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1e dimanche de carême C
Podcast sur : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#
1er dimanche de Careme Lc 4,1-14 (117.19 Ko)
Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30.
Première lecture (Dt 26, 4-10)
Psaume (Ps 90 (91), 1-2, 10-11, 12-13, 14-15ab)
Deuxième lecture (Rm 10, 8-13)
Évangile (Lc 4, 1-13)
Première lecture (Dt 26, 4-10)
Moïse disait au peuple : Lorsque tu présenteras les prémices de tes récoltes, le prêtre recevra de tes mains la corbeille et la déposera devant l’autel du Seigneur ton Dieu. Tu prononceras ces paroles devant le Seigneur ton Dieu : « Mon père était un Araméen nomade, qui descendit en Égypte : il y vécut en immigré avec son petit clan. C’est là qu’il est devenu une grande nation, puissante et nombreuse. Les Égyptiens nous ont maltraités, et réduits à la pauvreté ; ils nous ont imposé un dur esclavage. Nous avons crié vers le Seigneur, le Dieu de nos pères. Il a entendu notre voix, il a vu que nous étions dans la misère, la peine et l’oppression. Le Seigneur nous a fait sortir d’Égypte à main forte et à bras étendu, par des actions terrifiantes, des signes et des prodiges. Il nous a conduits dans ce lieu et nous a donné ce pays, un pays ruisselant de lait et de miel. Et maintenant voici que j’apporte les prémices des fruits du sol que tu m’as donné, Seigneur. » – Parole du Seigneur.
- Sens historique.
À peu près dans tous les pays du monde, les religions ancestrales connaissent des rites d’offrande à la divinité : l’homme reconnaît qu’il a reçu la vie et la nourriture, et il remercie la divinité. L’expérience biblique ajoute à ces rites d’action de grâce la mémoire d’une histoire sainte. Cette lecture fait un résumé de l’histoire qui a commencé avec Abraham, un Araméen nomade, dont le petit fils Jacob descendit en Égypte à l’occasion d’une longue sécheresse. C’est alors le patriarche Joseph, devenu le plus grand notable du pharaon, qui aida son clan. Les années passèrent, les hébreux se multiplièrent, et ils sortirent d’Égypte avec Moïse, dans une épopée extraordinaire qui avait aussi un sens religieux, c’était aussi une prise de distance avec la mythologie égyptienne, ses horoscopes et ses magiciens. Dans le pays de Canaan, les Hébreux ont gardé mémoire de tout cela. Ils offrent les prémices des récoltes en remerciement pour la nourriture et la vie dont on reconnaît qu’on ne la fabrique pas, mais qu’on la reçoit. En plus, ces rites de prémices sont l’occasion de remercier pour toutes les bénédictions divines reçues depuis Abraham, Isaac, Jacob, et au temps de la sortie d’Égypte.
- De l’Ancien Testament au Nouveau.
En épousant dans son coeur humain l’amour du Père pour les hommes, Jésus "les a aimés jusqu’à la fin" (Jn 13,1) "car il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime" (Jn 15,13). A la Cène Jésus a anticipé l’offrande libre de sa vie "Ceci est mon corps donné pour vous" (Lc 22,19).
Ce sacrifice du Christ est unique, il achève et dépasse tous les sacrifices (cf. He 10,10). Il est d’abord un don de Dieu le Père lui-même : c’est le Père qui livre son Fils pour nous réconcilier avec lui (cf. 1Jn 4,10). Il est en même temps offrande du Fils de Dieu fait homme qui, librement et par amour (cf. Jn 15,13), offre sa vie (cf. Jn 10,17-18) à son Père par l’Esprit Saint (cf. He 9,14), pour réparer notre désobéissance. Jésus substitue son obéissance à notre désobéissance.
Aimer Jésus implique l’offrande effective de soi-même à sa suite (cf. Mc 8,34).
- Et nous aujourd’hui...
Dès le Sermon sur la Montagne, Jésus insiste sur la conversion du cœur : la réconciliation avec le frère avant de présenter une offrande sur l’autel (cf. Mt 5,23-24).
