Dimanche 12 octobre

Logo radio esperance

Podcast sur  : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#

(Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30). 
https://player.radio-esperance.fr/?webradio=direct

Première lecture (2 R 5, 14-17)

Psaume (Ps 97 (98), 1, 2-3ab,3cd-4)

Deuxième lecture (2 Tm 2, 8-13)

Évangile (Lc 17, 11-19)

Première lecture (2 R 5, 14-17)

En ces jours-là, le général syrien Naaman, qui était lépreux, descendit jusqu’au Jourdain et s’y plongea sept fois, pour obéir à la parole d’Élisée, l’homme de Dieu ; alors sa chair redevint semblable à celle d’un petit enfant : il était purifié ! Il retourna chez l’homme de Dieu avec toute son escorte ; il entra, se présenta devant lui et déclara : « Désormais, je le sais : il n’y a pas d’autre Dieu, sur toute la terre, que celui d’Israël ! Je t’en prie, accepte un présent de ton serviteur. » Mais Élisée répondit : « Par la vie du Seigneur que je sers, je n’accepterai rien. » Naaman le pressa d’accepter, mais il refusa. Naaman dit alors : « Puisque c’est ainsi, permets que ton serviteur emporte de la terre de ce pays autant que deux mulets peuvent en transporter, car je ne veux plus offrir ni holocauste ni sacrifice à d’autres dieux qu’au Seigneur Dieu d’Israël. » – Parole du Seigneur. 

Chers auditeurs, nous entendons l’histoire étonnante de Naaman, ce général syrien, malade de la lèpre. Homme puissant, il cherchait une guérison digne de sa gloire, un miracle éclatant. Et pourtant, Dieu lui demande quelque chose d’étonnamment humble : descendre au Jourdain et se plonger simplement dans l’eau. Observons la force de l’obéissance dans la foi : Naaman, d’abord réticent (cf. 2 R 5,11-12), accepte enfin l’ordre simple du prophète. Son geste de descendre dans le Jourdain est à la fois un abaissement (l’homme puissant accepte un rite humble) et un acte de confiance. La guérison découle de cette obéissance.
Le fleuve du Jourdain, qui marque l’entrée en Terre promise, devient ici lieu de purification. Plonger « sept fois » signifie une plénitude, une purification parfaite.
Naaman est un païen, et pourtant il fait l’expérience du Dieu d’Israël. Le salut dépasse les frontières du peuple élu.
En demandant de la terre, Naaman manifeste son désir de rester fidèle au Dieu d’Israël même hors de la terre promise. Il veut, en quelque sorte, emporter avec lui un signe de la présence du Dieu vivant.

Origène dit : « Considère Naaman le Syrien. Aucun autre fleuve, ni de Damas ni d’ailleurs, n’avait pu le purifier. Mais quand il fut plongé dans le Jourdain, sur l’ordre du prophète, il devint sain et sauf. Le Jourdain est le type du Sauveur. Comme ce fleuve descend de hautes montagnes vers la mer Morte, ainsi le Fils de Dieu est descendu du ciel vers notre humanité mortelle. Quiconque se plonge dans ce Jourdain spirituel — c’est-à-dire dans la mort et la résurrection du Christ — est purifié non d’une lèpre corporelle, mais des souillures de l’âme. Ainsi Naaman, lavé extérieurement, annonçait en figure la purification intérieure donnée à ceux qui croient. » (Origène — Commentaire sur l’Évangile de Jean VI, §29-30)

Saint Ambroise de Milan commente : « Tu as lu que Naaman, le Syrien, était lépreux. Une jeune fille lui conseilla de recourir au prophète en Israël. Il vint et fut envoyé au Jourdain, pour s’y plonger sept fois. Il douta d’abord : Les fleuves de Damas ne valent-ils pas mieux que toutes les eaux d’Israël ? Pourtant il obéit, se plongea, et il fut guéri. Comprends donc que ce n’est pas l’eau qui purifie, mais la grâce. Le Syrien descendit, se plongea sept fois, selon la Loi. Toi, tu as été baptisé au nom de la Trinité. Naaman fut purifié seulement de la lèpre du corps ; toi, tu es purifié de toutes les souillures de l’âme. Il reconnut alors qu’il n’y avait pas d’autre Dieu en Israël ; toi, tu as confessé le Père, le Fils et le Saint-Esprit. » (St Ambroise de Milan — De mysteriis III, 16-21)

C’est ainsi que cette page de l’Écriture est une préfiguration du baptême.

