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2 novembre (Défunts)
Podcast sur : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#
Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30.
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Première lecture (Sg 3, 1-6.9)
Psaume (26 (27), 1, 4, 7-9a, 13-14)
Deuxième lecture (1 Co 15, 51-57)
Première lecture (Sg 3, 1-6.9)
Les âmes des justes sont dans la main de Dieu ; aucun tourment n’a de prise sur eux. Aux yeux de l’insensé, ils ont paru mourir ; leur départ est compris comme un malheur, et leur éloignement, comme une fin : mais ils sont dans la paix. Au regard des hommes, ils ont subi un châtiment, mais l’espérance de l’immortalité les comblait. Après de faibles peines, de grands bienfaits les attendent, car Dieu les a mis à l’épreuve et trouvés dignes de lui. Comme l’or au creuset, il les a éprouvés ; comme une offrande parfaite, il les accueille. Au temps de sa visite, ils resplendiront : comme l’étincelle qui court sur la paille, ils avancent. Ils jugeront les nations, ils auront pouvoir sur les peuples, et le Seigneur régnera sur eux pour les siècles. Qui met en lui sa foi comprendra la vérité ; ceux qui sont fidèles resteront, dans l’amour, près de lui. Pour ses amis, grâce et miséricorde : il visitera ses élus. – Parole du Seigneur.
Chers auditeurs, ce passage (Sg 3,1-6.9) se trouve au centre de la première partie du Livre de la Sagesse (chapitres 1 à 5), où l’auteur met en contraste la destinée des justes et celle des impies. Le chapitre précédent exposait la pensée des impies, qui estiment que tout finit avec la mort et qu’il faut profiter sans retenue de l’instant présent (cf. Sg 2,1-6). Le chapitre 3 vient répondre à cette vision limitée en révélant le regard de Dieu : ce qui, aux yeux des hommes, semble perte ou disparition se révèle, dans la lumière divine, comme entrée dans la paix. Ce passage constitue l’une des affirmations les plus explicites de l’espérance en l’immortalité dans tout l’Ancien Testament. Il prépare les chapitres suivants, où seront manifestées la justification des justes et la confusion des impies au jour du jugement (cf. Sg 5,1-5).
« Les âmes des justes sont dans la main de Dieu ; aucun tourment n’a de prise sur eux. Aux yeux de l’insensé, ils ont paru mourir » (Sg 3,2). Le regard humain, limité au visible, constate la disparition et conclut à un échec. La foi, elle, voit plus loin : « Mais ils sont dans la paix » (Sg 3,3). Cette paix n’est pas un état abstrait mais la conséquence d’une proximité : être « dans la main de Dieu » (Sg 3,1).
Saint Augustin commente : « Non, les morts ne sont pas des absents, mais des invisibles. Ils ne sont plus là où ils étaient, mais ils sont partout où nous sommes » (Saint Augustin, Sermon 172, PL 38, 936). Ainsi, le juste ne disparaît pas ; il change de demeure.
La foi ne nie pas la souffrance de la séparation, mais elle lui oppose une espérance solide. Comme le dit saint Paul : « Nous ne voulons pas que vous soyez dans l’ignorance au sujet de ceux qui se sont endormis, afin que vous ne vous affligiez pas comme les autres, qui n’ont pas d’espérance » (1 Th 4,13).
Le monde interprète toute souffrance comme punition. La Sagesse, elle, révèle un autre sens : « Au regard des hommes, ils ont subi un châtiment, mais l’espérance de l’immortalité les comblait » (Sg 3, 4)
« Après de faibles peines, de grands bienfaits les attendent, car Dieu les a mis à l’épreuve et trouvés dignes de lui » (Sg 3, 5). L’Écriture établit un contraste volontairement disproportionné entre la brièveté des souffrances et la grandeur de la récompense. Saint Paul l’exprime de manière saisissante : « Les souffrances du temps présent ne sont rien en comparaison de la gloire qui doit être révélée en nous » (Rm 8,18).
