Fête de la sainte Famille - B

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Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.

Evangile Lc 2 22, 40 fête de la sainte FamilleEvangile Lc 2 22, 40 fête de la sainte Famille (102.41 Ko)

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Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30). 

Première lecture (Gn 15, 1-6 ; 21, 1-3)

Psaume (104 (105), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9)

Deuxième lecture (He 11, 8.11-12.17-19)

Évangile (Lc 2, 22-40)

Première lecture (Gn 15, 1-6 ; 21, 1-3)

15, 1 En ces jours-là, la parole du Seigneur fut adressée à Abram dans une vision : ‘Ne crains pas, Abram ! Je suis un bouclier pour toi. Ta récompense sera très grande.’ 2 Abram répondit : ‘Mon Seigneur Dieu, que pourrais-tu donc me donner ? Je m’en vais sans enfant, et l’héritier de ma maison, c’est Eliézer de Damas.’ 3 Abram dit encore : ‘Tu ne m’as pas donné de descendance, et c’est un de mes serviteurs qui sera mon héritier.’ 4 Alors cette parole du Seigneur fut adressée à Abram : ‘Ce n’est pas lui qui sera ton héritier, mais quelqu’un de ton sang.’ 5 Puis il le fit sortir et lui dit : ‘Regarde le ciel, et compte les étoiles, si tu le peux...’ 6 Et il déclara : ‘Telle sera ta descendance !’ Abram eut foi dans le Seigneur et le Seigneur estima qu’il était juste.

21, 1 Le Seigneur visita Sara comme il l’avait annoncé ; il agit pour elle comme il l’avait dit. 2 Elle devint enceinte, et elle enfanta un fils pour Abraham dans sa vieillesse, à la date que Dieu avait fixée. 3 Et Abraham donna un nom au fils que Sara lui avait enfanté : il l’appela Isaac. – Parole du Seigneur.

Le récit de l’histoire d’Abraham commence au chapitre 12 de la Genèse, nous sommes ici aux chapitres 15 et 21. Abraham, Isaac et Jacob sont appelés dans le judaïsme les pères (avot), les patriarches. Moïse, lui, n’est pas un père ou patriarche, il est en quelque sorte le premier rabbin, celui qui transmet la loi, et s’oppose à pharaon.

Les pères, ou patriarches, sont d’abord les détenteurs d’une promesse. Bien sûr il ne faut séparer la promesse et la loi, Abraham respectera la loi de la circoncision par exemple. Mais la promesse est d’un autre ordre. Si un enfant grandit uniquement avec un papa qui se comporte comme un maître, il est uniquement dans la loi, et un tel enfant peut en devenir psychotique. L’enfant a aussi besoin d’un père qui ouvre un avenir, qui transmet la vie et le sens de la vie par des projets, une promesse. Pour les Hébreux, la Loi, ou la Torah, comporte en réalité tout à la fois des commandements et des récits contenant une promesse.

Dans la lecture de ce dimanche, il est question d’une promesse. Resté sans descendance jusqu’à la vieillesse, Abram a cru que le Seigneur lui donnerait une descendance. Abram eut foi dans le Seigneur.

La naissance d’Isaac, alors qu’Abram et Sara avaient passé l’âge, manifeste que cette naissance vient de Dieu, et que la paternité d’Abram vient de Dieu.