« Les laïcs, en vertu de leur consécration au Christ et de l’onction de l’Esprit-Saint, reçoivent la vocation admirable et les moyens qui permettent à l’Esprit de produire en eux des fruits toujours plus abondants. En effet, toutes leurs activités, leurs prières et leurs entreprises apostoliques, leur vie conjugale et familiale, leurs labeurs quotidiens, leurs détentes d’esprit et de corps, s’ils sont vécus dans l’Esprit de Dieu, et même les épreuves de la vie, pourvu qu’elles soient patiemment supportées, tout cela devient ‘offrande spirituelle, agréable à Dieu par Jésus-Christ’ (1P 2,5); et dans la célébration eucharistique, ces offrandes rejoignent l’oblation du Corps du Seigneur pour être offertes en toute piété au Père. C’est ainsi que les laïcs consacrent à Dieu le monde lui-même, rendant partout à Dieu dans la sainteté de leur vie un culte d’adoration" (LG 34 cf. LG 10). » (CEC 901)
- A la messe.
A la messe, le prêtre dit : « Voici l’offrande que nous présentons devant toi, nous, tes serviteurs, et ta famille entière : dans ta bienveillance, accepte-la. » (Missel romain, Canon Romain 88). L’Eglise bénit le Père "pour son Don ineffable" (2Co 9,15) par l’adoration, la louange et l’action de grâces.
L’Eglise ne cesse d’offrir au Père "l’offrande de ses propres dons" et de l’implorer d’envoyer l’Esprit-Saint sur celle-ci, sur elle-même, sur les fidèles et sur le monde entier, afin que par la communion à la mort et à la résurrection du Christ-Prêtre et par la puissance de l’Esprit, ces bénédictions divines portent des fruits de vie "à la louange de gloire de sa grâce" (Ep 1,6). » (CEC 1083)
« La vie des fidèles, leur louange, leur souffrance, leur prière, leur travail, sont unis à ceux du Christ et à sa totale offrande, et acquièrent ainsi une valeur nouvelle. Le sacrifice du Christ présent sur l’autel donne à toutes les générations de chrétiens la possibilité d’être unis à son offrande. » (CEC 1368)
- Avec le ciel
« A l’offrande du Christ s’unissent aussi ceux qui sont déjà dans la gloire du ciel : C’est en communion avec la très Sainte Vierge Marie et en faisant mémoire d’elle, ainsi que de tous les saints et toutes les saintes, que l’Église offre le sacrifice eucharistique. » (CEC 1370)
- L’offrande dans le mariage
« Dans le rite latin, la célébration du mariage entre deux fidèles catholiques a normalement lieu au cours de la Sainte Messe, en raison du lien de tous les sacrements avec le Mystère Pascal du Christ (cf. SC 61). Dans l’Eucharistie se réalise le mémorial de la Nouvelle Alliance, en laquelle le Christ s’est uni pour toujours à l’Église, son épouse bien-aimée pour laquelle il s’est livré (cf. LG 6). Il est donc convenable que les époux scellent leur consentement à se donner l’un à l’autre par l’offrande de leurs propres vies, en l’unissant à l’offrande du Christ pour son Église, rendue présente dans le sacrifice eucharistique, et en recevant l’Eucharistie, afin que, communiant au même Corps et au même Sang du Christ, ils "ne forment qu’un corps" dans le Christ (cf. 1Co 10,17). » (CEC 1621)
Psaume (Ps 90 (91), 1-2, 10-11, 12-13, 14-15ab)
Quand je me tiens sous l’abri du Très-Haut et repose à l’ombre du Puissant, je dis au Seigneur : « Mon refuge, mon rempart, mon Dieu, dont je suis sûr ! » Le malheur ne pourra te toucher, ni le danger, approcher de ta demeure : il donne mission à ses anges de te garder sur tous tes chemins. Ils te porteront sur leurs mains pour que ton pied ne heurte les pierres ; tu marcheras sur la vipère et le scorpion, tu écraseras le lion et le Dragon. « Puisqu’il s’attache à moi, je le délivre ; je le défends, car il connaît mon nom. Il m’appelle, et moi, je lui réponds ; je suis avec lui dans son épreuve. »
Ce psaume est souvent celui de l’office des Complies, avant d’aller dormir…
Sainte Thérèse de Lisieux écrivait à sa sœur Céline pour son anniversaire de 25 ans : « Céline, l’histoire de Cécile (la Sainte de L’Abandon) est aussi ton histoire ! Jésus a placé près de toi un ange des Cieux qui te garde toujours, il te porte entre ses mains de peur que ton pied ne heurte contre la pierre, Ps 91,11-12 tu ne le vois pas, et cependant c’est lui qui depuis 25 ans a préservé ton âme, qui lui conservé sa blancheur virginale, c’est lui qui éloigne de toi les occasions de péché...