Sainte Thérèse d’Avila écrit dans le même esprit : « Quand nous serons au Ciel, nous comprendrons la valeur d’un moment de souffrance bien employé » (Sainte Thérèse d’Avila, Chemin de perfection, chap. 32, in Œuvres complètes, Cerf, 1995).
Et sainte Thérèse de Lisieux conclut en une phrase devenue classique : « Tout est grâce » (Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, Manuscrit B, in Œuvres Complètes, Cerf, 1992, p. 226).
Nous ne banalisons pas la douleur, mais nous la relativisons à la lumière de l’éternité. Ce qui semble écrasant devient léger placé dans la main de Dieu.
« Comme l’or au creuset, il les a éprouvés » (Sg 3,4-6). Le feu du creuset ne détruit pas l’or, il le purifie. Saint Pierre reprend la même image : « Afin que la valeur éprouvée de votre foi, plus précieuse que l’or périssable, éprouvé par le feu, soit trouvée digne de louange » (1 P 1,7).
Saint François de Sales écrit : « Les afflictions ne sont pas des signes que Dieu nous rejette, mais qu’Il nous estime assez forts pour les porter avec Lui » (Saint François de Sales, Lettre à Madame de Chantal, 14 octobre 1604, dans Œuvres, Annecy, Tome XIII).
L’épreuve devient ainsi participation au mystère du Christ souffrant. « Si nous mourons avec lui, avec lui nous vivrons » (2 Tm 2,11). Le juste souffre, mais jamais seul.
« Ils jugeront les nations, ils auront pouvoir sur les peuples » (Sg 3,8). Il ne s’agit pas ici d’un jugement de condamnation, mais d’un jugement de lumière. La fidélité des justes devient critère de vérité. Leur vie, silencieuse parfois, accuse les œuvres des ténèbres. Saint Jean Chrysostome explique : « Ce ne sont pas les paroles mais la vie des saints qui jugera le monde. Leur simple présence est un reproche vivant » (Saint Jean Chrysostome, Homélie sur Matthieu, Hom. 79, PG 58, 718). Mais les saints ne font pas seulement des reproches, leur gloire révèle la valeur des actions justes et donne envie d’en faire autant. Cette promesse d’autorité royale est confirmée par le Christ lui-même : « Alors les justes resplendiront comme le soleil dans le Royaume de leur Père » (Mt 13,43). Saint Paul écrit à Timothée : « Si nous persévérons, avec lui nous régnerons » (2 Tm 2,12), et nous lisons dans l’Apocalypse : « À celui qui vaincra, à celui qui restera fidèle jusqu’à la fin à ma conduite, je donnerai autorité sur les nations » (Ap 2,26) et les justes « régneront pour les siècles des siècles. »(Ap 22,5)
Le livre de la Sagesse continue : « Qui met en lui sa foi comprendra la vérité ; ceux qui sont fidèles resteront, dans l’amour, près de lui » (Sg 3,9). La vérité de ce passage n’est accessible qu’à ceux qui croient. La foi n’est pas un vague sentiment, mais une adhésion confiante qui ouvre l’intelligence aux réalités invisibles. Saint Jean de la Croix écrit : « Là où il n’y a pas d’amour, mettez de l’amour, et vous trouverez Dieu » (Saint Jean de la Croix, Lettre 26, in Correspondance, Cerf, 1990).
La lecture conclut ainsi : « Pour ses amis, grâce et miséricorde : il visitera ses élus » (Sg 3,9). Dieu ne délègue pas. Il vient Lui-même. Comme le dit Jésus : « Je reviendrai et je vous prendrai auprès de moi, afin que là où je suis, vous soyez vous aussi » (Jn 14,3).