La lecture de ce dimanche passe du chapitre 15 au chapitre 21 de la Genèse. Entre les deux, Abram a voulu agir par lui-même pour obtenir une descendance qui soit de son sang, en s’unissant avec sa servante (Gn 16), donc en dehors des liens du mariage ; or le mariage est typiquement humain, c’est un contrat, un échange de parole garantie par des témoins et devant Dieu. Mais le fils de la servante, Ismaël, n’est pas l’enfant de la promesse. Puis, au chapitre 17 Dieu dit : « on ne t'appellera plus Abram, mais ton nom sera Abraham, car je te fais père d'une multitude de nations » (Gn 17, 5), et Dieu instaure l’alliance de la circoncision (Gn 17, 10). C’est seulement ensuite qu’advient l’annonce de la conception dans le sein pourtant stérile de Sara, l’épouse d’Abraham (Gn 18), et la naissance d’Isaac (Gn 21). Abraham apprend, et nous apprend ce que signifie être père, c’est recevoir de Dieu de pouvoir transmettre la vie qui vient de Dieu, parce que c’est aussi Dieu qui fonde la parole humaine comme dans le cas du contrat de mariage. Ceci étant dit, la paternité d’Abraham est bel et bien charnelle dans le sens où il s’est uni à Sara. À l’annonce de sa conception, Sara avait ri, et l’enfant s’appelle Isaac en souvenir de ce rire.

Joseph posa un acte de foi encore plus grand que celui d’Abraham quand il crut en la maternité virginale de Marie. Sa paternité s’est aussi inscrite dans le cadre rituel d’un mariage, scellé par des paroles humaines devant Dieu. Sa paternité s’est exercée très concrètement : il a inscrit Jésus au recensement de César, il a transmis à Jésus sa langue et son métier, ses coutumes et ses lois, et l’héritage d’une généalogie porteuse d’une promesse, en effet, les généalogies du Christ, celle de Matthieu comme celle de Luc, indique que saint Joseph hérite de la promesse faite à Abraham, et de celle faite à David.

L’évangile de ce dimanche nous montre Joseph et Marie allant présenter Jésus au Temple. Or, ni le rachat du premier-né ni la purification de la mère ne nécessitaient que la sainte Famille vienne au temple. Il y a donc un surcroît de piété de la part de la sainte Famille, un acte gratuit qui dépasse ce que la loi demande. Il s’agit d’un acte d’offrande et de reconnaissance. Joseph et Marie savent que l’Enfant Jésus vient de Dieu, et ils présentent leur enfant à Dieu. Joseph sait qu’il n’y a qu’un Père qui donne la vie, et ce Père, c’est Dieu, source de la vie, et de ce qui fait qu’une vie humaine n’est pas simplement une vie animale mais une vie humaine, fondée sur la parole divine, sur l’Alliance avec le Créateur. Alors, Joseph est un vrai père humain, sa paternité atteint le sommet de la paternité parce qu’elle est entièrement attachée à l’unique paternité, la paternité divine.

Vrai descendant d’Abraham, on peut appliquer à Joseph la parole du Seigneur à Abraham : « ‘Regarde le ciel, et compte les étoiles, si tu le peux...’ Et il déclara : ‘Telle sera ta descendance !’ ». Abraham avait cru cette promesse, qui se réalise jusqu’à nos jours, non seulement à travers les descendants biologiques d’Abraham à travers Israël, mais aussi à travers les chrétiens. Jean-Baptiste disait : « Et ne vous avisez pas de dire en vous-mêmes : Nous avons pour père Abraham. Car je vous le dis, Dieu peut, des pierres que voici, faire surgir des enfants à Abraham » (Mt 3, 9).

Une famille qui prie le « Notre Père » est une famille qui vit, une famille qui est branchée sur la source et où chacun trouve sa place et son bonheur.

Le père de famille qui prie le « Notre Père » comprend comment exercer sa paternité humaine, il a fondement, il est stable, il peut guider sa famille vers la sainteté, dans la volonté divine qui est bonne pour chacun des membres de la famille, il peut aussi pardonner. Combien de névrosés attendent toute leur vie le pardon de leur père… C’est de Dieu le Père qu’un père de la terre apprend à pardonner avec justesse.

Une famille doit aussi demander à Dieu le Père « délivre-nous du mal ». Nous ne pouvons pas, par nous-mêmes, nous en sortir. Abram allait mourir sans enfants, il a crié vers le Seigneur, et il a cru en Dieu.

L’évangile nous fera entendre que lors de la présentation de Jésus au Temple, « Anne aussi se leva, en cette heure-là, / et remercia le SEIGNEUR ;

elle parlait à son sujet [Jésus] / avec tout un chacun qui attendait la délivrance de Jérusalem » (Lc 2, 38).

