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Pâques (année C)
Podcast sur : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#
Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30.
Première lecture (Ac 10, 34a.37-43)
Psaume (Ps 117 (118), 1.2, 16-17, 22-23)
Deuxième lecture
Séquence de Pâques
Évangile
Au choix, le matin de Pâques (Jn 20, 1-9)
Pour la messe du soir de Pâques, on peut aussi lire Lc 24, 13-35
Première lecture (Ac 10, 34a.37-43)
En ces jours-là, quand Pierre arriva à Césarée chez un centurion de l’armée romaine, il prit la parole et dit : « Vous savez ce qui s’est passé à travers tout le pays des Juifs, depuis les commencements en Galilée, après le baptême proclamé par Jean : Jésus de Nazareth, Dieu lui a donné l’onction d’Esprit Saint et de puissance. Là où il passait, il faisait le bien et guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du diable, car Dieu était avec lui. Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu’il a fait dans le pays des Juifs et à Jérusalem. Celui qu’ils ont supprimé en le suspendant au bois du supplice, Dieu l’a ressuscité le troisième jour. Il lui a donné de se manifester, non pas à tout le peuple, mais à des témoins que Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts. Dieu nous a chargés d’annoncer au peuple et de témoigner que lui-même l’a établi Juge des vivants et des morts. C’est à Jésus que tous les prophètes rendent ce témoignage : Quiconque croit en lui reçoit par son nom le pardon de ses péchés. » – Parole du Seigneur.
Tout d’abord, qui est ce centurion ? « Pieux et craignant Dieu, ainsi que toute sa maison, il faisait de larges aumônes au peuple juif et priait Dieu sans cesse. Il eut une vision. Vers la neuvième heure du jour, l’Ange de Dieu -- il le voyait clairement -- entrait chez lui et l’appelait : "Corneille !" Il le regarda et fut pris de frayeur. "Qu’y a-t-il, Seigneur ?" Demanda-t-il. -- "Tes prières et tes aumônes, lui répondit l’ange, sont montées devant Dieu, et il s’est souvenu de toi. Maintenant donc, envoie des hommes à Joppé et fais venir Simon, surnommé Pierre. » (Ac 10, 1-5)
Par les paroles qu’à Césarée Pierre adressa au centurion Corneille et aux païens qui se trouvaient avec lui - c’était la première fois que la parole de Dieu était annoncée à des païens -, nous pouvons savoir ce qu’annonçaient les apôtres, quelle était leur prédication et quelle doctrine ils avaient sur Dieu. C’est très intéressant pour notre époque où tantôt on parle de Jésus d’une manière trop humaine, tantôt on parle d’un Christ éthéré, cosmique, qui ne signifie rien. Saint Irénée observait :
« Les paroles de Pierre indiquait clairement que le Dieu que Corneille craignait déjà auparavant, dont il avait été instruit par la Loi et les prophètes et à cause de qui il faisait ses aumônes, celui-là était véritablement Dieu. Mais il manquait à Corneille la connaissance du Fils. […] C’est donc le Fils de Dieu et sa venue, encore ignorés des hommes, qu’annonçaient les apôtres à ceux qui avaient déjà été instruits sur Dieu. […] Il leur a attesté que Jésus-Christ est le Fils de Dieu, le Juge des vivants et des morts - ce Jésus-Christ même en qui il commanda de les baptiser pour la rémission des péchés -; et non seulement cela, mais il a attesté aussi que c’est bien Jésus lui-même qui est le Fils de Dieu, ce Jésus qui, pour avoir été oint par l’Esprit Saint, est appelé Jésus-Christ [Christ est le mot grec, Messie est le mot hébreu, et ces deux mots signifient qu’il a reçu l’onction de l’Esprit Saint]. Et c’est ce même Jésus qui est né de Marie [à Nazareth], comme l’implique le témoignage de Pierre. » (Irénée, Contre les Hérésies Liv.3 ch.12)
Le début de l’évangile selon saint Luc nous présente la conception de Jésus à Nazareth, sa naissance à Bethléem, puis sa croissance à Nazareth. Il reçoit ensuite le baptême de Jean-Baptiste, et, à cette occasion, l’Esprit Saint se manifeste. Jésus est appelé Christ ou Messie parce qu’il est oint de l’Esprit Saint. Aussitôt, il est conduit par l’Esprit au désert, et, après avoir vaincu les tentations, Jésus est dans « la force (la puissance) de l’Esprit » (Lc 4, 14). « Jésus, dans la puissance [bḥaylā] de l’Esprit, retourna en Galilée » (Lc 4, 14). C’est alors que commence sa vie publique, durant laquelle « il faisait le bien et guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du diable, car Dieu était avec lui » comme le résume le discours de Pierre chez Corneille. L’œuvre du salut trouve son accomplissement dans la Passion de Jésus, sa mort et donc sa visite au séjour des morts, et sa résurrection.