Psaume (26 (27), 1, 4, 7-9a, 13-14)
« Le Seigneur est ma lumière et mon salut ; de qui aurais-je crainte ? Le Seigneur est le rempart de ma vie ; devant qui tremblerais-je ? J’ai demandé une chose au Seigneur, la seule que je cherche : habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie, pour admirer le Seigneur dans sa beauté et m’attacher à son temple. Écoute, Seigneur, je t’appelle ! Pitié ! Réponds-moi ! Mon cœur m’a redit ta parole : ‘Cherchez ma face’. C’est ta face, Seigneur, que je cherche : ne me cache pas ta face. Mais j’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants. ‘Espère le Seigneur, sois fort et prends courage ; espère le Seigneur’. »
« Le Seigneur est ma lumière et mon salut ; de qui aurais-je crainte ? Le Seigneur est le rempart de ma vie ; devant qui tremblerais-je ? » (Ps 26,1). Le psalmiste ne décrit pas ici une simple émotion spirituelle, mais une certitude théologique : Dieu n’est pas seulement celui qui éclaire, il est lumière ; il n’est pas seulement celui qui sauve, il est salut. Saint Basile commente : « Dieu n’illumine pas seulement l’esprit : il en devient la source. Celui qui est uni à Dieu n’a plus besoin d’autre lumière » (Saint Basile de Césarée, Homélie sur le Psaume 27, PG 29, 273).
La présence de Dieu dissipe la peur non pas en supprimant les dangers extérieurs, mais en transformant le cœur intérieur. Saint François d’Assise disait : « Là où il y a la crainte de Dieu pour garder la demeure, l’ennemi ne peut avoir de porte d’entrée » (Saint François d’Assise, Admonitions, 27).
« J’ai demandé une chose au Seigneur, la seule que je cherche : habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie » (Ps 26,4). Le psalmiste ne cherche pas d’abord une protection ni une solution à ses ennemis : il veut la présence du Seigneur.
Saint Augustin commente : « Si tu veux habiter dans la maison du Seigneur, commence par en devenir la maison » (Saint Augustin, Enarrationes in Psalmos, Ps 26, PL 36, 215). Cette habitation est déjà possible par la prière. Sainte Thérèse d’Avila appelle l’oraison « un commerce d’amitié où l’on s’entretient souvent, seul à seul, avec Celui dont on se sait aimé » (Sainte Thérèse d’Avila, Livre de la Vie, chap. 8, in Œuvres Complètes, Cerf, 1995).
« Écoute, Seigneur, je t’appelle ! » (Ps 26,7). La confiance du psalmiste ne supprime pas la supplication : elle la rend plus audacieuse. La foi ne nie pas la peur : elle la transforme en prière. Saint Jean Chrysostome écrit : « Dieu n’attend pas que tu sois calme pour t’entendre ; c’est ton cri qui frappe à sa porte » (Saint Jean Chrysostome, Homélies sur la prière, PG 64, 466).
« C’est ta face, Seigneur, que je cherche : ne me cache pas ta face » (Ps 26,8-9). Dans la Bible, voir la face de Dieu signifie connaître son intimité. Ce désir s’accomplira pleinement en Jésus-Christ : « Qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14,9). Saint Irénée le résume magnifiquement : « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant ; et la vie de l’homme, c’est la vision de Dieu » (Saint Irénée, Contre les hérésies, IV, 20,7, SC 100). Saint Augustin commente ce verset de psaume en disant : « Ce n’est point devant les hommes que j’ai prié ; mais dans le secret où vous entendez seul, mon coeur vous a dit : Je cherche une récompense, non point hors de vous, mais dans vos regards bienveillants, ‘C’est ce regard, ô mon Dieu, que je veux chercher’. Ce regard, je le chercherai sans cesse ; rien de vil ne saurait me plaire ; mon amour pour vous sera sans bornes, parce que rien ne m’est plus précieux. »
Dans cette perspective, la prière d’un mourant pourrait être (d’après Saint Alphonse de Liguori, Préparation à la mort, 2ᵉ Considération) : « Recevez, ô mon Dieu, le sacrifice de ma vie et de ma mort. Que je meure en vous aimant, pour pouvoir vous aimer éternellement. Marie, ma Mère, assistez-moi à ma dernière heure.