Psaume (104 (105), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9)

« Rendez grâce au Seigneur, proclamez son nom, annoncez parmi les peuples ses hauts faits ; chantez et jouez pour lui, redites sans fin ses merveilles. Glorifiez-vous de son nom très saint : joie pour les cœurs qui cherchent Dieu ! Cherchez le Seigneur et sa puissance, recherchez sans trêve sa face. Souvenez-vous des merveilles qu’il a faites, de ses prodiges, des jugements qu’il prononça, vous, la race d’Abraham son serviteur, les fils de Jacob, qu’il a choisis. Il s’est toujours souvenu de son alliance, parole édictée pour mille générations : promesse faite à Abraham, garantie par serment à Isaac ».

« Rendez grâce au Seigneur, proclamez son nom, annoncez parmi les peuples ses hauts faits ». Le psaume ne dit pas « rendez grâce à l’univers », comme si nous étions les fruits d’une évolution impersonnelle. Le psaume ne dit même pas « rendez grâce au Créateur », mais il dit rendez grâce « au Seigneur… pour ses hauts faits ». Personne n’a été témoin de l’acte créateur de Dieu, mais la Bible nous raconte les hauts faits de Dieu, par exemple la naissance miraculeuse d’Isaac, et d’autres naissances de mères stériles. C’est donc très concret. La Bible considère d’abord des faits historiques avant de considérer des réalités métaphysiques. À partir de là, nous pouvons aussi considérer l’univers et toutes ses merveilles et rendre grâce au Seigneur pour chacune.

« Chantez et jouez pour lui, redites sans fin ses merveilles », et effectivement, c’est un jeu sans fin puisqu’on peut chanter pour Dieu pour chaque grain de sable au bord de la mer, pour chaque étoile, pour chaque aliment, chaque bouffée d’air, pour chaque pulsation dans nos veines, pour chaque atome, pour chaque photon, etc. Et plus nous chantons et jouons ainsi à redire sans fin ses merveilles, plus les grains de sable se font écho de l’amour du Seigneur, plus les étoiles s’embellissent de sa gloire divine, plus l’air transmet son souffle créateur, plus les aliments et les pulsations de nos veines deviennent un cadeau sensible de sa part… Donc, ainsi continue le psaume : « Glorifiez-vous de son nom très saint : joie pour les cœurs qui cherchent Dieu ! »

Cela demande de notre part une certaine attention, une succession d’actes de volonté aimante : « Cherchez le Seigneur et sa puissance, recherchez sans trêve sa face ».

Puis de nouveau, le psaume insiste sur la dimension historique : « Souvenez-vous des merveilles qu’il a faites, de ses prodiges, des jugements qu’il prononça, vous, la race d’Abraham son serviteur, les fils de Jacob, qu’il a choisis ». La religion biblique se vérifie dans l’histoire que l’on appelle histoire du salut. Il y a eu des prodiges, comme la victoire de Déborah dans les plaines de Canaan quand l’orage fit déborder le torrent du Qishon (Jg 5), ou comme le passage de la mer rouge, quand le vent l’assécha et que les Hébreux traversèrent (Ex 14). Il y a eu des jugements, comme par exemple le jugement des prophètes de Baals (1R 18) ou de la reine Jézabel (2R 9).

« Il s’est toujours souvenu de son alliance, parole édictée pour mille générations : promesse faite à Abraham, garantie par serment à Isaac ». Dieu se souvient de son Alliance, et l’Alliance est toujours irrévocable du côté de Dieu ; il peut cependant exister des ruptures d’Alliance qui viennent de la part des hommes. L’Ancien Testament est rempli de ces ruptures d’Alliance, suivies de pardon et de reprises d’Alliance.

L’Alliance est faite aussi pour s’ouvrir à tous. Jean-Baptiste dit :

« Et ne vous avisez pas de dire en vous-mêmes : Nous avons pour père Abraham. Car je vous le dis, Dieu peut, des pierres que voici, faire surgir des enfants à Abraham » (Mt 3, 9).