Il n’a versé le sang de personne, lui seul peut être le Juge des vivants et des morts.
Comme l’évangile selon saint Luc, les Actes des apôtres sont un collier en pendentif : avec un collier compteur qui introduit chaque partie. Ainsi, dans le collier compteur, nous trouvons, en Ac 2, 14-47, le premier discours de Pierre, le baptême de 3000 personnes et une présentation de la première communauté. Et cela introduit un fil d’oralité, le second, où nous trouvons un autre discours de Pierre suivi d’autres baptêmes, dans une partie que l’on délimiter depuis Ac 9, 1 jusque 12, 24 et qui raconte ceci : Saul persécute les chrétiens puis il est aveuglé sur le chemin de Damas, Ananie le guérit, le baptise, et Barnabé le présente aux apôtres. Pierre guérit Enéas à Lod, puis il ressuscite Tabitha. Vient alors la vision de Corneille, la venue et le discours de Pierre chez Corneille (Ac 10, 34-44) suivi du baptême des premiers païens ; ensuite c’est la fondation de l’Église d’Antioche, l’arrestation de Pierre et sa délivrance par un ange ; et finalement la mort d’Hérode.
Comme l’évangile selon saint Luc, les Actes des apôtres se lisent en parallèle avec les lectures de la Torah dans le calendrier synagogal, en commençant après Pâques par le Lévitique. C’est ainsi que l’histoire du baptême de Corneille suit l’ordre du livre des Nombres, il est dit que c’est « l’ange qui nous a fait sortir d’Égypte » (Nb 20, 16) or, c’est « l’Ange de Dieu » qui s’adressa à Corneille pour qu’il appelle Pierre (Ac 10, 1-8) ; et, à une autre occasion, ce fut « l’ange du Seigneur » qui fit sortir Pierre de prison (Ac 12, 16). En vision, Pierre refuse de consommer des animaux impurs (Ac 10, 12-14, cf. Lv 11, 1-23), mais une voix céleste le corrige : « ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé » (Ac 10, 15). En fait, ce n’est pas le livre du Lévitique qui éclaire ce passage, mais le livre des Nombres, où l’on voit que le contact avec des païens, en l’occurrence avec les Madianites lors d’une campagne militaire, peut être purifié par le feu ou par l’eau lustrale (Nb 31, 23). Corneille était « pieux et craignant Dieu, ainsi que toute sa maison, il faisait de larges aumônes au peuple juif et priait Dieu sans cesse » (Ac 10, 2), son désir l’avait ouvert au feu de l’Esprit Saint et à l’eau du baptême. C’est ainsi que s’accomplit le livre des Nombres. Il est important de considérer que les apôtres enseignaient dans les synagogues donc en écho avec les lectures synagogales.
Au moment des apparitions du ressuscité, Jésus peut manger (Lc 24, 43 ; et dans la lecture de ce jour : « nous qui avons mangé et bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts » (Ac 10, 41). De même, lors de son retour glorieux, qui sera comme une apparition du Christ ressuscité que tout le monde verra, il pourra aussi manger, comme il l’a annoncé lors de la dernière Cène, où saint Luc nous dit :
« 17 Et, il prit la coupe et rendit grâces, / et dit :
‘Prenez ceci, / et partagez entre vous ;
18 car, je vous le dis, je ne boirai plus désormais du fruit de la vigne, / jusqu’à ce que vienne le royaume de Dieu » (Lc 22, 17-18).
