Apparitions de Zeitun (Egypte 1968)

Introduction 

La piété mariale en Egypte remonte aux premiers siècles. On a retrouvé en 1917, près d’Alexandrie (près du Caire) un papyrus qui contenait cette prière en langue grecque -- (la critique accepte comme date de composition les dernières décennies du 3e siècle (c'est à dire vers 280) -- dont la traduction est :
« Sous ta miséricorde, nous nous réfugions, mère de Dieu.
Ne repousse pas nos prières dans la nécessité,
mais du danger, libère-nous :
toi seule chaste, toi seule bénie. »

L’Egypte chrétienne se considère comme une Terre Sainte parce que la sainte Famille y a séjourné. En effet :

Après la naissance de Jésus et l’adoration des étrangers venus des nations, le roi Hérode manifeste sa haine envers Jésus dont il craint la royauté. Il organise brutalement un massacre d’enfants (Mt 2, 16). Joseph a protégé « l’enfant et sa mère » par la fuite en Egypte. Mais cela ne supprime pas la perception douloureuse de l’opposition à Jésus et au règne de Dieu que Jésus apporte. 

Saint Matthieu cite Jérémie 31,15 : « A Rama, une voix se fait entendre, une plainte amère ; c’est Rachel qui pleure ses fils. Elle ne veut pas être consolée pour ses fils, car ils ne sont plus. » (Mt 2,18). Le tombeau de Rachel est à Bethléem, à l’Est de Jérusalem, sur la route de l’exil. Ainsi Rachel avait « vu » partir les exilés du temps de Jérémie. Ici, le tombeau de Rachel « voit » le massacre des enfants contemporains de Jésus. Rachel « ne veut pas être consolée » par des compensations humaines. Dieu seul pourra la guérir. Et sans doute en est-il aussi de Marie : elle ne veut pas être consolée par des compensations faciles. Le déferlement du mal attend une Rédemption sérieuse, qui sera la Passion et la Résurrection de Jésus.

1920-1924 : Après un songe, un homme construit une église...

1920 est l’année du Démembrement de l’empire ottoman au profit du Royaume-Uni (Irak, Palestine et Transjordanie) et de la France (Syrie, Liban, Cilicie).

En 1920, un propriétaire copte aisé, Tawfiq Khalil Bey, se proposait de construire un immeuble sur un terrain qu’il possédait à Zeitoun, quartier populaire de la banlieue du Caire. La Vierge lui apparut en rêve et lui promit que s’il construisait une église à la place du bâtiment projeté, elle honorerait le lieu d’une manière singulière. L’église fut bâtie en 1924 par l’architecte italien Leomingelli au carrefour de la rue Khalil avec la principale artère de cette banlieue du Caire, la rue Touman-Bey. L’Eglise est surmontée d’un dôme central et de quatre dômes plus petits. Elle fut dédiée à la Sainte Famille.

1968 : les apparitions

Les apparitions ont lieu moins d’un an après la guerre des Six Jours qui s'était déroulée du lundi 5 au samedi 10 juin 1967 et qui opposa Israël à l'Égypte, la Jordanie, la Syrie et le Liban. En moins d'une semaine, l'État hébreu tripla son emprise territoriale : l'Égypte perdit la bande de Gaza et la péninsule du Sinaï, la Syrie fut amputée du plateau du Golan et la Jordanie de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est. Si Israël s'est depuis retiré de certains territoires annexés, le Sinaï et la bande de Gaza, d'autres ont été annexés : le plateau du Golan et Jérusalem-Est — un acte non reconnu par la communauté internationale — et une partie de la Cisjordanie est toujours occupée.

La nuit du mardi 2 avril 1968, à vingt-deux heures trente, des mécaniciens et des chauffeurs musulmans des transports publics arrivant à leur garage, juste en face de l’église, furent attirés par une rumeur de la foule, dense, à ce moment, dans la rue. Ils aperçurent tout à coup une dame près de la croix au sommet du dôme.

Ils la virent avec tellement de netteté qu’ils ne doutèrent pas un instant qu’elle fut vivante et crurent tout bonnement être en présence d’une religieuse. Il lui crièrent de faire attention !

Elle revint le 9 avril. « Elle se déplaçait d’un côté à l’autre afin que tous aient la chance de la voir en face. Elle se penchait, s’inclinait pour saluer la foule. Son déplacement n’était pas celui d’une marche mais plutôt d’un déplacement dans l’air. Son visage, souvent souriant, d’autres fois plus grave et comme attristé, était toujours bienveillant.

 Les apparitions continuèrent pendant 14 mois... AU début, c’était au début de la nuit. A la fin, c’était à la fin de la nuit, et elle partait avec l’aube. Elle partait progressivement dans le ciel. Elle traitait avec la foule, avec sa tête, avec ses gestes, avec sa main, continuellement. Quand elle partait, elle partait avec un geste d’adieu, d’au-revoir.

