (33), 12). L’Apocalypse a commencé par parler des sept Églises. Elles ne réalisent pas encore la promesse de former une royauté sacerdotale (Ap 1, 6). Un tournant s’opère quand « Babel la grande » tombe : seulement alors apparaît l’expression « Mon peuple » pour parler des chrétiens : « Sortez de son sein, Mon peuple ! » (Ap 18, 4). L’Église n’était pas véritablement « peuple de Dieu » auparavant. Cette expression très politique suppose une souveraineté qui s’exerce, et une autorité qui dirige. Le danger, c’est de concevoir « l’Église » comme une organisation hiérarchique dirigeant le « peuple de Dieu », et cela aux dépens de l’évangélisation et de la préparation spirituelle de ce qui doit venir encore. Il faut d’abord la Venue glorieuse du Christ, et le jugement que Dieu réalisera (une certaine épuration du monde si l’on veut, mais qui n’est pas faite par les hommes), avant que se réalise « un Règne et des prêtres et des rois » (Ap 5, 10 ; cf. Ap 1, 6 ; 20, 6). « Bienheureux ceux qui font Ses commandements : leur autorité sera sur le bois de la Vie ! Et, par la Porte, ils entreront dans la Cité ! » (Ap 22, 14 de l’araméen).

« Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour, pour les délivrer de la mort, les garder en vie aux jours de famine. » (Ps 32, 18-19)

Ce que j’appelle le « noyau » de l’Apocalypse nous dit que la « femme » (l’Eglise en Marie) poursuivie par Satan, « reçut les deux ailes du grand aigle pour voler au désert jusqu’au refuge où, loin du Serpent, elle doit être nourrie un temps et des temps et la moitié d’un temps. » (Ap 12, 14)

 Le psaume dit : « Nous attendons notre vie du Seigneur : il est pour nous un appui, un bouclier. » (Ps 32, 20) S’il y a toujours eu des martyrs, il y a aussi toujours eu une protection divine sur les justes. Il faut en effet que se réalise le but magnifique pour lequel cet immense univers a été créé. Et c’est en vue des justes que Dieu maintient l’univers dans l’existence.

« Que ton amour, Seigneur, soit sur nous comme notre espoir est en toi ! »

Amen ! Et que Dieu vous bénisse, en Marie.

Deuxième lecture (He 11, 1-2.8-19)

Frères, la foi est une façon de posséder ce que l’on espère, un moyen de connaître des réalités qu’on ne voit pas. Et quand l’Écriture rend témoignage aux anciens, c’est à cause de leur foi.

Grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu : il partit vers un pays qu’il devait recevoir en héritage, et il partit sans savoir où il allait. Grâce à la foi, il vint séjourner en immigré dans la Terre promise, comme en terre étrangère ; il vivait sous la tente, ainsi qu’Isaac et Jacob, héritiers de la même promesse, car il attendait la ville qui aurait de vraies fondations, la ville dont Dieu lui-même est le bâtisseur et l’architecte. Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d’être à l’origine d’une descendance parce qu’elle pensait que Dieu est fidèle à ses promesses. C’est pourquoi, d’un seul homme, déjà marqué par la mort, a pu naître une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer, une multitude innombrable.

C’est dans la foi, sans avoir connu la réalisation des promesses, qu’ils sont tous morts ; mais ils l’avaient vue et saluée de loin, affirmant que, sur la terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs. Or, parler ainsi, c’est montrer clairement qu’on est à la recherche d’une patrie. S’ils avaient songé à celle qu’ils avaient quittée, ils auraient eu la possibilité d’y revenir. En fait, ils aspiraient à une patrie meilleure, celle des cieux. Aussi Dieu n’a pas honte d’être appelé leur Dieu, puisqu’il leur a préparé une ville. Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve, Abraham offrit Isaac en sacrifice. Et il offrait le fils unique, alors qu’il avait reçu les promesses et entendu cette parole : C’est par Isaac qu’une descendance portera ton nom. Il pensait en effet que Dieu est capable même de ressusciter les morts ; c’est pourquoi son fils lui fut rendu : il y a là une préfiguration. – Parole du Seigneur.