C’est Lui qui s’est montré à toi dans un rêve mystérieux qu’il t’a envoyé dans ton enfance. Tu voyais un ange portant un flambeau et qui marchait devant notre Père chéri, sans doute il voulait te faire comprendre la mission que tu aurais plus tard à remplir, c’est toi maintenant qui es l’ange visible de celui qui bientôt ira s’unir aux anges de la cité Céleste !
Céline, ne crains pas les orages de la terre... Ton ange gardien te couvre de ses ailes et dans ton coeur repose Jésus, la pureté des vierges, tu ne vois pas tes trésors, Jésus sommeille et l’ange reste dans son mystérieux silence, cependant ils sont là avec Marie qui te cache elle aussi sous son voile !... » (Lettres 161).
« Tu marcheras sur la vipère » (Ps 91, 13) pourrait signifier vaincre le vice de l’envie, chez soi ou chez les autres. Sainte Hildegarde fait parler la vertu de Charité, en réponse au vice de l’envie. « O abjecte âcreté, tu es comme une vipère qui se mord elle-même. Tu ne peux supporter ce qui perdure dans la gloire. Tu es comme une idole dirigée contre Dieu et qui tue le peuple par son impiété. Tu te nommes à juste titre la géhenne qui oppose ses excès à la juste modération, qui veut détruire tout ce qui s’oriente vers la sagesse, et qui refuse toute oeuvre lumineuse. Mais moi je suis l’air dont se nourrit toute la verte vigueur (viriditas), et qui fait s’épanouir les fleurs et les fruits mûrs. En effet, j’ai été instruite par l’inspiration de l’Esprit Saint, si bien que je fais couler les rivières limpides, c’est-à-dire les larmes causées par les saints désirs ; et ces larmes me font exhaler le délicieux parfum des oeuvres très saintes. JE suis aussi la pluie qui s’élève de la rosée et qui donne une joyeuse vie à toutes les plantes, qui alors me sourient. » (www.ecolesaintehildegarde.com).
« Tu marcheras sur le scorpion » (Ps 91, 13) pourrait signifier que tu domineras ta propre colère et tu ne souffriras pas de la colère des autres. Sainte Hildegarde dit que la colère s’exprime en ces termes « J’écrase et détruis quiconque me blesse… pourquoi endurer des blessures? Si tu aimes la sérénité, ne m’approche pas. Quiconque voudra me faire du mal, je le frapperai de mon épée et le mettrai en pièces avec ma massue. » Sainte Hildegarde la représente avec un homme dont « la bouche est comme un scorpion car le péché est comme un assassin qui surgit et tue au moyen du poison ». La colère est vaincue par la patience qui déclare : « Je suis consciente du mal et le maîtrise par mon attitude de bienveillante tranquillité. Je n’écrase personne, je fais en sorte de vivre en harmonie avec tous. Personne ne me déteste. Et je détruirai la tour que tu dresses, parce que je demeure pour toujours, tandis que toi tu périras. » (LMV,p. 14) « La victoire m’appartient depuis l’origine des temps de par l’invincible Fils de Dieu. Il est venu de Dieu pour sauver l’humanité, puis il est retourné à Dieu. Il est mort sur la croix dans d’atroces souffrances, mais Il est ressuscité et monté au Ciel. Me remémorant ce fait, je ne fuis pas les misères et les souffrances de cette vie.» (Scivias, III, 3).