Plusieurs fois elle est apparue avec un rameau d’olivier, signe très clair de l’appel à la Paix dans cette région du monde tellement bouleversée.

Plusieurs fois, elle s’inclina profondément devant la croix qui dominait l’Eglise.

 Les apparitions étaient précédées de phénomènes lumineux décrits par les témoins comme des "pluies de diamants". Puis surgissaient des "colombes de lumière" qui parfois s'alignaient en forme de croix. Parfois, d’abondants nuages de couleur ocre répandaient autour d’elle "une odeur d’encens". Après ces signes précurseurs, notre Dame apparaissait.

Son éclat, semblable à celui du soleil, était tel qu’on avait peine à discerner les détails de son apparence. Parfois elle se penchait vers la foule en souriant et en bénissant avec un rameau d'olivier. Parfois à genoux devant la croix qui est sur la coupole. Occasionnellement, la Vierge fut aperçue tenant l’Enfant Jésus dans ses bras, ou encore en compagnie de saint Joseph et de Jésus, âgé d’environ douze ans. Certaines fois, elle portait une couronne, d’autre fois, non.

Une grande affluence 

Pendant plusieurs semaines, la foule présente atteignit jusqu’à 250 000 personnes, créant d’impressionnants embouteillages. Les musulmans en grand nombre, récitant des versets du Coran, y côtoyaient les chrétiens chantant des hymnes coptes. La foule montait sur les toits et les terrasses et se pressait dans la rue. Des femmes et des enfants restaient debout toute la nuit, manifestant une incroyable résistance physique.

Des guérisons

Le 3 avril 1968, Farouk Mohammed Atwa se rendit à l’hôpital pour les soins que requérait l’un de ses doigts, amputé en raison d’une gangrène ; à la grande surprise du chirurgien, il était complètement guéri.

Le 13 avril, le photographe Wagih Rizk témoigne :

« La première fois que je vis l’apparition, la mandorle de lumière de la Vierge avait un tel éclat que j’en fus aveuglé. J’étais comme électrifié, incapable de faire quoi que ce fût. Les deux soirs suivants, il en fut de même. Mais, le 13 avril, alors que l’apparition se mouvait depuis une dizaine de minutes au-dessus de l’église, je trouvai enfin la force de prendre des photos à deux reprises. Ce fut une expérience terriblement impressionnante. J’avais le sentiment que la terre allait s’évanouir sous mes pieds. Après avoir pris ces clichés, je me rendis compte qu’une sale blessure que je traînais au bras depuis plusieurs années, séquelle d’un accident de voiture, avait complètement disparu. »

Reconnaissance

Cyrille VI, patriarche copte orthodoxe d’Alexandrie, institua une commission d’enquête composée d’évêques et de prêtres, qui authentifièrent les témoignages recueillis et eurent eux-mêmes l’occasion de voir l’apparition.

Le patriarche fit alors une déclaration officielle publiée le 5 mai 1968 dans les principaux organes de presse égyptiens, mais aussi dans la presse étrangère (The Times, Le Figaro, The New York Times, etc.), décrivant les principaux phénomènes et concluant :

« Le Siège patriarcal déclare avec une foi complète, une grande joie et une humble gratitude envers le Tout-Puissant, que la Bienheureuse Vierge Marie est apparue à plusieurs reprises sous des formes claires et stables, durant plusieurs nuits et durant des périodes variées, pouvant aller jusqu’à plus de deux heures, depuis le 2 avril 1968 jusqu’à maintenant, au-dessus de l’église copte orthodoxe de Zeitoun, au Caire, sur la route de Matarieh, où la Sainte Famille passa durant son séjour en Egypte, tel que le rapporte la tradition. Nous espérons que cette bénédiction sera un signe de paix pour le monde et un présage de prospérité pour notre pays bien-aimé et béni. »

A peu près dans le même temps, le cardinal Stephanos Ier Sidarous, patriarche de l’Eglise copte catholique en union avec Rome, s’associa à cette reconnaissance officielle :

« Il n’y a pas de doute à avoir sur la réalité de ces apparitions, qui ont été confirmées par de nombreux fidèles coptes catholiques dignes de foi et connus pour leur extrême intégrité. Ils ont été témoins des apparitions de la Bienheureuse Vierge Marie et m’en ont donné des descriptions très complètes. Sœur Paula de Mofalo, une religieuse romaine catholique bien connue pour sa rectitude et son bon sens, m’a assuré de l’authenticité des apparitions de Zeitoun. Elle était toute tremblante, lorsqu’elle me rapporta ne pas avoir été la seule à l’observer, mais que des milliers de personnes avaient vu Notre-Dame en même temps qu’elle » (Watanî, 5 mai 1968).