Jésus, Marie, Joseph, je vous donne mon cœur et mon âme. Seigneur, je remets mon esprit entre vos mains. »
« J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants. Espère le Seigneur, sois fort et prends courage : espère le Seigneur » (Ps 26,13-14).
L’espérance n’est pas attente passive : elle est courage actif.
Saint Alphonse de Liguori (Préparation à la mort, édition classique en 36 Considérations), enseigne d’abord que le péché mortel est une folie. Il montre ensuite que persévérer dans le mal sans se convertir est encore plus grave : l’obstination endurcit l’âme au point que Dieu lui-même peut la laisser à son endurcissement. Vient alors la mort — certaine et imprévisible — qui fixe pour toujours la destinée de chacun : paix pour le juste, terreur pour le pécheur non repentant. Mais Jésus a versé son sang et Marie ouvre ses bras à quiconque revient. Dans la Considération 35, La persévérance finale, saint Alphonse de Liguori dit en substance : Malheur à celui qui se confie en lui-même : il tombera infailliblement. Mais bienheureux celui qui place toute sa confiance dans la grâce de Dieu, et qui la demande chaque jour avec humilité ! Que je répète sans cesse : “Jésus et Marie, je vous aime ; ne m’abandonnez pas dans ma dernière agonie.” Celui qui prie ainsi ne se perdra pas.
Avant de conclure, observons que ce psaume répond à la première lecture. Le juste prie dans le Psaume : « Le Seigneur est ma lumière et mon salut, de qui aurais-je crainte ? » (Ps 26,1). Et la Sagesse répond : « Les âmes des justes sont dans la main de Dieu ; aucun tourment n’a de prise sur elles » (Sg 3,1). Ce que le psalmiste proclame dans la confiance, la Sagesse le confirme dans l’éternité.
Dans le combat présent, le croyant crie : « Écoute, Seigneur, je t’appelle ! » (Ps 26,7). Et Tertullien (155-222) témoigne : « Nous offrons des sacrifices pour les défunts et pour les martyrs au jour anniversaire de leur mort. La tradition approuve cette pratique qui est en vigueur, la coutume la confirme, et la foi l’observe » (De corona militis, ch 4), Tertullien dit aussi : « La marque du véritable amour d’une veuve pour son mari, c’est lorsqu’elle ne cesse de faire annuellement tout ce qu’elle peut pour adoucir ses souffrances et l’introduire dans le séjour de la lumière » (De monogamia, ch 10). Et saint Éphrem (306-373) disait dans son Testament : « Quand mon âme sera sortie de mon corps, accompagnez-la de vos prières. Chantez des psaumes et offrez le saint sacrifice pour un pauvre pécheur qui a passé sa vie avec beaucoup de vanité, et n’a rempli ses jours que d’œuvres de ténèbres. Enfin, daignez-vous souvenir de moi encore au 30° jour ; car les morts reçoivent grand secours des prières et des oblations des vivants. »
Le psalmiste dit : « C’est ta face, Seigneur, que je cherche » (Ps 26,8). Et la Sagesse lui murmure : « Comme une offrande parfaite, il les accueille » (Sg 3,6). La quête du visage aboutit à l’accueil dans les bras de Dieu.
Le croyant espère encore : « J’en suis sûr, je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants » (Ps 26,13). Et la Sagesse révèle la promesse accomplie : « Au temps de sa visite, ils resplendiront » (Sg 3,7). Ce que le psaume espère, la Sagesse le contemple.