« Avec Abraham, - après la dispersion de l’humanité à la suite de la construction de la tour de Babel – commence l’histoire de la promesse. Abraham renvoie par anticipation à ce qui doit venir. Celui-ci est pèlerin non seulement du pays de ses origines vers la Terre promise, mais il est pèlerin aussi dans le fait de sortir du présent pour s’acheminer vers l’avenir. Toute sa vie renvoie en avant, elle est une dynamique de la marche sur la route de ce qui doit arriver. Avec raison donc, la lettre aux Hébreux le présente comme pèlerin de la foi fondée sur la promesse : ‘C’est qu’il attendait la ville pourvue de fondations dont Dieu est l’architecte et le constructeur’ (He 11, 10). La promesse pour Abraham se rapporte tout d’abord à son descendant, mais va au-delà : ‘Par lui se béniront toutes les nations de la terre’ (Gn 18, 18). »[1]

« Frères, la foi est une façon de posséder ce que l’on espère, un moyen de connaître des réalités qu’on ne voit pas. Et quand l’Écriture rend témoignage aux anciens, c’est à cause de leur foi. » (He 11, 1-2).

Saint Jean-Paul II parle de « l’importance particulière d’un choix fondamental qui qualifie la vie morale et qui engage radicalement la liberté devant Dieu. Il s’agit du choix de la foi, de l’obéissance de la foi Rm 16,26, par laquelle l’homme s’en remet tout entier et librement à Dieu dans un complet hommage d’intelligence et de volonté. Cette foi, opérant par la charité Ga 5,6, vient du centre de l’homme, de son cœur (Rm 10,10), et elle est appelée, à partir de là, à fructifier dans les œuvres » (Veritatis Splendor § 66).

L’Église enseigne ceci : la grâce du baptême « rend capable de croire en Dieu, d’espérer en Lui et de L’aimer par les vertus théologales » (CEC 1266), qui sont la foi, l’espérance et la charité ; « les vertus humaines s’enracinent dans les vertus théologales qui adaptent les facultés de l’homme à la participation de la nature divine (cf. 2P 1,4) » (CEC 1812).

Dire que la Foi est une vertu, cela signifie que la Foi ne se limite pas à la croyance en un contenu doctrinal. Et lorsque l’on dit que la Foi est infusée en l’homme, il s’agit de Dieu lui-même, et il est agissant, toujours agissant (Jn 15, 17). Faute d’avoir compris ceci, le grec, le latin et le français donnent : « À quoi cela sert-il, mes frères, que quelqu’un dise : ‘J’ai la foi’, s’il n’a pas les œuvres ? LA foi peut-elle le sauver ? » (Jc 2, 14), mais l’araméen, qui est la langue des apôtres, donne : « SA foi peut-elle le sauver [vivifier] ? » Sa foi, ce qu’il prétend être une foi, peut-elle le sauver [vivifier] ? Il n’y a pas de controverse sur le salut par la foi ou le salut par les œuvres comme si Paul et Jacques disaient deux choses différentes. L’apôtre Jacques donne ici une définition de la foi : « moi, je te montrerai ma Foi par mes œuvres » (Jc 2, 18), parce que par ma Foi, c’est Dieu qui est toujours agissant !

La Foi fait agir d’un agir divin. La Foi fait percevoir clairement les choses de Dieu et, en faisant des choses saintes, elle remplit l’âme d’allégresse et de joie.

En ces temps difficiles, nous sommes appelés à vivre de la foi.

Individuellement, nous attendons le Ciel et la vie éternelle. Collectivement, nous attendons aussi que la manifestation glorieuse du Christ fasse réussir le plan du Créateur et que sa volonté soit faite sur la terre comme au ciel, et nous espérons, à notre petite mesure, y contribuer.

Saint Paul dit qu’Abraham, Isaac et Jacob, « sur la terre, ils étaient des étrangers et des voyageurs. Or, parler ainsi, c’est montrer clairement qu’on est à la recherche d’une patrie. S’ils avaient songé à celle qu’ils avaient quittée, ils auraient eu la possibilité d’y revenir. En fait, ils aspiraient à une patrie meilleure, celle des cieux. Aussi Dieu n’a pas honte d’être appelé leur Dieu, puisqu’il leur a préparé une ville ». 

Cette ville est décrite à la fin du livre de l’Apocalypse, c’est la cité sainte qui n’a pas de temple « le Dieu Maître-de-tout, est son temple, ainsi que l’Agneau » (Ap 21, 22) « le trône de Dieu et de l’Agneau sera dressé dans la ville, et les serviteurs de Dieu l’adoreront » (Ap 22, 3) ; elle a douze portes fondées sur la foi des douze apôtres. Lors de la dernière Cène, Jésus a dit à ses apôtres :

« Amen, amen, / je vous [le] dis :
Qui écoute ma Parole / et croit en qui m’a envoyé,
a la vie / qui est pour toujours. » (Jn 5, 24).