Israël porte la promesse, la préparation des prophètes, l’éducation de la Loi, et le dessein de Dieu était que les hébreux portent l’évangile sur le socle biblique, et c’est ce que firent les apôtres aidés par les nombreux prêtres et lévites qui les suivirent après la Pentecôte, comme le livre des Apôtres le dit : « Et la parole du Seigneur croissait ; le nombre des disciples augmentait considérablement à Jérusalem, et une multitude de prêtres obéissaient à la foi » (Actes 6, 7).

Or Jésus déclare, au sujet de Jean-Baptiste :

« Et tout le peuple qui l’a entendu / et même les collecteurs d’impôts
ont rendu justice à Dieu, / car ils ont été immergés de l’immersion de Jean.

Mais les Séparés (pharisiens) / et les scribes

ont rejeté le dessein de Dieu à leur égard, / en ne se faisant pas baptiser par lui. » (Lc 7, 29-30)

Ce « dessein de Dieu » est qu’Israël soit un médiateur pour la guérison des païens, par exemple, le centurion a envoyé en délégation les anciens des juifs (Lc 7, 1-10). Mais beaucoup de pharisiens et de scribes ont rejeté « en leur âme », voire « contre eux-mêmes », le dessein de Dieu (Lc 7, 30). (« b-napšhon » commence avec la conjonction « b » qui peut signifier : par, avec, dans, contre, au sujet de » et peut donc être traduit « dans leur âme, en eux-mêmes, par eux-mêmes, contre eux-mêmes, à leur sujet, à leur égard »).

En ce dimanche, il convient de retenir de ce psaume le premier verset :

« Rendez grâce au Seigneur, proclamez son nom, annoncez parmi les peuples ses hauts faits ». Dans l’évangile, c’est l’attitude d’Anne, fille de « Phanouel » dont le nom signifie « Face de Dieu » :

36 Et Anne, donc, la prophétesse, / la fille de Phanouel, de la tribu de Ashyr,
elle aussi, / était vieille en ses jours.

Elle vécut sept ans avec son mari, / après sa virginité,

37
et elle était veuve, / d’environ quatre-vingt-quatre ans. 

Elle ne quittait pas le Temple, / et, dans le jeûne et la prière,

rendait un culte, jour / et nuit.

38
Et elle aussi se leva, en cette heure-là, / et remercia le SEIGNEUR ;

elle parlait à son sujet / avec quiconque attendait la délivrance de Jérusalem. 

C’est aussi certainement l’attitude des parents de Jésus qui présente leur enfant dans un mouvement d’action de grâce et d’offrande.

Chers auditeurs, que nos vies et nos familles, même si elles sont marquées par la douleur, le deuil comme Anne, ou les annonces angoissantes comme pour Marie, demeurent toujours dans l’action de grâce. Puisse chaque journée s’achever par une courte prière de remerciement. Puisse chaque semaine s’achever par un moment pour remercier le Seigneur.

Deuxième lecture (He 11, 8.11-12.17-19)

Frères, grâce à la foi, Abraham obéit à l’appel de Dieu : il partit vers un pays qu’il devait recevoir en héritage, et il partit sans savoir où il allait. Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d’être à l’origine d’une descendance parce qu’elle pensait que Dieu est fidèle à ses promesses. C’est pourquoi, d’un seul homme, déjà marqué par la mort, a pu naître une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer, une multitude innombrable. Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve, Abraham offrit Isaac en sacrifice. Et il offrait le fils unique, alors qu’il avait reçu les promesses et entendu cette parole : C’est par Isaac qu’une descendance portera ton nom. Il pensait en effet que Dieu est capable même de ressusciter les morts ; c’est pourquoi son fils lui fut rendu : il y a là une préfiguration. – Parole du Seigneur.