Comme Naaman est libéré de sa lèpre, le baptisé est lavé de toutes les souillures du péché, originel et personnels. Saint Ambroise dit encore : « Ce n’est pas la vertu de l’eau en elle-même qui purifie, mais la grâce qui agit à travers l’eau. Tu as vu l’eau, tu as vu le ministre : mais ce qu’on ne voit pas est plus grand que ce que l’on voit. Car ce n’est pas l’homme qui agit, mais Dieu. » (St Ambroise de Milan — De sacramentis I, 9-13)

 Le catéchisme de l’Église catholique dit :
  « Par le Baptême, tous les péchés sont remis, le péché originel et tous les péchés personnels ainsi que toutes les peines du péché (cf. DS 1316). En effet, en ceux qui ont été régénérés il ne demeure rien qui les empêcherait d'entrer dans le Royaume de Dieu, ni le péché d'Adam, ni le péché personnel, ni les suites du péché, dont la plus grave est la séparation de Dieu » (CEC 1263).

« Dans le baptisé, certaines conséquences temporelles du péché demeurent cependant, tels les souffrances, la maladie, la mort, ou les fragilités inhérentes à la vie comme les faiblesses de caractère, etc., ainsi qu'une inclination au péché que la Tradition appelle la concupiscence, ou, métaphoriquement, "le foyer du péché" ("fomes peccati") : "Laissée pour nos combats, la concupiscence n'est pas capable de nuire à ceux qui, n'y consentant pas, résistent avec courage par la grâce du Christ. Bien plus, 'celui qui aura combattu selon les règles sera couronné' (2Tm 2,5)" (Cc. Trente: DS 1515). » (CEC 1264).

Ensuite, le baptême fait de nous une créature nouvelle. Naaman a retrouvé une peau d’enfant ; le baptisé reçoit une vie d’enfant de Dieu. « Le Baptême ne purifie pas seulement de tous les péchés, il fait aussi du néophyte "une création nouvelle" (2Co 5,17), un fils adoptif de Dieu (cf. Ga 4,5-7) qui est devenu "participant de la nature divine" (2P 1,4), membre du Christ (cf. 1Co 6,15 12,27) et cohéritier avec Lui (Rm 8,17), temple de l'Esprit Saint (cf. 1Co 6,19). » (CEC 1265)

«   La Très Sainte Trinité donne au baptisé la grâce sanctifiante, la grâce de la justification qui : - le rend capable de croire en Dieu, d'espérer en Lui et de L'aimer par les vertus théologales ; - lui donne de pouvoir vivre et agir sous la motion de l'Esprit Saint par les dons du Saint-Esprit ; - lui permet de croître dans le bien par les vertus morales.  Ainsi, tout l'organisme de la vie surnaturelle du chrétien a sa racine dans le saint Baptême. » (CEC 1266)

Le péché nous isolait, comme la lèpre isolait Naaman, mais Dieu nous rend à la communion avec lui et avec nos frères. Naaman quitte ses idoles pour s’attacher au Dieu vivant ; il confesse : « Désormais je n’offrirai de sacrifice qu’au Seigneur, le Dieu d’Israël. » (2 R 5,17). De même, le baptême nous fait entrer dans l’Église, le Corps du Christ. Nous devenons membres d’un seul peuple, envoyés en mission, appelés à témoigner.