Celui qui écoute Jésus et met sa foi en lui et dans le Père qui l’a envoyé, celui-là lui ressemble de plus en plus. C’est ainsi qu’Abraham offrit Isaac en sacrifice, il pensait en effet que Dieu est capable même de ressusciter les morts ; c’est pourquoi son fils lui fut rendu : il y a là une préfiguration. » Puisque Dieu est Saint, l’âme qui vit dans la foi devient sainte. Puisque Dieu est puissant, l’âme devient puissante. Puisque Dieu est sage, fort et juste, l’âme devient sage, forte et juste. Il en va ainsi pour tous les attributs de Dieu. En faisant des choses saintes, la Foi remplit l’âme d’allégresse et de joie.

Évangile (Lc 12, 32-48)

La traduction et le commentaire sont extraits de : Françoise BREYNAERT, L’évangile selon saint Luc, un collier d’oralité en pendentif en lien avec le calendrier synagogal. Imprimatur (Paris). Préface Mgr Mirkis (Irak). Parole et Silence, 2024.

Cet évangile étant long, nous allons le commenter morceau par morceau.

« 32 Ne crains pas, petit troupeau, / parce que votre Père a voulu vous donner le règne !
Vends ton avoir, / et donne l’aumône !

33 Faites-vous des bourses / qui ne s’usent pas,
et un placement / qui ne disparaît pas, dans les Cieux, 

où le voleur / n’approche pas,

ni le ver / ne décompose !

34 Là, en effet, / où est votre placement,
C’est là qu’est / aussi votre cœur !
35 Que vos reins soient ceints, / et vos lampes allumées ! »

Les reins ceints pour retrousser le manteau et faciliter la marche, les lampes allumées pour partir de nuit : Jésus annonce une nouvelle « nuit de la Pâque » (Ex 12, 11). Non plus pour sortir les Hébreux d’Égypte, mais pour sortir le monde de l’emprise de Satan. Non plus pour aller en terre de Canaan, mais pour aller vivre dans la maison du Père où les croyants travaillent (Lc 12, 36) – avant d’aller au ciel, ou dans le Royaume que Jésus instaurera sur la terre au moment de son retour… Cette perle correspond à la demande « [Notre Père] Que ta volonté soit [faite] comme au Ciel aussi sur la Terre » (Lc 11, 2).

« 36 Et soyez comparables…
à des gens qui attendent leur seigneur, / quand il retournera de la maison de la fête [banquet] !
Et lorsqu’il est revenu et a frappé, / tout de suite, on lui ouvre !

37 Bienheureux sont-ils, / ces serviteurs-là,
que leur seigneur, lorsqu’il revient, / trouve en train de veiller ! 
Amen, / je vous [le] dis :
Il ceindra ses reins / et les mettra à table,

et il passera / et les servira.
38 Et si c’est à la deuxième garde / ou à la troisième qu’il revient,
et qu’il trouve [les choses] ainsi, / bienheureux sont-ils, ces serviteurs-là ! »

Le seigneur de la parabole reviendra. Il s’agit de Jésus qui reviendra après sa mort qui a déjà été annoncée (Lc 9, 22). Il reviendra au milieu de la nuit (2e garde) ou à la fin de la nuit (3e garde) : autant dire qu’il faut veiller. Et alors, il passera et « servira [racine šmš] » ses serviteurs (Lc 12, 37), avec un verbe qui peut aussi évoquer un service liturgique, de sorte que l’on peut penser qu’il nourrira ses serviteurs de sa Sagesse divine et de son Eucharistie. Il convient d’observer que, même en ce jour où il viendra dans toute sa puissance et paraîtra dans toute la gloire de son Père, « il passera et les servira » (Lc 12, 37). Régner par la crainte ou par l’argent n’est pas régner soi-même. Jésus trouve en lui-même sa force d’attraction, par lui seul Dieu règnera, s’emparant amoureusement de notre volonté.

  • Lc 12, 39-40

« 39          Sachez donc ceci :
Si le seigneur de la maison connaissait / en quelle garde vient le voleur,

il se tiendrait éveillé / et ne laisserait pas que soit percée sa maison.