Ensuite, le lion est une image du diable comme il est écrit : « Ne savez-vous point que le diable, votre adversaire, rôde autour de vous comme un lion qui cherche sa proie » (1P 5,8). Le dragon de même (Ap 12, 5).
« Puisqu’il s’attache à moi, je le délivre ; je le défends, car il connaît mon nom. Il m’appelle, et moi, je lui réponds ; je suis avec lui dans son épreuve. » (Ps 90, 14-15). Ne crains donc pas quand tu es affligé, comme si Dieu n’était point avec toi. Que la foi soit avec toi, et Dieu sera avec toi dans l’affliction, tu verras le salut, le Christ lui-même.
Chers auditeurs, nous entendrons cependant dans l’évangile que Satan utilise ce psaume d’une manière perfide parce qu’il veut que Jésus joue avec l’extraordinaire et les puissances angéliques :
« 9 Et il le fit venir à Jérusalem,
et il le fit tenir debout sur l’aile du Temple, / et lui dit :
‘Si tu es le Fils de Dieu, / jette-toi d’ici en bas ;
car il est écrit :
10 À ses anges, il donnera des ordres à ton sujet, / afin qu’ils te gardent ;
11 et : Sur leurs bras, ils te porteront / de peur que ton pied ne heurte contre une pierre’.
12 Jésus répondit / et lui dit :
‘Il est dit : / Tu ne tenteras point le SEIGNEUR, ton Dieu’. » (Lc 4, 9-12)
Satan est perfide car, s’il est écrit : « Il donnera pour lui des ordres à ses anges » (Ps 90, 11-12), aucune Écriture ne dit : « Jette-toi en bas », mais c’est de son fond menteur qu’il tire cette suggestion.
Jésus n’oppose pas une Écriture à une autre, mais il sait que la parole du psaume doit être interprétée à la lumière d’un thème biblique plus fondamental : « Tu ne tenteras point le SEIGNEUR, ton Dieu » (Dt 6, 16). De la sorte, Jésus est victorieux de la tentation. Saint Augustin commente cette victoire :
« Le Seigneur Jésus-Christ, au désert, était tenté par le diable. Parfaitement ! Le Christ était tenté par le diable ; dans le Christ, c’est toi qui étais tenté, parce que le Christ tenait de toi sa chair, pour te donner le salut ; il tenait de toi sa mort, pour te donner la vie ; il tenait de toi les outrages, pour te donner les honneurs ; donc il tenait de toi la tentation, pour te donner la victoire.
Si c’est en lui que nous sommes tentés, c’est en lui que nous dominons le diable. Tu remarques que le Christ a été tenté, et tu ne remarques pas qu’il a vaincu ? Reconnais que c’est toi qui es tenté en lui ; et alors reconnais que c’est toi qui es vainqueur en lui. Il pouvait écarter de lui le diable ; mais, s’il n’avait pas été tenté, il ne t’aurait pas enseigné, à toi qui dois être soumis à la tentation, comment on remporte la victoire. » (Saint Augustin, Homélie sur le psaume 60 (traduction AELF)
Deuxième lecture (Rm 10, 8-13)
Frères, que dit l’Écriture ? Tout près de toi est la Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur. Cette Parole, c’est le message de la foi que nous proclamons. En effet, si de ta bouche, tu affirmes que Jésus est Seigneur, si, dans ton cœur, tu crois que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, alors tu seras sauvé. Car c’est avec le cœur que l’on croit pour devenir juste, c’est avec la bouche que l’on affirme sa foi pour parvenir au salut. En effet, l’Écriture dit : Quiconque met en lui sa foi ne connaîtra pas la honte. Ainsi, entre les Juifs et les païens, il n’y a pas de différence : tous ont le même Seigneur, généreux envers tous ceux qui l’invoquent. En effet, quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. – Parole du Seigneur.