Chers auditeurs, le chemin de Naaman est aussi le nôtre.
Il a fallu qu’il accepte de descendre, d’abandonner son orgueil, pour être sauvé.
Nous aussi, nous devons accepter d’être pauvres et dépendants de la grâce de Dieu. Alors, comme lui, nous renaîtrons à une vie nouvelle. Prions aujourd’hui pour que chacun de nous redécouvre la grâce de son baptême : purification, renaissance, don de l’Esprit, appartenance à l’Église, sceau indélébile de l’amour de Dieu.

Psaume (Ps 97 (98), 1, 2-3ab,3cd-4)

Chantez au Seigneur un chant nouveau, car il a fait des merveilles ; par son bras très saint, par sa main puissante, il s’est assuré la victoire. Le Seigneur a fait connaître sa victoire et révélé sa justice aux nations ; il s’est rappelé sa fidélité, son amour, en faveur de la maison d’Israël. La terre tout entière a vu la victoire de notre Dieu. Acclamez le Seigneur, terre entière, sonnez, chantez, jouez ! 

Le psaume 97 (98) est un hymne de louange universelle. Il se situe dans la série des psaumes « de royauté » (Ps 95-100) qui proclament le règne du Seigneur sur toutes les nations et sur la création entière.

On peut diviser ce psaume en trois : vv. 1-3 : mémoire des grandes œuvres de Dieu, vv. 4-6 : invitation à la louange avec cris et instruments, vv. 7-9 : convocation cosmique pour acclamer le jugement du Seigneur.

« Chantez au Seigneur un chant nouveau, car il a fait des merveilles ; par son bras très saint, par sa main puissante, il s’est assuré la victoire. » (v. 1). L’expression « chant nouveau » revient fréquemment dans les psaumes (cf. Ps 95,1 ; 149,1) et chez Isaïe (42,10). Elle indique une action inédite de Dieu, une intervention qui renouvelle l’histoire. Ici, les « merveilles » rappellent les hauts faits de l’Exode et les délivrances d’Israël. La victoire n’est pas attribuée à une armée, mais au « bras très saint» de Dieu, image de sa puissance salvifique.

Les Pères de l’Église voient dans ce « chant nouveau » une annonce du Christ : le « chant nouveau » est le chant de l’Église née de la Pâque (cf. St Augustin Enarr. in Ps. 97,1). « Le chant ancien célébrait les merveilles visibles, le chant nouveau célèbre les merveilles invisibles. Le chant ancien célébrait les ennemis engloutis dans la mer, le chant nouveau célèbre les démons vaincus dans les eaux du baptême. Celui qui a reçu la grâce ne peut chanter que d’une manière nouvelle, avec un cœur renouvelé et un esprit transformé. » (Origène – Homélie sur les Psaumes (fragment conservé, cf. PG 12, 1645)

« Le Seigneur a fait connaître sa victoire et révélé sa justice aux nations » (v. 2) Ce salut n’est pas caché mais « révélé », offert à tous, visible aux yeux des nations. Saint Augustin y voit une prophétie de l’universalité chrétienne : « Tous les confins de la terre ont vu le salut de notre Dieu : ce qui avait été promis à Abraham, que sa descendance posséderait toutes les nations, voici qu’il s’est accompli. L’Évangile est proclamé jusqu’aux extrémités du monde. » (Enarr. in Ps. 97,2-3).

« Il s’est rappelé son amour et sa fidélité en faveur de la maison d’Israël. » (v. 3)
Deux termes clés de l’alliance apparaissent : ḥesed (amour, miséricorde) et ’emûnâ (fidélité, vérité). Saint Augustin explique : « Ce que Dieu avait promis, il l’a accompli. Il avait promis un Sauveur, il l’a donné. Il avait promis la rédemption, elle s’est réalisée. En se souvenant de sa miséricorde, Dieu a fait éclater sa justice. » (Enarr. in Ps. 97,3).