40 Vous aussi, par conséquent, / soyez prêts !
Car c’est en cette heure-là, à laquelle vous ne songez pas, / que vient le Fils de l’homme ! »

La venue du Fils de l’homme, qu’il faut comprendre sur les nuées du ciel pour juger les empires (Dn 7), est certaine. Mais il faut savoir que nul ne sait ni le jour ni l’heure, et par conséquent ne pas chercher à deviner. Jésus compare sa venue non pas à la « rapine » qui est généralement le fait des étrangers qui dérobent les biens en usant de la violence contre les personnes en plein jour, mais au « voleur », généralement le compatriote qui ne s’en prend pas aux personnes et opère à leur insu. L’image signifie que Jésus ne vient pas pour blesser, mais que le risque est grand de ne pas être prêt quand il viendra !

  • Lc 12, 41-48

« 41 Simon Pierre lui dit : / ‘Notre Seigneur !
Est-ce à notre adresse que tu dis cette parabole / ou bien aussi à l’adresse de tous les hommes ?’

42   Jésus lui dit :
‘Qui est-il donc, le majordome fidèle / et sage,

que le seigneur a établi sur son service / pour qu’il donne la provende en son temps ?

43
Bienheureux est-il, / ce serviteur !

Que vienne son seigneur / et qu’il le trouve faisant ainsi !

44
Vraiment, / je vous le dis :

Il l’établira / sur toute sa propriété !

45
Mais si ce serviteur dit en son cœur : / ‘Mon seigneur tarde à venir !’

Et qu’il commence à frapper les serviteurs / et les servantes de son seigneur,

et qu’il commence / à déguster

et à boire / et à s’enivrer,

46
le seigneur de ce serviteur viendra au jour où il n’attend pas, / et à l’heure qu’il ne connaît pas,

et il le retranchera, / et fixera sa part avec ceux qui ne sont pas fidèles !

47 Donc, le serviteur qui, connaissant la volonté de son seigneur, / n’a rien préparé selon sa volonté,
sera frappé / de nombreux coups !

48
Mais celui qui, ne [la] connaissant pas, / fait quelque chose qui mérite des coups,

sera frappé / de peu de coups.

En effet, celui à qui il a été donné beaucoup, / il lui sera réclamé beaucoup,

et de celui à qui on a confié beaucoup / on exigera davantage. »

Simon-Pierre, remarquons qu’il représente ici les Douze, se demande à juste titre comment tous les hommes pourraient se préparer à la venue du fils de l’homme, sous-entendu, ils n’ont déjà pas été aussi bien préparés que « nous ».

En parlant de la « volonté » du seigneur (Lc 12, 47), la parabole approfondit la prière « [Notre Père] Que ta volonté soit faite » (Lc 11, 2 perle 5). Le « serviteur » connaît cette volonté, et devra en répondre. « Celui » qui n’est pas serviteur de la maison ne la connaît pas, il représente « tous les hommes » dans la question de Simon Pierre, Jésus répond donc à cette question : tous les hommes sont concernés par la venue du fils de l’homme, mais s’ils ont mal agi, leur châtiment sera moins sévère que pour ceux qui étaient « de la maison ».

Il s’agit de « préparer » le retour du seigneur (Lc 12, 47) ; il s’agit d’être prêt, comme dans le collier compteur, la prophétesse Anne survint « à l’heure » même où Jésus enfant entrait dans le Temple (Lc 2, 38).

Il s’agit d’être fidèle est sage (Lc 12, 42). Fidèle [mhaymnā] signifie à la fois confiant et digne de confiance. « Sage » : il s’agit d’une sagesse inspirée par le sens de l’histoire et la perspective eschatologique du retour du Seigneur.

Et voici la récompense du serviteur fidèle et sage : le seigneur « l’établira sur toute sa propriété » avec le terme « qenyānā » qui signifie « propriété » ou « substance » (Lc 12, 44) : l’image est très forte.

Le majordome fidèle et sage, est un modèle en particulier pour Pierre qui a posé la question et à qui Jésus a « donné » et « confié » beaucoup (Lc 12, 48). Est « donné » : le don de la foi, le don du pardon, le don de l’Esprit Saint… Est « confié » : la charge d’être envoyé en mission, et plus tard pour les apôtres, sont confiées des communautés, est confié l’Évangile, sont confiés les sacrements…


[1] J. RATZINGER, BENOÎT XVI, L’enfance de Jésus, Flammarion, Paris 2012, p. 159

Date de dernière mise à jour : 03/07/2025