Psaume (Ps 117 (118), 1.2, 16-17, 22-23)
Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour ! Oui, que le dise Israël : Éternel est son amour ! Le bras du Seigneur se lève, le bras du Seigneur est fort ! Non, je ne mourrai pas, je vivrai, pour annoncer les actions du Seigneur. La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle : c’est là l’œuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux.
En ce temps de printemps, que de belles choses à regarder, un bourgeon, une fleur, les étoiles… Et nous qui sommes sur la terre, dans cet univers immense, que faisons-nous. Où allons-nous ?
Les 40 jours du carême sont terminés. Les 40 jours du temps pascal jusqu’à l’Ascension commencent.
40 jours comme les 40 jours du déluge après lequel la vie sur la terre reprit, sur une terre purifiée de tous les malfaisants, de toute iniquité. Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour ! Le bras du Seigneur se lève, le bras du Seigneur est fort ! Non, je ne mourrai pas, je vivrai, pour annoncer les actions du Seigneur.
40 jours comme les 40 jours de Moïse au Sinaï au terme desquels il reçut la révélation de la Loi divine. Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour !
40 jours comme les 40 jours du prophète Élie à l’Horeb, au terme desquels il entendit le murmure d’une brise légère. Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour !
Au terme de la semaine sainte, au matin de Pâques, une phrase de ce psaume 117 nous donne une émotion particulière parce qu’elle retentit au sein du Nouveau Testament avec une nouvelle intensité. "La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la tête de l’angle". La phrase est rappelée par Pierre dans les Actes des Apôtres : "C’est lui la pierre que vous, les bâtisseurs, avez dédaignée, et qui est devenue la pierre d’angle. Car il n’y a pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés" (Ac 4, 11-12).
Cette phrase du psaume 117 est aussi citée par Jésus, qui l’applique à sa mission de mort et de gloire, après avoir raconté la parabole des vignerons homicides :
« 9 Et il se mit à dire au peuple cette parabole :
"Un homme planta une vigne,
et il la fit entretenir par des vignerons / et partit au loin, longtemps.
10 Et, le moment venu, il envoya son serviteur aux vignerons / pour qu’ils lui donnent du fruit de la vigne ;
mais les vignerons le frappèrent / et le renvoyèrent à vide.
11 Il recommença, / envoyant son autre serviteur ;
or eux, / celui-là aussi,
ils le frappèrent, le bafouèrent, / et le renvoyèrent à vide.
12 Il recommença, / et en envoya un troisième ;
or eux, / celui-là aussi,
ils le blessèrent / et le firent sortir.
13 Le seigneur de la vigne dit alors : / ‘Que vais-je faire ?
J’enverrai… / mon fils bien-aimé !
Peut-être que… / quand ils le verront, ils le respecteront’.
14 Or les vignerons, / l’ayant vu,
calculaient en eux-mêmes / en disant :
‘C’est lui / l’héritier !
Venez, / tuons-le,
et l’héritage / sera à nous !’.
15 Et, ils le firent sortir hors de la vigne, / et le tuèrent.
Que fera d’eux par conséquent / le maître de la vigne ?
16 Il viendra faire périr ces vignerons / et donnera la vigne à d’autres !"
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Or, l’ayant entendu, / ils dirent :
‘Que cela / ne soit pas !’
17 Or, lui, il les fixa du regard, / et dit :
‘Pourquoi y a-t-il / cette écriture :
La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs, / c’est elle qui est devenue la principale de la corne d’angle ?
18 Et tout un chacun qui tombera sur cette pierre / sera brisé ;
et celui sur qui elle tombera, / elle le dispersera.
19 Or, les grands prêtres et les scribes / cherchèrent à porter la main sur lui,
en cette heure, / mais ils redoutèrent le peuple.
Ils surent, en effet, / que c’était contre eux qu’il avait dit cette parabole. » (Lc 20, 9-19).