« Tous les lointains de la terre ont vu le salut de notre Dieu. » (v. 3cd) Ce verset marque un tournant : le salut promis à de la maison d’Israël se déploie jusqu’aux confins de la terre. Saint Augustin souligne : « Toute la terre acclame parce que toute la terre croit. » (Enarr. in Ps. 97,4).

« Acclamez le Seigneur, terre entière, éclatez en cris de joie, chantez ! » (v. 4).

« Chant nouveau signifie une joie nouvelle. Car, si la Loi ancienne avait ses psaumes, le peuple nouveau a ses cantiques nouveaux. La voix des chrétiens n’est pas une voix solitaire, mais la symphonie de l’univers. C’est pourquoi le psalmiste dit : Acclamez le Seigneur, terre entière ! Ce ne sont plus seulement les instruments matériels qui retentissent, mais les instruments spirituels : la foi, l’espérance et la charité. C’est avec ces instruments que l’Église chante au Christ, son Époux. » (Saint Ambroise Explanatio Psalmi CXVIII (commentaire spirituel sur la louange).

« Remarquez comment le prophète appelle toute la terre à la joie : Acclamez le Seigneur, terre entière, éclatez en cris de joie, chantez ! Non pas seulement les Juifs, ni seulement les justes, mais tous les peuples, toutes les nations. Et voyez quelle est cette joie : non pas une joie mesurée, mais une joie débordante, une exultation qui se répand en cris et en chants. Car le Christ est venu, il a sauvé le monde, il a montré son salut à la face de toutes les nations. Comment ne pas éclater de joie quand la mort est détruite et la vie manifestée ? » (Saint Jean Chrysostome, Homélie sur le Psaume 97 (PG 55, 494-495)

Le psaume continue en convoquant les instruments du culte (vv. 5-6), puis la création entière (vv. 7-9) : mer, fleuves, montagnes. Tout doit acclamer le Seigneur « qui vient pour juger la terre ».Ce jugement, loin d’être source de peur, est présenté comme une bonne nouvelle : « Il jugera les peuples avec justice. » Les Pères y voient une annonce du jugement du Christ, juge et sauveur, qui mettra fin à l’injustice et établira la paix. La liturgie retient les vv. 1-4, mais il est utile d’évoquer aussi la finale, en effet, pour que Dieu règne sur la terre, il faut bien qu’il y ait un jugement du monde. Ce jugement est évoqué dans le livre de l’Apocalypse qui parle d’une bête (un « système ») et d’un faux prophète expulsés et jetés dans l’étang de feu (Ap 19, 20). Se manifesteront mondialement les forces du mal devant lesquelles les hommes devront se positionner, pour ou contre, et pourront ainsi être jugés par Jésus-Christ revenant dans la gloire. Tous le verront ; son retour n’est pas matériel, il ne va pas exercer un pouvoir militaire mais une attraction d’amour.

Jésus reviendra pour une « restauration » et une « régénération » (Mt 19, 28 ; Ac 3, 21), accomplissant le règne de Dieu « sur la terre comme au ciel » (Mt 6, 10), avant de « remettre » le royaume au Père (1Co 15, 22-28).

Au moment de la Venue glorieuse de Jésus, ceux qui se seront fixés dans le mal n’auront plus le droit de vivre sur la Terre : c’est ce que l’Apocalypse dit en parlant de la Bête et du faux prophète. Seuls ceux qui veulent le règne de Dieu pourront vivre sur la Terre, et ils vivront en étant vivifiés par le Seigneur, le but de la création pourra alors s’accomplir (Ap 21). L’univers doit accomplir son but ! Avant son assomption finale, l’humanité doit atteindre la noblesse extraordinaire pour laquelle elle a été créée !