Le nom de Jésus est au coeur de la prière chrétienne. Toutes les oraisons liturgiques se concluent par la formule « par Jésus-Christ notre Seigneur ». Le "Je vous salue, Marie" culmine dans "et Jésus, le fruit de tes entrailles, est béni". La prière du coeur orientale appelée "prière à Jésus" dit : "Jésus Christ, Fils de Dieu, Seigneur prend pitié de moi pécheur". De nombreux chrétiens meurent en ayant, comme Ste. Jeanne d’Arc, le seul mot de "Jésus" aux lèvres. La formule prononcée avec la bouche est progressivement acceptée par l’intellect puis descend dans le coeur et crée un coeur intelligent, unifiant l’homme intérieur et le rendant intègre.
Je crois en Lui dans mon coeur et je Le confesse de ma bouche, et je tends à Lui de toute l’ardeur et de toute la force de mon âme.
« Tout près de toi est la Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur. » Saint Paul cite ici le livre du Deutéronome : « Cette loi que je te prescris aujourd’hui n’est pas au-delà de tes moyens ni hors de ton atteinte. Elle n’est pas dans les cieux, qu’il te faille dire : "Qui montera pour nous aux cieux nous la chercher, que nous l’entendions pour la mettre en pratique ?" Elle n’est pas au-delà des mers, qu’il te faille dire : "Qui ira pour nous au-delà des mers nous la chercher, que nous l’entendions pour la mettre en pratique ?" Car la parole est tout près de toi, elle est dans ta bouche et dans ton coeur pour que tu la mettes en pratique " » (Dt 30,11-14).
- On ne peut pas affirmer des choses avec la bouche sans les croire dans son cœur, ce serait un ritualisme creux. Avant de proclamer la Parole, il faut l’entendre, l’écouter et la faire résonner en nous : « C’est du trop-plein du coeur que la bouche parle » (Mt 12,34).
- On ne peut pas croire dans le cœur sans affirmer par la bouche que Jésus est Seigneur, sinon ce serait réduire la foi à une affaire privée et subjective, et ce ne serait plus la foi chrétienne. La parole du Christ appelle une réponse, une mise en pratique et une confession de foi. Saint Paul affirme qu’avec le coeur, on croit, et avec la bouche on fait profession de foi (cf. Rm 10,10). La foi naît d’une écoute et elle est destinée à devenir un témoignage. Saint Paul dit à Timothée : « Combats le bon combat de la foi, conquiers la vie éternelle à laquelle tu as été appelé et en vue de laquelle tu as fait ta belle profession de foi en présence de nombreux témoins. » (1Tm 6, 12)
- Dans le cœur, la contrition, sur les lèvres, la confession des péchés.