En citant le psaume (Ps 118 (117), 22), Jésus parle de lui-même et se compare à la pierre rejetée qui est pourtant la principale, ou première pierre (Lc 20, 17).
Par association d’idées, Jésus se compare ensuite à une pierre telle que « tout un chacun qui tombera sur cette pierre sera brisé [passif uniquement] » (Lc 20, 18), c’est l’image des vignerons qui en quelque sorte tombent sur le fils pour le tuer (Lc 20, 15). Et « celui sur qui elle tombera, elle le dispersera [ventilera] » (Lc 20, 18), en araméen, le verbe « ḏrā » connote l’idée du vent qui disperse ; l’image est ici celle du songe de Baltassar : « soudain une pierre se détacha, sans que main l’eût touchée, et vint frapper la statue, ses pieds de fer et d’argile, et les brisa. Alors se brisèrent, tout à la fois, fer et argile, bronze, argent et or, devenus semblables à la bale sur l’aire en été ; le vent les emporta sans laisser de traces. Et la pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne qui remplit toute la terre » (Dn 2, 34-35) et Daniel en donne l’explication : « le Dieu du Ciel dressera un royaume qui jamais ne sera détruit, et ce royaume ne passera pas à un autre peuple. Il écrasera [daqeq] et anéantira tous ces royaumes, et lui-même subsistera à jamais : de même, tu as vu une pierre se détacher de la montagne, sans que main l’eût touchée, et réduire en poussière fer, bronze, terre cuite, argent et or » (Dn 2, 44-45).
Cette pierre qui se détache du ciel, sans qu’une main ne l’ait touchée, c’est Jésus en sa conception virginale, évoqué dans le collier compteur de l’évangile de Luc par son lien direct avec « le ciel » d’où retentit une voix qui dit : « Tu es mon fils bien-aimé, en toi je me suis complu ! » et par la précision qu’il n’est pas le fils de Joseph, c’est seulement « ce qu’on pensait » (Lc 3, 22-23). La tradition de l’Église se souviendra du lien entre l’image de la pierre et la généalogie de Jésus. On lit par exemple : « Quelle est cette montagne de Daniel, dont la pierre d’angle, le Christ, fut détachée, sans intervention d’un instrument humain (Da 2, 34.44) ? N’est-ce point toi, qui conçus virginalement et restas toujours vierge » (Saint JEAN DAMASCÈNE, Première homélie sur la Dormition § 9) ; ou « [Jésus est cette pierre] détachée du royaume des Juifs, et qui vint sans la main d’un homme, parce que nul homme n’eut part à cet enfantement de Marie qui mit au monde Jésus-Christ » (Saint AUGUSTIN, Sur les Psaumes, 48)
Alors, chers auditeurs, en ce jour de Pâques, choisissez le Christ, faites-en la pierre d’angle de ce que vous construirez tout au long de votre vie. Ne le rejetez pas de vos pensées, ne le rejetez pas de vos calculs. Comme le dit l’évangile de Luc, il est aussi la pierre, et ce sera au moment du retour du Christ, qui, venant du ciel, pulvérisera ce qui n'est pas de lui. Choisissez le Christ, il est la vie, il est la Résurrection et la Vie.
Deuxième lecture
Au choix : Col 3, 1-4
Frères, si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu. Pensez aux réalités d’en haut, non à celles de la terre. En effet, vous êtes passés par la mort, et votre vie reste cachée avec le Christ en Dieu. Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire. – Parole du Seigneur.