Deuxième lecture (2 Tm 2, 8-13)

Bien-aimé, souviens-toi de Jésus-Christ, ressuscité d’entre les morts, le descendant de David : voilà mon évangile. C’est pour lui que j’endure la souffrance, jusqu’à être enchaîné comme un malfaiteur. Mais on n’enchaîne pas la parole de Dieu ! C’est pourquoi je supporte tout pour ceux que Dieu a choisis, afin qu’ils obtiennent, eux aussi, le salut qui est dans le Christ Jésus, avec la gloire éternelle. Voici une parole digne de foi : Si nous sommes morts avec lui, avec lui nous vivrons. Si nous supportons l’épreuve, avec lui nous régnerons. Si nous le rejetons, lui aussi nous rejettera. Si nous manquons de foi, lui reste fidèle à sa parole, car il ne peut se rejeter lui-même. – Parole du Seigneur. 

La seconde Lettre à Timothée est traditionnellement considérée comme le « testament spirituel » de l’apôtre Paul, écrit alors qu’il est en prison à Rome, attendant probablement son procès et sa condamnation. Ce passage (2 Tm 2, 8-13) se situe dans un développement où Paul exhorte son disciple à persévérer dans la fidélité, malgré les épreuves et les oppositions.

« Souviens-toi de Jésus-Christ, ressuscité d’entre les morts, le descendant de David : voilà mon Évangile. » (v. 8)

Le premier mot est « Souviens-toi ». La mémoire est fondamentale : elle n’est pas simple rappel intellectuel, mais actualisation vivante. Le Christ dont il faut se souvenir est défini par deux affirmations : « ressuscité d’entre les morts » et « descendant de David ». La première affirme la victoire définitive sur la mort ; la seconde rappelle l’enracinement historique et messianique du Christ. L’Évangile ne sépare pas la gloire de la résurrection de l’humilité de l’Incarnation.

Dans son commentaire, saint Augustin insiste sur la mémoire de Jésus ressuscité comme le fondement de la persévérance. Pour lui, la résurrection est la clé qui donne sens aux souffrances présentes : « Souviens-toi de Jésus-Christ ressuscité d’entre les morts. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que nous devons toujours garder dans le cœur la victoire du Christ, pour ne pas être abattus par les épreuves. Car si lui est ressuscité, nous aussi nous ressusciterons avec lui. C’est cette mémoire qui soutient l’espérance, qui rend légère la souffrance et qui rend possible la patience. » (Sermon 232, 3)

Saint Paul : « C’est pour lui que j’endure la souffrance, jusqu’à être enchaîné comme un malfaiteur. Mais on n’enchaîne pas la parole de Dieu ! » (v. 9)

Saint Paul témoigne de sa condition de prisonnier. Mais ses chaînes ne sont pas une défaite : elles deviennent le signe de la puissance de la Parole qui, elle, demeure libre et active. On retrouve ici une conviction constante de Paul : l’apôtre peut être abattu, mais l’Évangile continue sa course (cf. Ph 1,12-14).

Saint Ambroise écrit : « L’apôtre souffre comme un malfaiteur, mais il ne cesse pas de servir. Car la charité ne se laisse pas enchaîner. Et si le ministre est emprisonné, l’Évangile n’est pas prisonnier. Ainsi l’exemple de Paul nous apprend que les liens corporels ne détruisent pas la liberté intérieure, mais l’accroissent. » (De officiis I, 41)

Saint Augustin souligne aussi le contraste entre les chaînes de Paul et la liberté de l’Évangile : « Paul est lié, mais la parole de Dieu ne l’est pas. Les chaînes des hommes ne peuvent pas enchaîner Dieu. Les prisons du monde enferment les serviteurs, mais le Maître demeure libre, et sa parole court plus vite que jamais. » (Enarr. in Ps. 95, 15)

La force de la Lettre de Paul demeure vive au long des siècles.

Saint John Henry Newman rappelait : « La croix du Christ nous montre que la souffrance n’est pas une défaite mais une victoire ; que les chaînes de l’apôtre, loin d’être une honte, sont l’instrument par lequel la Parole de Dieu se répand plus librement encore. » (Sermon, 1831).