Le pape Paul VI aurait également envoyé sur place deux observateurs (selon Al-Ahram, 6 mai 1968), et le prononce catholique, Mgr Lino Zanini, déclara que le Saint-Siège respectait en la matière l’autorité de l’Eglise locale et s’en remettait à son jugement.

Le chef de l’Eglise évangélique et président du Synode de toutes les Eglises protestantes d’Egypte, le révérend docteur Ibrahim Saïd, se prononça lui aussi en faveur de l’authenticité des apparitions de Zeitoun, tout comme différentes personnalités des Eglises grecque-catholique et grecque-orthodoxe, et plusieurs hautes personnalités de l’Etat firent de même dont le ministre de l’Information, le docteur Hafez Ghanem, qui ajouta que toute possibilité de fraude avait été écartée à la suite d’enquêtes scrupuleuses.

Fête : 2 avril

Par décision du patriarche Cyrille VI en 1969, l’Eglise copte orthodoxe a inséré dans son calendrier liturgique une fête de la Transfiguration de la Vierge Marie à Zeitoun, célébrée chaque année le 24 barmahat (2 avril).

Nouvelle Eglise en l'honneur de la "Vierge de la lumière"

Une nouvelle église a été édifiée par le patriarche Shenouda III ; elle accueille pour la liturgie, chaque vendredi et chaque samedi, jusqu’à 4 000 fidèles. Le père Boutros Gayed, frère du patriarche et défunt curé de la paroisse, a relaté de nombreuses guérisons et des miracles obtenus par l’intercession de la « Vierge de Lumière » de Zeitoun depuis 1972.

Les guérisons continuent

D’innombrables personnes affirmèrent avoir été guéries pendant les apparitions ou peu après en avoir été témoins. Un comité médical mis en place par l’Eglise copte orthodoxe et présidé par le professeur Shafi Abd-el-Malek, de la faculté de médecine de l’université du Caire, fut chargé de les enregistrer et de les vérifier.

Parmi les cas les plus spectaculaires, on peut citer Sami Abd-el-Malek, quarante ans, guéri d’un cancer de la vessie en phase terminale ; Fathma Zahi Reda, une musulmane pieuse, atteinte d’une affection incurable de la glande thyroïde ; une autre musulmane, Madiha Mohammed Saïd, vingt ans, guérie de troubles nerveux ayant entraîné la cécité et l’aphasie ; William Nashed Zaki, médecin réputé de Shoubra, guéri d’une hernie qui perdurait depuis trois ans ; madame Mahmoud Shoukry Ibrahim, quarante-cinq ans, guéri d’une paralysie totale des membres inférieurs.

Conclusion

En s’abstenant de tout message explicite, la Vierge a voulu délivrer un signe accessible à tous les Egyptiens, musulmans et chrétiens, orthodoxes, catholiques ou protestants, croyants et non-croyants.  

Beaucoup y ont vu aussi un encouragement à la paix (Zeitoun signifie en arabe « olives », et l’olivier, dont un rameau fut tenu par la Vierge lors de certaines apparitions, est un symbole de paix), après la terrible guerre des Six Jours (1967) qui avait endeuillé le Proche-Orient et engendré une terrible humiliation dans le monde arabe ; à la suite de la prise de Jérusalem par les Israéliens, il devenait notamment impossible aux coptes d’aller en pèlerinage aux Lieux saints. 

C’est notamment cette dernière interprétation à laquelle fait écho Jehan Sadate, la veuve du président assassiné, dans sa biographie intitulée Une femme d’Egypte : « Peuple d’Egypte, je sais que tu ne pourras plus venir me voir à Jérusalem ; aussi est-ce moi qui suis venue te voir au Caire. »


Un dossier étoffé (coupures de presse, déclarations officielles, témoignages, photographies) est accessible sur le site web des apparitions de Zeitoun : www.zeitun-eg.org

Synthèse Françoise Breynaert


Hymne (CFC)

Voici l'aurore avant le jour,
Voici la mère virginale,
La femme promise au début des âges,
Elle a bâti sa demeure
Dans les vouloirs du Père.

Aucune peur, aucun refus,
Ne vient troubler l'œuvre de grâce,
Son cœur est rempli d'ineffable attente,
Elle offre à Dieu le silence
Où la Parole habite.

Sous le regard qui lui répond,
Les temps nouveaux tressaillent en elle,
L'avent mystérieux du Royaume à naître.
L'Esprit la prend sous son ombre
Et doucement la garde.

Voici l'épouse inépousée,
Marie, servante et souveraine,
Qui porte en secret le salut du monde,
Le sang du Christ la rachète
Mais elle en est la source.

Date de dernière mise à jour : 13/01/2020