Saint Paul dit que nous sommes passés par la mort et ressuscités avec le Christ, mais c’est une manière de dire, bien évidemment nous allons encore mourir et vivre une résurrection comme le Christ. Ce que saint Paul veut dire c’est que nous devons penser aux réalités d’en haut : par exemple, l’aumône matérielle qu’on fait à un pauvre, c’est au créateur de l’Univers qu’on la fait, le bien qu’on fait à l’âme d’un pécheur, c’est à la pureté incréée qu’on le fait… Et quand saint Paul ajoute « Quand paraîtra le Christ, votre vie, alors vous aussi, vous paraîtrez avec lui dans la gloire », il pense au retour glorieux du Christ. Aux Thessaloniciens, il écrit : « Qu’il fortifie vos cœurs pour que vous soyez dans une sainteté irréprochable devant Dieu notre Père, lors de la venue de notre Seigneur avec ses saints » (1Th 3, 13). C’est aussi ce que veut dire l’Apocalypse en parlant de l’armée du ciel accompagnant le Verbe de Dieu : « Les armées du ciel le suivaient sur des chevaux blancs, vêtues de lin d’une blancheur parfaite » (Ap 19, 14) ou en parlant de la première résurrection, celle des martyrs ou de ceux qui refusèrent simplement « le signe de la Bête » et dont il est écrit qu’ils « règnent avec le Christ mille années » (Ap 20, 4). Il s’agit d’apparitions, celles des saints qui accompagneront le Christ dans sa manifestation glorieuse. Ceux qui meurent actuellement en état de sainteté participeront donc aussi au Royaume des justes, ils y régneront à la manière du Christ ressuscité apparaissant à ses amis.
Saint Charles de Foucault écrivait à sa sœur, (Nazareth, 21 juillet 1899)
N’attachons pas d’importance aux événements de cette vie ni aux choses matérielles : ce sont les rêves de notre nuit d’auberge, cela passera aussi vite que des songes et sans laisser plus de traces… Qu’est-ce qui nous reste à l’heure de la mort, sinon nos mérites et nos péchés ? Voyons les choses comme elles sont, à cette grande lumière de la foi qui éclaire nos pensées d’un jour si lumineux, qui nous fait voir les choses d’un œil si différent de celui de ces pauvres âmes mondaines…. Comme la foi, l’habitude de regarder les choses à la lumière de la foi, nous élève au-dessus du brouillard et de la boue de ce monde. Comme cela nous met dans une autre atmosphère, en plein soleil, en plein rayonnement, dans un calme serein, dans une paix lumineuse au dessus de la région des nuages, des vents et des tempêtes, hors de la zone du crépuscule et de la nuit… Vivons de foi, croyons ce que nous espérons dans la grâce, en attendant que nous le possédions dans la gloire, et aimons Celui qui sera notre récompense infiniment grande, en tous les instants de notre existence, dans le temps et dans l’éternité !...
Ou 1Co 5, 6b-8
« Frères, ne savez-vous pas qu’un peu de levain suffit pour que fermente toute la pâte ? Purifiez-vous donc des vieux ferments, et vous serez une pâte nouvelle, vous qui êtes le pain de la Pâque, celui qui n’a pas fermenté. Car notre agneau pascal a été immolé : c’est le Christ. Ainsi, célébrons la Fête, non pas avec de vieux ferments, non pas avec ceux de la perversité et du vice, mais avec du pain non fermenté, celui de la droiture et de la vérité. » – Parole du Seigneur.
Saint Charles de Foucault écrivait à sa soeur (Nazareth, le 13 octobre 1899)
« … Je bénis Dieu de ce qu’il te donne encore un enfant, encore une âme, un saint : quel bonheur et quel honneur ! … Sous la protection de quel habitant des cieux mettrez-vous cet enfant béni ? Oui, ma chérie, je prie, je prierai de plus en plus pour toi. Surtout, ne te tracasse pas ! Surtout ne t’inquiète pas ! ... Sois simple, oui, évite toute dépense inutile, oui, écarte-toi de plus en plus, dans ta manière d’être et de vivre, de tout ce qui sent le monde, la vanité, l’orgueil…, folies qui ne servent qu’à diminuer notre gloire future au ciel, qu’à prolonger notre purgatoire… Oui, supprime tout l’inutile, tout ce qui sent le monde… Mais ne te tracasse pas, ne crains pas pour l’avenir…