L’être humain vit d’une vie qui lui vient du souffle divin nous révèle le livre de la Genèse. L’être humain est un être qui parle et dont le langage est fondé sur une parole primordiale venant de Dieu.

Une humanité auto-référente, sans Dieu, n’aura pas de descendance, pas d’avenir. Une humanité qui se réfère à Dieu comme étant sa source vivifiante aura un bel avenir et une grande descendance. Une humanité auto-référente s’auto-détruit, elle descend au rang de l’animalité puis de la chose, on le voit avec les mères porteuses où la relation mère-enfant est fortement déshumanisée, voir réduite à un outil biologique, une biomasse anonyme, et on envisage même des mères porteuses en état végétatif, incapables de parler.  Ce chemin n’a aucun avenir, il ne tient pas compte de Dieu ni du rapport intrinsèque que l’humain entretien avec ssss.

Saint Paul fait ici écho au livre de la Genèse, en particulier les chapitres 15 et 21 de la première lecture où nous avons expliqué qu’Abraham apprend à recevoir sa paternité de Dieu, la naissance d’Isaac est miraculeuse, c’est le rappel que Dieu est le père de toute vie humaine. Plus encore, dans la sainte Famille, la naissance de Jésus est miraculeuse d’une manière ineffable. Voici les paroles de l’ange à Marie :

« L’Esprit Saint viendra, / et la Puissance du Très Haut t’envahira,
c’est pourquoi celui qui sera enfanté en toi / sera saint,

et c’est Fils de Dieu / qu’il sera appelé
 » (Lc 1, 35).

Ainsi, on peut dire de Marie et Joseph beaucoup plus encore que ce que saint Paul dit de Sara et Abraham : « Grâce à la foi, Sara, elle aussi, malgré son âge, fut rendue capable d’être à l’origine d’une descendance parce qu’elle pensait que Dieu est fidèle à ses promesses. C’est pourquoi, d’un seul homme, déjà marqué par la mort, a pu naître une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de la mer, une multitude innombrable ».

Ensuite, la sainte Famille présenta Jésus au temple. Peut-on faire le lien avec Abraham qui offrit Isaac en sacrifice ? Apparemment, le parallèle est trop fort, car Jésus ne semble pas ici offert en sacrifice. Et pourtant, l’évangile ne parle pas du rachat du premier-né ni de la purification de la mère, mais bien de « leur purification » (Lc 2, 22) qui ne peut désigner que le peuple d’Israël.

Le peuple d’Israël peut être comparé à un nazir dès lors que c’est un peuple consacré au Seigneur, mais voilà, et tous les prophètes le savent, Israël a péché, et il est endurci. Le thème de la purification est annoncé par Malachie : « Il s’assiéra pour fondre et purifier ; il purifiera les fils de Lévi... » (Ml 3, 3).

Pour la purification d’un nazir rendu infidèle à son vœu par le contact avec un mort, il faut alors offrir un couple de colombes, l’une en sacrifice pour le péché, l’autre en holocauste, et un agneau d’un an en sacrifice de réparation (Nm 6, 9-12). Or l’offrande de la sainte Famille peut donc représenter l’offrande nécessaire à la purification du nazir-Israël si l’on voit en Jésus l’Agneau du sacrifice à côté du couple de colombes apportées.

Au Sinaï, avant de rencontrer Dieu et de vivre l’Alliance, le peuple devait se purifier, laver ses vêtements (Ex 19, 10.14). Avant d’entrer dans cette nouvelle Alliance, offerte dans l’Incarnation du Fils de Dieu, le peuple d’Israël doit aussi être purifié. L’Ancien Testament attendait la venue de l’Esprit Saint purificateur (Ez 36, 25-27) et Siméon, dont il est dit que « l’Esprit Saint était sur lui » (Lc 22, 25) est le premier à accueillir Jésus, et il prophétise :

 « 34 Et Siméon les bénit, / et dit à Marie sa mère :
‘Voici, / celui-ci est posé :

pour la chute / et pour le relèvement de beaucoup en Israël,

et pour être un signe / de contradiction.