Deuxième lecture (1 Co 15, 51-57)
Frères, c’est un mystère que je vous annonce : nous ne mourrons pas tous, mais tous nous serons transformés, et cela en un instant, en un clin d’œil, quand, à la fin, la trompette retentira. Car elle retentira, et les morts ressusciteront, impérissables, et nous, nous serons transformés. Il faut en effet que cet être périssable que nous sommes revête ce qui est impérissable ; il faut que cet être mortel revête l’immortalité. Et quand cet être périssable aura revêtu ce qui est impérissable, quand cet être mortel aura revêtu l’immortalité, alors se réalisera la parole de l’Écriture : La mort a été engloutie dans la victoire. Ô Mort, où est ta victoire ? Ô Mort, où est-il, ton aiguillon ? L’aiguillon de la mort, c’est le péché ; ce qui donne force au péché, c’est la Loi. Rendons grâce à Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ. – Parole du Seigneur.
Nous ne mourrons pas tous, parce que la dernière génération humaine vivra une assomption dans la gloire, comme saint Paul l’a dit peu auparavant : « 22 De même en effet que tous meurent en Adam, ainsi tous revivront dans le Christ. 23 Mais chacun à son rang : comme prémices, le Christ, ensuite ceux qui seront au Christ, lors de son Avènement. 24 Puis ce sera la fin, lorsqu'il remettra la royauté à Dieu le Père, après avoir détruit toute Principauté, Domination et Puissance ». (1Co 15, 22-24). ddddLa lecture de ce dimanche parle de cette « fin », la fin du temps de la terre, et la résurrection de la chair. Cette fin ultime ne doit pas être confondue avec « la venue de notre Seigneur avec ses saints » (1Th 3, 13). Au moment de la venue glorieuse du Christ (qui jugera l’antichrist), les saints (et les anges) se manifesteront, selon les affinités qu’ils peuvent avoir avec telles ou telles personnes de la terre pour les aider à s’ouvrir au Christ venant dans la gloire et à vivre en conséquence. Les saints du ciel ne se réincarneront pas, ils apparaitront comme, déjà maintenant, il arrive que des saints apparaissent aux vivants. Mais ce n’est pas encore la « fin », ce n’est pas encore l’Assomption finale dans l’éternité (1Co 15, 24), ce n’est pas encore la résurrection de la chair que nous proclamons dans le Credo et dont nous parle la 2e lecture de ce dimanche.
Tant que le cerveau fonctionne, nous disons que la personne est vivante même si d’autres organes sont endormis. Lorsque l’activité cérébrale s’éteint définitivement, même si certaines cellules persistent, l’unité de la personne est perdue. La science considère la mort comme un effondrement du système d’intégration : ce n’est pas tant l’arrêt de chaque cellule, mais la perte de coordination de l’ensemble. Le christianisme rejoint cette intuition. Le corps, ce n’est pas un agrégat biologique — c’est un corps animé par une âme. Quand l’âme quitte le corps, la personne n’est plus là, même si des morceaux biologiques persistent. Le Corps au sens biblique est un “mystère d’unité” (1 Co 12,12) — ce n’est pas tant la matière qui compte que la cohérence vivante donnée par l’âme. Saint Thomas d’Aquin le dit ainsi : « Ce n’est pas la chair qui fait l’homme, mais l’âme qui l’anime. » (Somme Théologique, I, q. 75)
La Résurrection ne signifie pas réparer des cellules mortes, ni relancer une activité biologique. Il ne s’agit pas d’un redémarrage organique. La résurrection, ce n’est pas un retour à la vie biologique — c’est une recréation de la personne dans l’unité parfaite de son âme et d’un corps glorieux.