Ne supprime rien, rien, rien de ce qui peut contribuer à la bonne éducation morale et intellectuelle de tes enfants, ni rien non plus de ce qui peut être utile à ton progrès spirituel intérieur, à toi ; pas d’économies de bons livres… si les âmes consacrées à Dieu, les moines qui pensent à la perfection du matin au soir, sentent, jusqu’à la fin de leur vie, le besoin de lire et relire les ouvrages des maîtres de la vie spirituelle, les vies des saints leurs devanciers, combien plus en a-t-on besoin quand on vit dans le monde, au milieu de tant d’occupations distrayantes ? Pas d’économie dans les aumônes ; ne supprime rien de ce côté, augmente au contraire : Donnez et on vous donnera…, la mesure que vous ferez aux autres, on vous la fera…
Et puis, confiance : ‘Celui qui donne la vie, donnera aussi la nourriture…Cherchez le royaume de Dieu et sa justice (c’est-à-dire la perfection), le reste vous sera donné par surcroit. C’est dit pour tous les chrétiens et non pas pour les seuls moines... Confiance, confiance... ! Oh, garde-toi de toute inquiétude ; élève bien tes enfants pour le bon Dieu… et le bon Dieu arrangera tout leur avenir cent mille fois mieux que tu ne saurais le faire, et que ne pourraient le faire tous les hommes réunis »
Séquence de Pâques
La séquence de Pâques souligne le duel prodigieux où la vie et la mort se sont affrontés. Cette idée de lutte se retrouve en effet dans l’évangile selon saint Luc où la Passion du Christ a été mise en relation avec ses tentations au désert. Jésus a vaincu le mal et la mort, dont le livre de la Sagesse nous apprend qu’elle a été introduite dans le monde par l’envie de Satan. Il a vaincu, il a été victorieux, il nous a ouvert le chemin de la vie éternelle :
« À la Victime pascale, chrétiens, offrez le sacrifice de louange. L’Agneau a racheté les brebis ; le Christ innocent a réconcilié l’homme pécheur avec le Père. La mort et la vie s’affrontèrent en un duel prodigieux. Le Maître de la vie mourut ; vivant, il règne. – Dis-nous, Marie Madeleine, qu’as-tu vu en chemin ? – J’ai vu le sépulcre du Christ vivant, j’ai vu la gloire du Ressuscité. J’ai vu les anges ses témoins, le suaire et les vêtements. Le Christ, mon espérance, est ressuscité ! Il vous précédera en Galilée. – Nous le savons : le Christ est vraiment ressuscité des morts. Roi victorieux, prends-nous tous en pitié ! Amen ».
Évangile
Au choix, le matin de Pâques (Jn 20, 1-9)
Le premier jour de la semaine, Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ; c’était encore les ténèbres. Elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau. Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé. » Pierre partit donc avec l’autre disciple pour se rendre au tombeau. Ils couraient tous les deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ; cependant il n’entre pas. Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau ; il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place. C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut. Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts. – Acclamons la Parole de Dieu.
Pour la messe du soir de Pâques, on peut aussi lire Lc 24, 13-35
Et comme c’est l’année saint Luc, c’est le texte que nous allons lire et méditer.
Extrait de : Françoise BREYNAERT, L’évangile selon saint Luc, un collier d’oralité en pendentif en lien avec le calendrier synagogal. Imprimatur. Préface Mgr Mirkis (Irak). Parole et Silence, 2024. (472 pages).
« 13 Et voici que deux d’entre eux / en ce même jour,
allaient à un village du nom d’Emmaüs, / distant de Jérusalem de 60 stades,
14 et eux ils parlaient, / l’un avec l’autre,
de toutes ces choses-ci / qui étaient arrivées.
15 Et tandis qu’eux parlaient / et se questionnaient l’un l’autre
lui, Jésus, il vint et les rejoignit, / et il marchait avec eux ;
16 Et leurs yeux étaient aveuglés / de sorte qu’ils ne le reconnurent pas.
17 Et il leur dit :
‘Quels sont ces dires / que vous dites l’un à l’autre
en marchant / et en étant sombres ?’
18 L’un d’eux, nommé Cléopa, répondit / et lui dit :
‘Tu es bien / le seul étranger de Jérusalem
à ne pas connaître ce qui y est arrivé / en ces jours !’
19 Il leur dit : / ‘Quoi ?’
Ils lui disaient :
‘Au sujet de Jésus / celui de Nazareth !