35
Et dans ton âme, donc, à toi, / passera un glaive ;

en sorte que se révèlent / les raisonnements des cœurs de beaucoup » (Lc 2, 34-35).

Jésus n’est pas tué, mais Marie connaît les prophéties, et elle y consent. Par exemple on lit dans le livre de Daniel : « Et après les 62 semaines, un messie massacré » (Daniel 9, 26) et dans le livre d’Isaïe : « s'il offre sa vie en sacrifice expiatoire, il verra une postérité, il prolongera ses jours, et par lui la volonté du Seigneur s'accomplira » (Isaïe 53, 10). Marie a certainement pâli quand Siméon lui prédit ses propres souffrances. Bien qu’elle connaisse les prophéties, ces mots lui transpercent l’âme. Joseph est à côté d’elle comme un point d’appui, et surtout, Jésus est là, que Marie peut serrer passionnément sur son cœur. Il faut à Marie une foi encore plus ferme que celle d’Abraham, il lui faut un cœur d’or de la plus grande pureté pour résister à la mer de douleur. Anne arrive à son tour, en remerciant Dieu, elle a pu aussi encourager Marie d’une manière féminine. 

Le sacrifice du Christ s’accomplira un jour au calvaire, une trentaine d’année plus tard. L’épitre aux Hébreux parle longuement de ce sacrifice. Jésus unit en sa personne la tradition biblique du prophète Osée qui dit que l’amour vaut mieux que les sacrifices et la tradition biblique sacerdotale qui détaille longuement les sacrifices. En effet, le sacrifice de Jésus est celui de l’amour, amour du Père et amour de l’humanité que Dieu veut sauver.

On peut donc ici faire le lien avec l’histoire d’Abraham que résume saint Paul : « Grâce à la foi, quand il fut soumis à l’épreuve, Abraham offrit Isaac en sacrifice. Et il offrait le fils unique, alors qu’il avait reçu les promesses et entendu cette parole : C’est par Isaac qu’une descendance portera ton nom. Il pensait en effet que Dieu est capable même de ressusciter les morts ; c’est pourquoi son fils lui fut rendu : il y a là une préfiguration. » (He 11, 17-19)

De plus, il est connu que quelques Pères de l’Église établissent un parallélisme significatif entre la génération du Christ ex intacta Virgine (de la Vierge intacte) et sa résurrection ex intacto sepulcro (du sépulcre intact), un lien que l’Église, guidée par l’Esprit, a découvert, mais n’a pas créé.

Évangile (Lc 2, 22-40)

La perle se déroule en 5 actes.

  1. Lc 2, 22-24 : La sainte Famille monte à Jérusalem. Geste clé : l’élévation : « monter à Jérusalem » (v. 22) et « offrir en sacrifice » (v. 24).

« 22 Et lorsque furent accomplis les jours de leur purification / selon la Loi de Moïse,
ils le firent monter à Jérusalem, / afin de le faire se tenir devant le S
EIGNEUR,

23
suivant ce qui est écrit / dans la Loi du SEIGNEUR :

‘Tout mâle qui ouvre la matrice / sera appelé saint du S
EIGNEUR’,

24
et pour offrir en sacrifice / selon ce qui est dit dans la Loi du SEIGNEUR,

un couple de tourterelles / ou deux petits de colombes.

  1. Lc 2, 28-33 : Rencontre avec Siméon. Geste clé : la rencontre. « Il venait par l’Esprit au Temple, alors même que ses parents faisaient entrer » (v. 27).

25 Or il y avait un homme [particulier] à Jérusalem / appelé Siméon.
Cet homme était juste / et droit,

et il attendait la consolation d’Israël, / et l’Esprit Saint était sur lui.

26
Et il lui avait été dit, / de la part de l’Esprit Saint,

qu’il ne verrait pas la mort, / jusqu’à ce qu’il ait vu le Messie du S
EIGNEUR.