Saint Paul nous transmet une révélation bouleversante : la mort n’aura pas le dernier mot : « Voici que je vous dis un mystère : nous ne mourrons pas tous, mais tous nous serons transformés » (1 Co 15,51). La mort n’est pas seulement vaincue spirituellement, elle sera abolie corporellement. Saint Jean Chrysostome s’écrie en commentant ce passage : « Ce n’est plus seulement la résurrection, mais la transformation en gloire ! La nature déchue devient lumineuse. » (Saint Jean Chrysostome, Homélie sur la Résurrection, PG 50, 441)
Cette lumière n’est pas une lumière biologique. ddddA l’état normal, les cellules de notre corps émettent une lumière extrêmement faible, invisible à l’œil nu — 1 à 100 photons par seconde et par centimètre carré — produite par les réactions d’oxydation dans les mitochondries, la production de radicaux libres, la décomposition de molécules instables. Cette lumière biologique, très faible s’éteint rapidement après la mort. La lumière spirituelle est très différente. De nombreux témoignages d’Expérience de mort imminente (EMI) (comme ceux étudiés par le Dr Raymond Moody, Dr Sam Parnia, Dr Jean-Jacques Charbonier…) décrivent une lumière intense : Non pas une lumière extérieure comme celle d’une lampe, mais une lumière intelligente, aimante, consciente, parfois décrite comme une “Présence” plutôt qu’un simple éclat lumineux. Or, scientifiquement, rien ne prouve que cette lumière soit due à des biophotons ou à un phénomène physique mesurable dans le cerveau. En effet le cerveau est déjà en arrêt électrique dans la plupart de ces récits. La lumière spirituelle est d’un autre ordre que la lumière physique.
Continuons la lecture de saint Paul : « En un instant, en un clin d’œil, au son de la trompette finale… les morts ressusciteront, incorruptibles » (v.52). Le temps s’achèvera. Dieu achèvera d’un coup ce que la grâce avait commencé. Saint Irénée résume ainsi : « Celui qui a formé le corps au commencement saura bien le reformer à la fin. » (Contre les hérésies, V, 3,2)
« Il faut que cet être périssable revête l’incorruptibilité » (v.53). Saint Paul utilise l’image du revêtement, déjà présente dans le baptême (cf. Ga 3,27). Saint Augustin commente : « Ce n’est pas un autre corps, mais le même glorifié, comme le vêtement lavé et resplendissant » (La Cité de Dieu, XXII, 19).
Saint Paul ne dit pas seulement que la mort est vaincue : il dit qu’elle est absorbée, digérée, détruite par la vie : « La mort a été engloutie dans la victoire » (v.54). Sainte Thérèse de Lisieux l’exprime à sa manière avant de mourir : « Je ne meurs pas, j’entre dans la vie. » (Derniers Entretiens, 30 juillet 1897)
« Le dard de la mort, c’est le péché » (v.56). Saint Paul va à la racine : la mort fait peur à cause du péché ; sans culpabilité, elle devient passage. Saint François de Sales écrit : « La mort chrétienne ne blesse pas : elle perce sans douleur, parce que la pointe a été amolie par la croix. » (Traité de l’Amour de Dieu, Livre IX, chap. 13).
Saint Cyrille de Jérusalem (315-386) enseignait aux catéchumènes : « Nous adressons à Dieu nos prières pour les défunts, quoiqu’ils aient été pécheurs, en lui offrant Jésus-Christ même, qui a été immolé pour nos péchés, afin que celui qui est plein de bonté et de miséricorde leur devienne favorable ainsi qu’à nous… Que les âmes des défunts sont extrêmement soulagées par cet auguste sacrifice qu’on offre pour elles sur l’autel ! » (Catéchèses mystagogiques, 5)…
Et saint Paul conclut par un cri de joie : « Grâces soient rendues à Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus Christ ! » (v.57).
En ce temps-là, Jésus disait aux foules…
Il se trouve que j’ai fait une traduction littérale depuis la Pshitta, le texte liturgique des églises de langue araméenne, cette traduction a reçu l’imprimatur de la conférence des évêques de France. Commençons par le verset 37.