Saint Oscar Romero, peu avant son martyre, proclamait : « On peut tuer le messager, mais la Parole de Dieu que je prêche ne sera pas enchaînée. »

Et Benoît XVI commentait : « Les chaînes de Paul deviennent un signe de fécondité. En étant lié, il a rendu témoignage au Christ avec plus de force, et sa parole a été libérée pour atteindre les peuples. » (Homélie du 29 juin 2008).

Saint Paul : « C’est pourquoi je supporte tout pour ceux que Dieu a choisis, afin qu’ils obtiennent, eux aussi, le salut qui est dans le Christ Jésus, avec la gloire éternelle. » (v. 10).

La souffrance de Paul a une dimension pastorale : elle est offerte pour les autres, pour la communauté appelée au salut. Le modèle est celui du Christ qui a souffert pour les autres. L’apôtre devient coopérateur de ce salut, non en se substituant au Christ, mais en configurant sa vie à celle du Maître. Saint Jean Chrysostome insiste sur la fécondité de la souffrance apostolique : « Voyez comme Paul se glorifie de ses chaînes ! Il est enchaîné comme un malfaiteur, mais il n’a commis aucun crime. C’est pour le Christ qu’il souffre, et sa prison devient un trône plus éclatant que les palais. Et parce qu’il souffre pour les élus, il montre que sa douleur n’est pas inutile : elle produit le salut des autres. » (Homélie sur 2 Tm, PG 62, 612)

Saint Paul : « Voici une parole digne de foi : Si nous sommes morts avec lui, avec lui nous vivrons. Si nous supportons l’épreuve, avec lui nous régnerons. Si nous le rejetons, lui aussi nous rejettera. Si nous manquons de foi, lui reste fidèle à sa parole, car il ne peut se rejeter lui-même. » (v. 11-13).

Le dernier verset est capital, il exprime le cœur de l’espérance chrétienne : même au milieu des épreuves et de nos faiblesses, le Christ reste fidèle.

Bienheureux Charles de Foucauld priait : « Mon Père, je m’abandonne à toi, fais de moi ce qu’il te plaira… j’accepte tout. »

Saint José Maria Escrivá conseillait : « Supporte ce que Dieu veut, comme Dieu veut, tant que Dieu veut. » (Chemin, 172).

Sainte Mère Teresa de Calcutta affirmait : « La fidélité ne se mesure pas à la grandeur de ce que nous faisons, mais à l’amour avec lequel nous le faisons. Dieu ne peut pas se renier lui-même : il est amour, et il reste fidèle. »

Madeleine Delbrêl, au XXᵉ siècle, écrivait : « Croire, c’est s’accrocher au Christ même quand tout s’écroule, c’est tenir bon même quand nous sommes infidèles, parce que lui ne peut se renier lui-même. »

Cette deuxième lecture concentre ainsi l’essentiel de l’Évangile : la vie chrétienne est à la fois mémoire, combat et espérance. Mémoire de Jésus ressuscité, combat dans les épreuves pour les autres, espérance dans la fidélité invincible de Dieu.

Évangile (Lc 17, 11-19)

La traduction est faite depuis la Pshitta – En araméen il n’existe pas de shewa comme en hébreu (ce qui donnerait Peshitta), je dis donc Pshitta. Et le commentaire est extrait de : Françoise BREYNAERT, L’évangile selon saint Luc, un collier d’oralité en pendentif en lien avec le calendrier synagogal. Imprimatur. Préface Mgr Mirkis (Irak). Parole et Silence, Paris 2024.

« 11 Et il advint, tandis que Jésus, allant à Jérusalem, / traversait la Samarie vers la Galilée,

12 alors qu’il était proche d’entrer dans un village, / vinrent à sa rencontre dix lépreux.
Ils se levèrent, / à distance,
et ils élevèrent la voix / en disant :
13 ‘Notre Rabbi Jésus, / aie pitié de nous !’

14 Et, les ayant vus, / il leur dit :
‘Allez, / montrez-vous aux prêtres !

Et, pendant qu’ils y allaient, / ils furent purifiés.