27 Celui-ci, justement, / venait par l’Esprit au Temple,
alors même que ses parents faisaient entrer / l’enfant Jésus.

pour faire à sa place / comme il est ordonné dans la Loi.

28
Il le reçut dans ses bras / et il bénit Dieu,

et dit :
29
‘Désormais, laisse aller ton serviteur, mon Seigneur, / selon ta parole, dans la paix !

30
Car voici mes yeux ont vu ta tendresse / 31 que tu as préparée à la face de toutes les nations,

32
lumière pour la révélation aux peuples / et gloire pour ton peuple Israël’.

33 Joseph et sa mère, donc, / étaient stupéfaits des choses qui étaient dites sur lui.

  1. Lc 2, 34-35 : Prophétie de Siméon. Geste clé : « la chute » et « le relèvement » (v. 34). Ensuite, « se révèlent les raisonnements des cœurs » (= geste de dévoiler v. 35).

34 Et Siméon les bénit, / et dit à Marie sa mère :
‘Voici, / celui-ci est posé :

pour la chute / et pour le relèvement de beaucoup en Israël,

et pour être un signe / de contradiction.

35
Et dans ton âme, donc, à toi, / passera un glaive ;

en sorte que se révèlent / les raisonnements des cœurs de beaucoup’.

  1. Lc 2, 36-38 : Rencontre avec Anne.

36 Et Anne, donc, la prophétesse, / la fille de Phanouel, de la tribu de Ashyr,
elle aussi, / était vieille en ses jours.

Elle vécut sept ans avec son mari, / après sa virginité,

37
et elle était veuve, / d’environ quatre-vingt-quatre ans. 

Elle ne quittait pas le Temple, / et, dans le jeûne et la prière,

rendait un culte, jour / et nuit.

38
Et elle aussi se leva, en cette heure-là, / et remercia le SEIGNEUR ;

elle parlait à son sujet / avec quiconque attendait la délivrance de Jérusalem. 

  1. Lc 2, 39-40 : Retour à Nazareth. Jésus grandissait, et la grâce de Dieu était sur lui (double mouvement vertical).

39  Et lorsqu’ils eurent tout accompli, / selon ce qui est dans la Loi du SEIGNEUR,
ils s'en retournèrent en Galilée, / à Nazareth, leur chef-lieu.

40 Or, l’enfant grandissait, / et se fortifiait dans l’Esprit 

et s’emplissait de sagesse / et la grâce de Dieu était sur lui. »

Acclamons la Parole de Dieu.

Lc 2, 22-24. Le récit semble évoquer l’obéissance de la sainte Famille aux lois juives. En soi, dededed remarquable : Jésus est Dieu, il est le Créateur, le législateur, et il obéit aux lois et aux coutumes : la sainte Famille voit dans ces lois l’expression de la volonté du Père. Accomplir la volonté divine, c’est s’unir à la puissance de Dieu créateur, à sa fécondité.

Le rachat. Chaque fils premier-né devait être consacré au Seigneur, en mémoire du fait que Dieu avait fait périr les premiers-nés des Égyptiens (Ex 13,1-2.11-12.14-16 ; Nm 8,16-17). Cependant, seuls les lévites restaient au service du Seigneur (Lv 8,16-18), les aînés des autres tribus étaient rachetés à l’âge d’un mois, en payant cinq sicles (Ex 13,13 ; Nm 18,15-16). Mais Luc ne s’intéresse pas à cette cérémonie du rachat puisqu’il ne mentionne pas les cinq sicles demandés par la loi.

La purification. Cette loi concernait exclusivement la mère. Si elle avait donné naissance à un garçon, elle contractait l’impureté juridique pour quarante jours, à la fin desquels elle devait se présenter au prêtre au sanctuaire, pour être déclarée purifiée par un rite expiatoire ; il n’y a rien de culpabilisant, cette loi signifie que donner la vie a rapport au sacré, et qu’il faut un rite pour revenir à la vie ordinaire. Mais Luc ne s’intéresse pas ici à la purification de Marie puisqu’on ne dit pas « pour sa purification », mais « pour leur purification ».