« Non, non, ô homme, tu n’as pas besoin de passer les mers, de t’élever dans les nues, de gravir les montagnes, et la route qui t’est montrée n’est pas longue à parcourir, tu n’as qu’à rentrer en toi-même pour aller au-devant de ton Dieu ; en effet sa parole est dans ta bouche et dans ton coeur. Va donc au moins au-devant de lui jusqu’à la componction du coeur et à la confession de la bouche, si tu veux sortir du fumier sur lequel ta malheureuse âme est étendue » (Saint Bernard sermons du temps 1, 57). La Parole « se trouve dans le coeur du pécheur où elle opère une salutaire contrition, et elle se trouve aussi dans sa bouche, où elle impose silence à la mauvaise honte qui l’empêcherait de faire une confession nécessaire ». (Bernard aux Templiers XII, 30)
Ce passage de saint Paul se prolonge ainsi : « 13 En effet, quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. 14 Mais comment l’invoquer sans d’abord croire en lui ? Et comment croire sans d’abord l’entendre ? Et comment entendre sans prédicateur ? » (Rm 10, 13-14), il n’est pas possible de suggérer l’existence de « chrétiens anonymes », chrétiens sans le savoir comme l’a fait K. RAHNER. Il est encore moins possible de dire que la rédemption du Christ est reçue sans annonce du Christ. Ce que l’on a voulu éviter, en parlant de chrétiens anonymes, c’est l’idée que les non-chrétiens soient damnés (par quel « Dieu d’amour » ?). Mais en réalité, les apôtres n’enseignaient pas que les non-chrétiens étaient obligatoirement damnés puisqu’il enseignaient que Jésus mort et ressuscité annonce la bonne nouvelle à ceux qui sont morts (Jn 5, 25-27 ; 1P 4, 6). De cette manière, tous les hommes ont la possibilité d’être sauvés et de venir à la lumière. La rencontre avec Jésus à l’heure de la mort ne déresponsabilise personne pendant la vie sur la terre, car si nos œuvres sont mauvaises, à l’heure de la mort nous fuirons Jésus et son salut (Jn 3, 20) ! Le témoignage des Écritures est unanime. Les premiers Pères de l’Église (Saint CLÉMENT D’ALEXANDRIE, HERMAS, saint HILAIRE DE POITIERS etc.) enseignaient la rencontre du Christ avec les défunts, ils commentaient les textes du Nouveau Testament qui évoquent la prédication du Christ aux morts (Jn 5, 25-27 ; 1P 4, 6). C’est seulement en Occident et depuis saint AUGUSTIN (354-430), que la doctrine chrétienne de la prédication du Christ aux défunts (Jn 5, 25) a été mise entre parenthèse. En 1992, l’Église avait publié le catéchisme de l’Église catholique qui rend aux mémoires l’enseignement sur la prédication aux morts (CEC 634-635). La rencontre avec le Christ à l’heure de la mort est une grâce ultime, même pour le non-chrétien s’il écoute dans son cœur ce que l’on appelle la loi naturelle.
En même temps que nous revenons à l’idée de la prédication du Christ aux défunts, il a donc été nécessaire de revenir à l’idée de loi naturelle, ce que le magistère a fait aussi, et à peu près à la même époque, notamment avec JEAN-PAUL II et son encyclique Veritatis splendor, 1993, puis en 2009, avec le document de la COMMISSION THÉOLOGIQUE INTERNATIONALE, A la recherche d’une éthique universelle : Nouveau regard sur la loi naturelle, 20 mai 2009. Nous pouvons alors de nouveau affirmer que le Christ est l’unique Rédempteur, sans pour autant condamner d’avance la plus grande partie de l’humanité. C’est ce qu’a pu faire la CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, dans la Déclaration Dominus Iesus, le 6 août 2000.
Ainsi, chers auditeurs, dans votre cœur, croyez, et de votre bouche, affirmez votre foi par des chants de louange et par des témoignages (et des enseignements si vous le pouvez) !
Évangile (Lc 4, 1-13)
La traduction depuis l’araméen et le commentaire sont extraits de : Françoise Breynaert, L’évangile selon saint Luc, un collier d’oralité en pendentif en lien avec le calendrier synagogal. Imprimatur. Préface Mgr Mirkis (Irak). Parole et Silence, 2024. La traduction sur la Pshitta (le texte liturgique des églises de langue araméenne ou syriaque) est faite pour la récitation, avec une reprise de souffle, avec un léger balancement, comme si nous marchions.
« 1 Or Jésus, étant rempli de l’Esprit Saint, / s’en retourna du Jourdain
et l’Esprit le conduisit / au désert,
2 quarante / jours,
pour y être tenté / par l’Accusateur.
Il ne mangea rien durant ces jours-là, / et, quand il les eut accomplis
à la fin, / il eut faim.
3 Et l’Accusateur lui dit :
Si tu es le Fils de Dieu, / dis à cette pierre qu’elle devienne du pain.
4 Jésus répondit / et lui dit :
‘Il est écrit :
‘Ce n’est pas de pain seulement, / que vit l’homme ;
mais de toute répartie / de Dieu’.