Un homme qui était / prophète !
Il fut puissant en parole / et en actes,
devant Dieu / et devant tout le peuple !
20 Et ils l’ont livré, / les grands prêtres et les anciens,
à une condamnation à mort / et l’ont élevé [crucifié] !
21 Or, nous, nous espérions, / que lui, il allait délivrer Israël !
Et voilà trois jours / que, voilà, toutes ces choses sont arrivées !
22 Mais aussi quelques femmes d’entre nous / ont créé la stupeur.
Elles sont allées de grand matin / à la chambre sépulcrale,
23 et comme elles n’ont pas trouvé son corps, / elles sont revenues nous dire :
‘Nous avons vu là-bas des anges / qui disaient à son sujet :
‘Il est vivant !’
24 Et aussi quelques hommes d’entre nous / sont allés à la chambre sépulcrale
et ils ont trouvé les choses [ainsi] / comme avaient dit les femmes ;
mais lui, / ils ne l’ont pas vu !’
25 Alors / Jésus leur dit :
‘O déficients d’intelligence, / et appesantis de cœur
pour croire toutes les choses / dont parlèrent les prophètes :
26 le Messie ne devait-il pas endurer ces [choses] / pour entrer dans sa gloire ?’
27 Et il avait commencé à partir de Moïse / et à partir de tous les Prophètes,
il leur interprétait ce qui le concernait / à partir de toutes les Écritures.
28 Et ils s’étaient approchés de ce village / où ils se rendaient,
et lui, il leur faisait supposer / qu’il allait vers un lieu plus lointain.
29 Mais ils le pressèrent en lui disant : / ‘Reste auprès de nous !
Parce que le jour maintenant / a décliné pour s’obscurcir !’
Et il entra / pour demeurer avec eux. / Et ce fut tandis qu’il était à table avec eux,
qu’il prit le pain, bénit [dit la bénédiction], [le] rompit / et [le] leur donna.
31 Et aussitôt s’ouvrirent leurs yeux / et ils le reconnurent !
Et lui, / il fut emporté [loin] d’eux !
32 Et ils se disaient l’un à l’autre : / ‘Notre cœur n’était-il appesanti au-dedans de nous,
quand il nous parlait en chemin, / et qu’il nous expliquait les Écritures ?’
33 Et ils se mirent debout à l’heure même, / et s’en retournèrent à Jérusalem.
Et ils trouvèrent les Onze réunis / et ceux qui étaient avec eux,
34 pendant qu’ils disaient :
‘Vraiment, notre Seigneur s’est relevé / et il est apparu à Simon !’
35 Et, eux aussi,
ils racontèrent ce qui s’était passé en chemin, / et comment il s’était fait reconnaître à eux tandis qu’il rompit le pain. »
Tout d’abord, une remarque sur la traduction. Jésus ressuscité reproche aux disciples d’Emmaüs leur cœur « appesanti [yaqīr] » (Lc 24, 25), puis, en Lc 24, 32, les disciples reconnaissent qu’en chemin ils avaient eu le cœur trop lourd, « appesanti [yaqīr] » pour comprendre les explications de Jésus. La plupart des manuscrits grecs (exception du codex de Bèze) disent « brûlant », comme s’ils avaient lu non pas « yaqīr », mais « yaqīd » – le « r » et le « d » étant deux lettres très proches en syriaque, l’une avec le point au-dessus et l’autre le point au-dessous, d’où la confusion possible. C’est un indice de la primauté de la version syriaque par rapport à la version grecque.
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« Nous, nous espérions, / que lui, il allait délivrer Israël ! » (Lc 24, 21). Cette parole des disciples résonne d’autant plus que c’est depuis Emmaüs qu’est partie la reconquête victorieuse de Judas Maccabée contre les Grecs (1 M 4, 3) avec une guerre sainte dans les formes de Dt 20.