« Tout un chacun que m’a donné mon Père, / viendra auprès de moi ;
et qui viendra auprès de moi, / je ne le chasserai pas au-dehors ! » (Jn 6, 37)
Le Christ commence par la réception : « Tout ce que me donne le Père… Tout un chacun que m’a donné mon Père ». Avant même que l’homme se décide à venir, il est déjà porté : ce n’est pas l’homme qui vient vers Dieu, c’est Dieu qui attire l’homme vers Dieu. Saint Thomas d’Aquin commente : « Dieu précède l’homme dans la grâce, afin que l’homme puisse le suivre dans la liberté » (Super Ioannem, cap. 6, lect. 4, Marietti, 1952). Nous croyons parfois venir à Jésus par notre propre initiative : une décision de conversion, une prière fervente, un retour à la foi. Mais ici, le Christ nous révèle que tout désir de Dieu est déjà la trace d’un amour premier. Saint Augustin l’avait déjà vu : « Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais déjà trouvé » (Enarrationes in Psalmos, Ps 69, PL 36, col. 882).
« et qui viendra auprès de moi, / je ne le chasserai pas au-dehors ! » (Jn 6, 37) Pourquoi Jésus dit-il cela ? On n’a jamais vu Jésus chasser quelqu’un ! En disant cela, Jésus annonce le salut, la rédemption du péché des origines où Adam et Eve furent chassés au dehors du jardin. Le livre de l’Apocalypse précise qui sont ceux qui sont chassés : « Dehors les chiens, les sorciers, les impurs, les assassins, les idolâtres et tous ceux qui se plaisent à faire le mal ! » (Ap 22, 13-15). Saint Augustin commente : « Si tu n’es pas encore entré, frappe ; et s’il semble que tu sois rejeté, insiste, car le Seigneur ne repousse pas pour toujours » (In Ioannis Evangelium Tractatus XXVI, 3, PL 35, col. 1606). Sainte Thérèse de Lisieux l’avait compris : « Je sens que si j’avais commis tous les crimes possibles, j’aurais toujours la même confiance : je jetterais dans le Cœur de Jésus toutes mes offenses » (Manuscrit C, Œuvres complètes, Cerf/DDB, 1992, p. 277).
« et qui viendra auprès de moi, / je ne le chasserai pas au-dehors ! » (Jn 6, 37) Il y a ici une phrase qui pourrait être écrite en lettres d’or à l’entrée de toute église et qui devrait être gravée au fond de toute conscience blessée : « Celui qui vient à moi, je ne le jetterai pas dehors Tout un chacun que m’a donné mon Père et qui viendra auprès de moi, / je ne le chasserai pas au-dehors ! ». Le Christ ne trie pas les cœurs comme on trierait des candidats. Il ne met pas d’étiquette « acceptable / non acceptable ». Même le pécheur le plus tâtonnant est accueilli, ce qui ne veut pas dire qu’il peut immédiatement accéder à la table eucharistique.
Et saint Jean Chrysostome s’écrie devant ce verset : « Il ne dit pas : Je l’accueillerai si… mais : Je ne le rejetterai pas. Il n’exige rien d’autre que de venir » (Homélies sur Jean XLV, 1, PG 59, col. 252). Ce n’est pas de l’angélisme, mais de la justice de Dieu, qui n’est pas celle des hommes : Dieu ne fait pas entrer les dignes, il rend dignes ceux qu’Il fait entrer.
« Je suis descendu du ciel ». Le Christ ne propose pas une échelle pour s’élever vers Dieu. Il annonce la venue de Dieu vers l’homme : « Je suis descendu du ciel ». Le salut chrétien n’est pas une ascension mystique, mais une incarnation reçue. Saint Irénée l’exprime avec force : « Ce n’est pas nous qui avons cherché Dieu, c’est Dieu qui nous a cherchés » (Adversus Haereses III, 19,1, SC 211, p. 368). Cela signifie que toute vie spirituelle authentique commence non par l’effort, mais par l’accueil. Il ne s’agit pas de grimper : il s’agit de se laisser prendre.
« 38 Si je suis descendu depuis les Cieux, / ce ne fut pas pour que je fasse ma volonté,
mais pour que je fasse / la volonté de celui qui m’a envoyé !