5 Et Satan le fit monter / sur une haute montagne
et lui montra tous les royaumes de la terre, / en un court instant.
6 Et l’Accusateur lui dit :
‘Je te donnerai tout ce pouvoir et sa gloire / qui m’a été livrée
et, à qui je veux, / je lui en fais le don ;
7 si donc / tu te prosternes devant moi,
c’est à toi / que sera tout cela.
8 Jésus répondit / et lui dit :
‘Il est écrit :
Le SEIGNEUR ton Dieu tu adoreras, / et à lui seul tu rendras un culte’.
9 Et il le fit venir à Jérusalem,
Et il le fit tenir debout sur l’aile du Temple, / et lui dit :
‘Si tu es le Fils de Dieu, / jette-toi d’ici en bas ;
car il est écrit :
10 À ses anges, il donnera des ordres à ton sujet, / afin qu’ils te gardent ;
11 et : Sur leurs bras, ils te porteront / de peur que ton pied ne heurte contre une pierre’.
12 Jésus répondit / et lui dit :
‘Il est dit : / Tu ne tenteras point le SEIGNEUR, ton Dieu’.
13 L’Accusateur, ayant achevé toutes ses tentations, / s’éloigna de lui jusqu’à un moment [favorable].
[14 Jésus, dans la puissance de l’Esprit, / retourna en Galilée,
et sa renommée se répandit / dans tout le pays d’alentour.
15 Et lui, / il enseignait dans leurs synagogues ;
Et il était glorifié / de la part de tous.] »
Satan reviendra à l’heure de la Passion. Au désert, l’Accusateur disait à Jésus : « Si tu es le Fils de Dieu… » (Lc 4, 3.9). Au calvaire, les accusateurs de Jésus disent « S’il est le Messie, qu’il se sauve », « si tu es le roi des Juifs, sauve-toi », « si c’est toi le Messie, délivre-toi » (Lc 23, 35.37.39) : à travers eux, Satan réitère ses trois tentations. Or seul un faux prophète se sert des signes dans son propre intérêt, et seuls les hypocrites sont tentés de réclamer un tel miracle : Jésus ne se sauve pas lui-même.
- Première tentation (Lc 4, 3-4)
Le jeûne extrême et la faim exposent Jésus à la tentation de changer les pierres en pain. Le prophète de la fin des temps doit être comme Moïse (Dt 15, 18), ne faudrait-il donc pas que Jésus fasse le miracle de la manne ? Le miracle de la manne fut une concession au peuple qui murmurait (Ex 16, 2-4). Contrairement au peuple au Sinaï, Jésus ne regrette pas le pain d’Égypte, il se comporte en israélite obéissant. Plus encore, il accomplit l’ordre de se souvenir « de tout le chemin que YHWH ton Dieu t’a fait faire pendant 40 ans dans le désert […] pour te montrer que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais que l’homme vit de tout ce qui sort de la bouche de YHWH (le Seigneur) » (Dt 8, 2-3) et Jésus cite la fin de la phrase (Lc 4, 4). Jésus fera des miracles, mais il le fera pour les autres, non pour lui-même. Sa relation au Père est plus importante que le Pain.
- Deuxième tentation (Lc 4, 5-8)
Jésus vient d’affirmer la primauté de sa relation au Père, mais Satan lui propose aussitôt une autre alliance, pervertie. Espère-t-il que Jésus va vivre une double relation ? La seconde tentation consiste à exercer une emprise sur le monde par les moyens de Satan, en se prosternant devant lui.
Satan élève Jésus en le faisant monter [slq] sur une haute montagne (Lc 4, 5) ; à la fin de l’évangile, Jésus s’éleva [slq] au ciel (Lc 24, 51) ; l’utilisation du même verbe suggère que Jésus rejette une parodie de l’Ascension qui serait une contrefaçon de la manière divine d’exercer la seigneurie.