De plus, ni le rachat ni la purification de la mère ne nécessitaient que la sainte Famille vienne au temple. Il y a un surcroît de piété de la part de la sainte Famille, un acte gratuit qui dépasse ce que la loi demande. Et cet acte concerne « leur purification » (Lc 2, 22).

Au Sinaï, avant de rencontrer Dieu et de vivre l’Alliance, le peuple devait se purifier, laver ses vêtements (Ex 19, 10.14). Avant d’entrer dans cette nouvelle Alliance, offerte dans l’Incarnation du Fils de Dieu, le peuple d’Israël doit aussi être purifié. L’Ancien Testament attendait la venue de l’Esprit Saint purificateur (Ez 36, 25-27). Le peuple d’Israël peut être comparé à un nazir dès lors que c’est un peuple consacré au Seigneur [1], mais voilà, et tous les prophètes le savent, Israël a péché, et il est endurci.

Pour la purification d’un nazir, il faut offrir un couple de colombes, l’une en sacrifice pour le péché, l’autre en holocauste, et un agneau d’un an en sacrifice de réparation (Nm 6, 9-12). L’offrande de la sainte Famille peut donc représenter l’offrande nécessaire à la purification du nazir Israël si l’on voit en Jésus l’Agneau du sacrifice à côté du couple de colombes apportées. Saint Luc passerait donc du niveau réel au niveau symbolique.

Lc 2, 25-33 : Siméon attendait « la consolation d’Israël ». Trois fois il est dit qu’il vivait dans « l’Esprit Saint ». Siméon « reçut dans ses bras Jésus » (Lc 2, 28), et voit en lui la lumière pour la révélation aux peuples (Lc 2, 32).

Lc 2, 34-35 : Il est ensuite question que « se révèlent » [racine gla] les raisonnements de nombreux cœurs (Lc 2, 35). Leurs « raisonnements [racine ḥšḇ] » devraient avoir pour modèle celui de Marie qui « raisonnait [racine ḥšḇ] sur ce que signifiait » la salutation de l’ange (Lc 1, 29). Malheureusement, si certains font des raisonnements justes, guidés par l’amour de Dieu, d’autres font des calculs sordides. Jésus sera en butte à la contradiction, et un glaive transpercera l’âme de Marie. Notons qu’en araméen, le mot « âme » représente la gorge, et que, dans la Bible, l’image du glaive est d’abord une image de la Parole de Dieu[2]. Ce n’est qu’ensuite que l’Église fera le lien avec la Passion.

Lc 2, 36-38 : Anne « rendait un culte [racine plḥ], jour et nuit » (Lc 2, 36-37). Cette racine plḥ signifie travailler, cultiver, servir, rendre un culte, et se trouve aussi en Gn 2, 15 : l’homme est placé dans le jardin « pour qu’il le cultive [plḥ] et qu’il le garde ». Anne la prophétesse connaît le but, la noblesse, la vocation profonde de l’humanité. « La délivrance de Jérusalem », attendue par ceux auxquels Anne s’adresse, sera finalement la délivrance du péché des origines (Gn 3, 15). La modalité de cette délivrance vient d’être précisée : Jésus sera en butte à la contradiction, il assumera un destin de souffrance et de mort mais aussi de glorification et de lumière. 

Lc 2, 39-40 : Reconduit à Nazareth, Jésus se remplissait de sagesse et la grâce-bonté [ṭaybūṯā] de Dieu est sur l’enfant (v. 40).

 

[1] « Tu es un peuple consacré au SEIGNEUR ton Dieu ; c’est toi que le SEIGNEUR ton Dieu a choisi pour son peuple à lui, parmi toutes les nations qui sont sur la terre. » (Dt 7, 6, cf. 14, 2 ; 14, 21 ; 26, 19 ; Ez 44, 19).

[2] Is 49, 2 ; Sg 18, 15 ; Eph 6, 17 ; Ap 1, 16

Date de dernière mise à jour : 16/11/2023