39 Or telle est / la volonté de celui qui m’a envoyé :
que de chacun qu’Il m’a donné, / je n’en perde aucun,
mais que je le remette debout, / au jour dernier ! »
Que veut Dieu ? La réponse est que je ne perde aucun de ceux qu’Il m’a donnés (Jn 6,39). Saint François de Sales commente : « Dieu ne repousse personne, sinon celui qui veut être repoussé » (Traité de l’Amour de Dieu, Livre IV, chap. 6, Annecy, 1892, p. 246). Nous avons souvent plus de dureté contre nous-mêmes que Dieu n’en a contre nous. Nous nous jugeons irrécupérables, hors d’atteinte, irrémédiablement abîmés. Mais Jésus objecte : « Je ne veux pas te perdre ». La volonté du Père n’est donc pas une volonté de jugement, mais une volonté de salut.
La résurrection est le cœur même du dessein divin. Saint Jean Chrysostome s’émerveille : « Ce ne fut pas assez pour Lui de mourir : Il a voulu encore nous ressusciter et nous glorifier » (Homélies sur Jean XLV, 1, PG 59, col. 252). Pour Jésus, sauver ne signifie pas seulement pardonner, mais relever, restaurer, glorifier.
Pardonner ne suffit pas à Dieu : Il veut relever, recréer. Saint Cyrille d’Alexandrie ose écrire : « Il ne veut pas seulement nous sortir de la mort : Il veut faire de nous des vivants immortels » (Commentaire sur Jean, Livre IV, PG 73, col. 580). Le salut chrétien n’est donc pas négatif (ne pas aller en enfer), mais positif (entrer dans la plénitude de la Vie). Ce n’est pas échapper à quelque chose : c’est être saisi par Quelqu’un.
Continuons la traduction littérale depuis la Pshitta :
« 40 Telle est, en effet, / la volonté de mon Père :
que tout un chacun qui voit le Fils / et croit en lui,
que soit pour lui / la vie qui est toujours !
Et, moi, je le remettrai debout, / au jour dernier ! »
C’est une promesse à la fois présente : celui qui croit « a la vie éternelle / la vie qui est toujours ! » et future : « je le ressusciterai / moi, je le remettrai debout ». Croire, ce n’est pas seulement adhérer à une vérité, mais se livrer à une Personne qui relève. Celui qui croit ne tombe pas dans l’angoisse de la mort : il tombe dans les bras de Celui qui relève.
Ainsi, ce passage est une véritable charte de la miséricorde. Le Père attire, le Fils accueille, l’Esprit ressuscite. L’homme n’a qu’à venir sans crainte, car aucun de ceux qui s’approchent n’est rejeté.
En ce jour de prière pour les défunts, prions donc avec beaucoup de confiance, comme le faisaient les premiers chrétiens. Saint Athanase (295-373), écrit : « Comme la vigne qui fleurit dans les campagnes transmet sa force et le parfum de ses fleurs jusqu’aux vins renfermés dans les caves, de sorte que ceux-ci fleurissent à leur manière, bouillonnent et s’enfuient, de même les âmes souffrantes, renfermées dans le sein de la terre, sentent le parfum de nos prières et du sacrifice que l’on offre pour elles, de sorte qu’elles sont grandement consolées et s’envolent plus tôt vers le Ciel. » (Questiones ad Antiochum, quest 4)
« 37 Tout un chacun que m’a donné mon Père, / viendra auprès de moi ;
et qui viendra auprès de moi, / je ne le chasserai pas au-dehors !
38 Si je suis descendu depuis les Cieux, / ce ne fut pas pour que je fasse ma volonté,
mais pour que je fasse / la volonté de celui qui m’a envoyé !
39 Or telle est / la volonté de celui qui m’a envoyé :
que de chacun qu’Il m’a donné, / je n’en perde aucun,
mais que je le remette debout, / au jour dernier !
40 Telle est, en effet, / la volonté de mon Père :
que tout un chacun qui voit le Fils / et croit en lui,
que soit pour lui / la vie qui est toujours !
Et, moi, je le remettrai debout, / au jour dernier ! »
Date de dernière mise à jour : 01/10/2025