Sur le chemin d’Emmaüs, Jésus va leur ouvrir une perspective plus large. D’abord avec Moïse, la Torah, où on lit comment Satan tente Adam de prendre du fruit de l’arbre. La chute d’Adam (et Ève) livre toute sa descendance, et même tout le cosmos à l’emprise de Satan. C’est ce que Jésus va réparer, notamment sur « l’arbre » de la croix. Jésus fut d’abord tenté au désert par exemple quand l’Accusateur, Satan, voulait que Jésus utilise pour lui-même la puissance divine de miracles (Lc 4, 9-12). Durant la Passion, à travers les propos des magistrats, des soldats et du premier malfaiteur, Satan réitéra ses tentations : « qu’il se sauve [vivifie] lui-même, s’il est le Messie, l’élu de Dieu ! » (Lc 23, 35). Or seul un faux prophète se sert des signes dans son propre intérêt, et seuls les hypocrites sont tentés de réclamer un tel miracle : Jésus ne se sauve pas lui-même, et, ce faisant, il a triomphé de Satan !
Jésus continue par les prophètes, où l’on peut lire par exemple au rouleau d’Isaïe, ce chant du Serviteur : « Or ce sont nos souffrances qu’il portait et nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous le considérions comme puni, frappé par Dieu et humilié. Mais lui, il a été transpercé à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes. Le châtiment qui nous rend la paix est sur lui, et dans ses blessures nous trouvons la guérison » (Is 53, 4-5), et encore : « À la suite de l’épreuve endurée par son âme, il verra la lumière et sera comblé. Par sa connaissance, le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes en s’accablant lui-même de leurs fautes » (Is 53, 11).
On comprend que l’Hostie du mémorial de son Sacrifice soit rayonnante : elle rayonne de la lumière et justifie les multitudes. Par son rayonnement, elle nous ajuste à Dieu !
Jésus « prit le pain et bénit [il bénit Dieu : il dit la bénédiction] et rompit et leur donna » (Lc 24, 30). Ces gestes permettent aux deux disciples de reconnaître Jésus parce qu’ils avaient probablement été présents parmi les 5.000 hommes pour qui Jésus avait multiplié les pains, par quatre gestes similaires : il « prit », « bénit » et « rompit » et « donna à ses disciples… » (Lc 9, 16) ; mêmes verbes : nsaḇ - ḇarreḵ - qṣā - yaḇ]
Nous reconnaissons aussi en Lc 24, 30 les quatre premiers verbes de l’institution de l’Eucharistie selon saint Marc : « Jésus prit [nsaḇ] du pain, il bénit [ḇarreḵ], il rompit [qṣā], et le donna [yaḇ] à ses disciples, et dit : » (Mc 14, 22). Cependant, dans le récit de l’institution de l’Eucharistie selon saint Luc, à la place du verbe « il bénit [ḇarreḵ] », Luc a écrit « et il rendit grâce [wawdī, racine ydc] » (Lc 22, 19). De plus, à Emmaüs, Jésus ne prononce pas de parole sur le pain, et il ne prend de coupe de vin. Ce n’est donc pas à proprement parler une Eucharistie (« qūrbānā »), d’ailleurs, comment les disciples d’Emmaüs, qui n’ont pas participé à la dernière Cène, auraient-ils pu reconnaître les paroles eucharistiques ?
Ceci étant dit, l’expérience des disciples d’Emmaüs est inclassable : comment comparer un sacrement avec une telle rencontre avec Jésus ressuscité ? Certainement, ils ont vécu ce que la communion eucharistique procure : une mort à soi-même et une vivification de vie divine. Les deux disciples, en effet, se levèrent debout (« qām » Lc 24, 33) comme Jésus s’était relevé ressuscité (« qām » Lc 24, 34).
Au verset 35, quand ils sont revenus à Jérusalem, « eux aussi racontèrent [eštaᶜīw] », ils jouèrent. Il s’agit de récitatifs gestués ; notamment ils miment devant les apôtres les gestes (en imitant les attitudes, les regards, les intonations…) que fit Jésus : « il prit le pain, bénit [dit la bénédiction], [le] rompit / et [le] leur donna » (Lc 24, 30). C’est alors que les Onze vont reconnaître !
Date de dernière mise à jour : 08/03/2025