15 Or, l’un deux, se voyant purifié, / revint vers lui,
et, à haute voix, / il glorifiait Dieu.
16 Et il tomba sur sa face aux pieds de Jésus, / en le remerciant.
Et c’était, celui-ci, / un Samaritain.

17 Or Jésus répondit / et dit :
‘N’étaient-ils pas dix, ceux qui ont été purifiés ? / Où sont les neuf [autres] ?
18 Personne n’a choisi de revenir / rendre gloire à Dieu,
sauf celui-ci / qui est d’un peuple étranger ?

19 Et il lui dit :
‘Lève-toi, va ; / ta foi t’a sauvé [vivifié] !’ »

Globalement, le trajet de Jésus part de la Galilée, traverse la Samarie, et atteint Jérusalem ; mais dans un pays de collines, le trajet fait des contours. « Tandis que Jésus, allant vers Jérusalem, traversait la Samarie vers la Galilée » (Lc 17, 11). Symboliquement, Jésus va à la fois vers Jérusalem et vers la Galilée : il va à la fois vers le Père (par sa mort et son Ascension), et vers le monde (la Galilée des nations, l’expansion missionnaire).

« 12 alors qu’il était proche d’entrer dans un village, / vinrent à sa rencontre dix lépreux.
Ils se levèrent, / à distance,
et ils élevèrent la voix / en disant :
13 ‘Notre Rabbi Jésus, / aie pitié de nous !’
 »

Les lépreux se tenaient à la distance que les bien-portants leur ont imposée. La lèpre affaiblit la voix des malades, et l’on imagine l’effort avec lequel « ils élevèrent la voix » (v. 12) pour demander « aie pitié de nous » (v. 13).

Moïse préconisait un rituel en cas de guérison, en s’y conformant, le lépreux guéri était déclaré pur et réintégré dans sa famille (Lv 24). En les envoyant se montrer aux prêtres pour ce rituel avant leur guérison, Jésus teste leur foi en son pouvoir.

« 14 Et, les ayant vus, / il leur dit :
‘Allez, / montrez-vous aux prêtres !

Et, pendant qu’ils y allaient, / ils furent purifiés.s ».

Le 10e lépreux fait alors un choix : au lieu de se conformer à la loi (Lv 24), il retourne vers Jésus, et Jésus dit simplement qu’il a choisi de « rendre gloire à Dieu », sans référence au Temple ni au sacerdoce lévitique. L’attitude de ce lépreux samaritain est plus archaïque et reflète celle des grands personnages du livre de la Genèse, Abel et Noé, Melchisédech et les patriarches.

« 15 Or, l’un deux, se voyant purifié, / revint vers lui,
et, à haute voix, / il glorifiait Dieu.
16 Et il tomba sur sa face aux pieds de Jésus, / en le remerciant.
Et c’était, celui-ci, / un Samaritain.

17 Or Jésus répondit / et dit :
‘N’étaient-ils pas dix, ceux qui ont été purifiés ? / Où sont les neuf [autres] ? 
».

Le geste d’abaissement du lépreux guéri rappelle, dans la perle correspondante du collier compteur de l’évangile de Luc, Jean-Baptiste qui désignait Jésus « Celui dont je ne suis pas digne de délier les courroies de ses sandales ! » (Lc 3, 16), ajoutant : « il purifie [racine ḏkᵓ] ses aires et rassemble [racine knš] le blé dans son grenier » (Lc 3, 17 collier compteur), ce que saint Augustin commentait comme une annonce de ce qui adviendra à la Parousie : « C’est sur cette terre effectivement que l’Église apparaîtra d’abord environnée d’une gloire immense, revêtue de dignité et de justice. Point de déception alors, point de mensonge, point de loup caché sous une peau de brebis. […] Dans ce moment donc il n’y aura plus de méchants, ils seront séparés d’avec les bons ; et, semblable à un monceau de froment qu’on voit sur l’aire encore, mais parfaitement nettoyé, la multitude des saints sera placée ensuite dans les célestes greniers de l’immortalité » (Saint AUGUSTIN, Sermon 259).