L’Ancien Testament exprime souvent que Dieu est la source de toute autorité politique (Pr 21, 1 ; Pr 8, 15-16), et Jésus respecte cet enseignement quand il demande de payer l’impôt (Lc 20, 20-26). Après lui, l’apôtre Paul dit dans le même sens : « il n’y a point d’autorité qui ne vienne de Dieu » (Rm 13, 1). Cela ne signifie pas que tous les rois sont justes ou saints ; saint Irénée observe avec finesse que certains rois sont donnés pour le profit de leurs sujets, d’autres pour le châtiment, et d’autres pour la moquerie, selon que leurs sujets le méritent (S. IRÉNÉE, Contre les Hérésies V, 24, 2) Le péché d’Adam a cependant autorisé une emprise de Satan sur le monde, désormais « Prince de ce monde » (Jn 12, 31). Lorsque l’Accusateur dit à Jésus « Je te donnerai tout ce pouvoir » (Lc 4, 6), il cherche à séduire les hommes pour qu’ils l’adorent lui-même comme Dieu. Mais Jésus démasque son apostasie en répondant : « Le SEIGNEUR ton Dieu tu adoreras, et à lui seul tu rendras un culte » (Lc 4, 8). Jésus répond en citant l’Écriture : « tu te prosterneras devant le SEIGNEUR ton Dieu » (Dt 26, 10), et l’interdit de se prosterner devant d’autres divinités (Dt 5, 9) ou de suivre de faux dieux (Dt 6, 12) souvent présentés comme des démons (Ba 4, 7).
La vie de Jésus est un service de Dieu, sans aucune visée démoniaque de toute puissance personnelle.
Juste avant le récit des tentations, saint Luc donne la généalogie du Christ. Cette généalogie évoque la vocation royale de Jésus puisqu’elle l’unit au roi David, elle évoque aussi la vocation universelle de Jésus en l’unissant à Abraham à qui il fut dit « par ta postérité se béniront toutes les nations de la terre » (Gn 22, 18). Comme au début de l’évangile, le mode virginal de la conception de Jésus indique que cette royauté et cette universalité s’accompliront par les moyens de Dieu, seul adoré.
- Troisième tentation (Lc 4, 9-12)
Nous avons parlé de l’aile du Temple au verset 5, « kenpā dhayklā » pourrait être traduit par la bordure, ou le pinacle (en architecture le merlon) du Temple, mais nous voulons souligner que cette expression reprend la prophétie des 70 semaines dans le livre de Daniel, qui annonce « un Messie supprimé… et sur l’aile du Temple [kenpā dhayklā] l’abomination de la désolation » (Dn 9, 26-27). Ce qui permettra par la suite de relier le récit des tentations du Christ au récit de la Passion.
Satan veut que Jésus joue avec l’extraordinaire et les puissances angéliques. Il est perfide car, s’il est écrit : « Il donnera pour lui des ordres à ses anges » (Ps 90, 11-12), aucune Écriture ne dit : « Jette-toi en bas », mais c’est de son fond menteur que Satan tire cette suggestion. Jésus sait que la parole du psaume doit être interprétée à la lumière d’un thème biblique plus fondamental : « Tu ne tenteras point le SEIGNEUR, ton Dieu » (Dt 6, 16).
À la différence de saint Matthieu, saint Luc achève avec la tentation du prodige au Temple et la volonté de ne pas tenter Dieu, ce qui fait écho à l’épisode où, dans le Temple, Zacharie tente Dieu en demandant une confirmation (Lc 1, 5-25).
Jésus est pleinement Fils, tout entier dépendant du Père, et, étant pleinement Fils, il est le Messie.
- Lc 4, 13-15 : Épilogue
Le récit des tentations de Jésus a commencé avec la mention « Jésus, étant rempli de l’Esprit Saint, s’en retourna du Jourdain » (Lc 4, 1). Puis, après avoir vaincu les tentations, Jésus est dans « la force (la puissance) de l’Esprit » (Lc 4, 14). Il va commencer sa vie publique et ses miracles.
Date de dernière mise à jour : 15/01/2025