Pour reprendre l’évangile de la purification de la lèpre, Jésus commence son œuvre de purification de la terre, et il l’achèvera lors du « jour du Fils de l’homme », c’est-à-dire sa Venue glorieuse.  Et quand Jésus s’interroge : « n’étaient-ils pas dix, ceux qui ont été purifiés ? Où sont les neuf [autres] ? » (Lc 17, 17), il a en vue l’accomplissement du dessein du Créateur par le rassemblement [racine knš] des « purifiés [racine ḏkᵓ] » lors de la Parousie ; mais cet accomplissement est mis en échec si ceux qui sont purifiés ne restent pas unis à Jésus.

« N’étaient-ils pas dix, ceux qui ont été purifiés ? / Où sont les neuf [autres] ?» (v. 17). Les autres lépreux sont allés se montrer aux prêtres dans le but d’être réintégrés à la société, et il n’est pas certain qu’ils se soient attachés au donateur plus qu’aux dons… Or il faut instaurer une relation avec le Dieu vivant pour en recevoir un influx vivifiant permanent, comme le dit Jésus à ce 10e lépreux : « ta foi t’a sauvé [vivifié] !’» (Lc 17, 19).

« 18 Personne n’a choisi de revenir / rendre gloire à Dieu,
sauf celui-ci / qui est d’un peuple étranger ?

19 Et il lui dit :
‘Lève-toi, va ; / ta foi t’a sauvé [vivifié] !’ »

La méditation en fil d’oralité enrichit encore notre méditation. Un des lépreux guéris n’était pas soucieux de lui-même puisqu’il ne se précipita pas vers la reconnaissance officielle lui rendant une vie sociale, il choisit de revenir vers Jésus et Jésus lui dit : « ta foi t’a vivifié [sauvé] » (Lc 17, 18-19 perle 5) ; un peu plus tard, Jésus dit : « Celui qui se perdra se sauvera [vivifiera] » (Lc 17, 33 perle 7) et le fil s’achève avec des considérations sur le renoncement, prix de la vivification et de la vie qui est pour toujours (Lc 18, 26.30 perle 10).

Origène explique : « La lèpre figure le péché qui défigure l’homme, et c’est pourquoi ils ne pouvaient s’approcher de Jésus. Mais, en criant vers lui, ils invoquent la miséricorde. Et Jésus leur dit : Allez vous montrer aux prêtres. Car, selon la Loi, les prêtres devaient constater la guérison. En y allant, ils furent purifiés. Cela signifie que l’obéissance à la parole de Jésus purifie le pécheur.

Cependant, tous ne furent pas sauvés. Car dix furent guéris dans leur corps, mais un seul fut sauvé dans son âme. Les neuf, appartenant au peuple juif, n’ont pas reconnu celui qui les avait guéris. Un seul, qui était Samaritain, c’est-à-dire étranger, revint glorifier Dieu. Ainsi est préfiguré le mystère des nations qui, ayant reçu la guérison spirituelle, rendent gloire à Dieu par le Christ. Remarque encore que Jésus dit au Samaritain : Ta foi t’a sauvé. Non pas seulement la purification extérieure, mais la foi intérieure qui le rend juste devant Dieu. Les autres ont reçu un bienfait passager, celui-là a reçu la vie éternelle. Car la reconnaissance et l’action de grâce sont la plénitude de la foi. » (Origène — Homélies sur l’Évangile de Luc, 34).

Mémorisons :

« Or, l’un deux, se voyant purifié, / revint vers lui,

et, à haute voix, / il glorifiait Dieu.

Et il tomba sur sa face aux pieds de Jésus, / en le remerciant.

Jésus lui dit : […] ‘Lève-toi, va ; / ta foi t’a sauvé [vivifié] !’ »

Date de dernière mise à jour : 15/09/2025